Ecrit par Lamiae Boumahrou |
La Journée de la Santé au travail organisée par la CMIM a été l’occasion de dresser le bilan de l’intégration de la notion de sécurité au travail. Et le moins que l’on puisse dire est que les indicateurs sont alarmants selon le SG de l’UMT, Miloudi Moukharik.
Le monde n’est plus à l’abri de nouvelles menaces sanitaires. La crise du Covid a mis en évidence l’importance de disposer de systèmes de santé et de sécurité au travail pour faire face aux effets néfastes de ces crises.
La 10ème édition de la Journée de la Santé au travail organisée par la CMIM a justement dressé l’état des lieux post-covid notamment par rapport aux obstacles auxquelles entreprises, gouvernement et secteur de la santé ont dû faire face. Plusieurs leçons ont été tirées de cette crise sanitaire, encore faut-il s’en rappeler afin d’éviter les mêmes scénarios.
Mais alors où en sommes-nous de l’intégration de la notion de la santé au travail qui est obligatoire de par la loi ?
Faut-il rappeler que l’article 24 du code de travail stipule que « l’employeur doit prendre toutes les dispositions qui permettent de préserver la santé, la dignité des salariés. Le salarié doit être mis au courant de tous ses droits et de toutes les mesures de protection mise en place ».
Malheureusement, les indicateurs de la santé et de la sécurité au travail sont inquiétants. Ainsi selon le secrétaire national de l’Union marocaine du travail (UMT), Miloudi Moukharik, 45.000 accidents de travail en moyenne sont déclarés chaque année avec quelque 3.000 travailleurs et travailleuses qui y perdent la vie chaque année. Sans compter les travailleurs atteints d’un handicap, victimes d’un accident du travail et le nombre grandissant des victimes des risques psychosociaux.
Voir également : [Podcast] A. Alaoui (CMIM) revient sur les enjeux de la santé au travail
« Ces chiffres ne sont pas exhaustifs et devraient être beaucoup plus élevés en raison de l’ampleur du secteur informel dans plusieurs secteurs à haut risque professionnel notamment le bâtiment, les travaux publics, les mines et l’industrie chimique », a-t-il précisé.
Cette situation que le SG de l’UMT qualifie de désastreuse est la résultante de plusieurs insuffisances. Parmi lesquelles : l’absence de réelle politique de protection, de prévention et de réduction des risques ; retard considérable dans la mise en conformité des lois nationales existantes et d’élaboration de nouvelles lois et règlement de santé et de sécurité malgré que le pays ait ratifié plusieurs conventions internationales de l’OIT (les conventions 155 et 161 de l’OIT à Genève portant respectivement sur la sécurité et la santé des travailleurs et sur les services de santé au travail ne sont malheureusement pas encore ratifiées par le Maroc) ; les textes législatifs relatifs à la santé et sécurité au travail bien que nombreux restent insuffisants, éparpillés et difficiles à regrouper.
Mais outre l’insuffisance du cadre réglementaire, l’Etat n’arrive pas à faire respecter les lois en vigueur relatives à la santé et sécurité au travail, déplore M. Moukharik.
Sans oublier un point fondamental, le faible nombre des inspecteurs de travail spécialisés en la matière ainsi que les médecins de travail (moins de 1.400).
Seules 25% des entreprises de plus de 50 personnes disposent d’un service médical malgré les dispositions obligatoires du Code du travail, précise le SG de l’UMT.
« Le patronat revendique l’abrogation de cette disposition sous prétexte que les entreprises ne peuvent pas s’offrir le luxe d’avoir un médecin de travail. Une revendication infondée puisque les entreprises peuvent mutualiser cette action comme le permet la loi », souligne M. Moukharik.
Autre chiffre alarmant, moins de 17% des entreprises marocaines ont créé un comité de sécurité et d’hygiène pourtant obligatoire et prévu par le code du travail.
C’est dire qu’il y a encore du pain sur la planche pour sensibiliser autorités publiques et secteur privé sur les enjeux de la santé et sécurité au travail.