Ecrit par Imane Bouhrara |
L’adoption du projet de décret n° 2.22.925 fixant les conditions d’octroi de la garantie de l’État pour couvrir la liquidité d’urgence, constitue une garantie de plus pour la stabilité financière au Maroc, surtout dans la conjoncture actuelle. Détails des dispositions du décret.
Il était véritablement temps de rendre l’article 67 du statut de BAM sur la liquidité d’urgence opérationnel dans le contexte actuel de psychose mondiale provoquée par la faillite de banques américaines et les difficultés d’autres banques, et leur impact sur les marchés financiers mondiaux.
Article 67 dispose que dans le cadre de l’exercice de sa mission de contribution au maintien de la stabilité financière, la Banque centrale peut fournir, à titre discrétionnaire, une liquidité d’urgence en faveur d’un établissement de crédit rencontrant des problèmes temporaires de liquidité sans soulever de préoccupations sur le plan de sa solvabilité.
BAM peut également la fournir à un établissement de crédit ayant des difficultés de liquidité et présentant des doutes quant à sa solvabilité, sous réserve de disposer de la garantie de l’Etat en couverture de ces opérations.
Sauf que les conditions d’octroi de la garantie de l’Etat doivent être fixées par voie réglementaire. C’est désormais chose faite, avec l’adoption ce jeudi en conseil du gouvernement du projet de décret n° 2.22.925 fixant les conditions d’octroi de la garantie de l’État pour couvrir la liquidité d’urgence, tout en prenant en considération les observations soulevées.
En gros, le décret prévoit que c’est à la banque centrale d’évaluer les critères qualitatifs et quantitatifs d’éligibilité à la garantie de l’Etat. Cette garantie est d’une durée de trois mois comme seuil maximum pouvant être renouvelé après accord favorable de l’autorité gouvernementale en charge des finances.
La garantie est accordée par l’Etat au cas par cas suite à une demande argumentée de BAM contenant également la commission que supportera l’établissement de crédit bénéficiant de cette liquidité d’urgence.
La garantie est levée à la fin de la durée de la liquidité d’urgence ou par remboursement anticipé. Aussi, un échange de données est prévu entre le ministère des finances et la banque centrale dans le cadre des procédures accompagnant l’octroi de cette garantie de l’Etat.
En détail, le décret est composé de 9 articles, dont le 2 dispose que c’est la banque centrale qui recense des doutes sur la solvabilité d’un établissement et vérifie, avant de demander la garantie de l’Etat, que tous les moyens possibles de couvrir les difficultés de liquidité, y compris le refinancement par BAM, ont été épuisés.
Le cas échéant, BAM établit un rapport adressé à l’Etat pour solliciter sa garantie, qui précise bien évidemment l’objet de l’octroi de liquidité d’urgence, les conditions d’octroi, son montant et sa durée.
La banque centrale doit préciser son évaluation des difficultés provisoires de liquidité dont fait l’objet l’établissement de crédit, les doutes de solvabilité et l’impact de l’incapacité de cet établissement sur la stabilité financière, comme souligne l’article 3 du décret qui précise que l’Etat peut demander tout complément d’information qu’il juge nécessaire.
Mais pas seulement, puisque l’article 6 du décret prévoit, dès accord de garantie octroyé, que l’établissement présente un plan de sortie de crise et les délais de son exécution.
Bien évidemment la garantie est libellée au DH et c’est une décision du ministère des finances qui arrêtera le montant de la commission qui sera reversé à l’Etat en contrepartie de sa garantie.
Aussi, une convention sera-t-elle conclue entre l’autorité gouvernementale en charge d’exécuter ce décret, les Finances en l’occurrence et BAM, pour fixer les modalités d’échange d’informations relatives à la garantie de l’Etat des liquidités d’urgence.
Au final, ce mécanisme constitue une garantie de plus dans le contexte actuel marqué par une forte recrudescence des risques sur la stabilité financière dans le monde, et s’ajoute à d’autres comme les stress tests macro dont le dernier a été réalisé par BAM en décembre dernier pour tester la capacité des banques à résister à d’éventuels chocs externes ou détérioration majeure des conditions macro-économiques.
D’autres mécanismes sont prévues pour les banques à importance systémique pour le paysage financier national.
A rappeler également que le Comité de Coordination et de Surveillance des Risques Systémiques a tenu en décembre 2022 sa seizième séance au siège de Bank Al-Maghrib (BAM) à Rabat et a relevé que les indicateurs de suivi continuent de montrer une solidité et une résilience du secteur financier marocain. Pourvu que ça dure !