L’Organisation mondiale du commerce, particulièrement l’Organe de règlement des différends, vient de rendre publique une communication datée du 21 février 2019 et adressée par la délégation de la Tunisie à la délégation du Maroc, concernant les mesures antidumping définitives visant les importations des cahiers scolaires originaires de Tunisie.
Le Maroc se serait bien passé de cette nouvelle affaire ! Déjà que le Royaume a une affaire contre la Turquie en appel devant l’Organe de règlement des différends de l’OMC. Sa première du genre au sujet des droits antidumping appliqués aux produits d’acier laminés à chaud. Et voilà que l’OMC vient de diffuser aujourd’hui, une correspondance en date du 21 février par laquelle la République Tunisienne demande l’ouverture de consultations avec le Royaume du Maroc « conformément à l’article XXIII: 1 de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (« GATT de 1994 »), à l’article 17.3 de l’Accord sur la mise en œuvre de l’article VI du GATT de 1994 (« Accord antidumping ») et à l’article 4 du Mémorandum d’accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends (« Mémorandum d’accord ») concernant l’imposition par le Royaume du Maroc des mesures antidumping définitives visant les importations des cahiers scolaires originaires de Tunisie ».
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Des mesures entrées en vigueur suite à la publication, le 3 janvier 2019 au Bulletin officiel, l’arrêté conjoint du ministre de l’Industrie, de l’investissement et de l’économie numérique et du ministre de l’Economie et des Finances portant application du droit antidumping définitif sur les importations de cahiers originaires de Tunisie.
La Tunisie estime que les mesures susmentionnées semblent être incompatibles avec les obligations du Royaume du Maroc au titre de plusieurs dispositions, entre autres, de l’Accord antidumping et du GATT de 1994. La Tunisie se réserve le droit de soulever d’autres points de fait ou de droit liés aux mesures susmentionnées au cours des consultations et dans toute demande d’établissement d’un groupe spécial. Elle espère que « le Royaume du Maroc répondra en temps opportun à la présente demande. Elle est prête à examiner avec le Royaume du Maroc des dates mutuellement acceptables pour engager les consultations ».
Après une première tentative devant l’OMC en juin dernier, et bien que l’on soit encore à la phase de consultation, la Tunisie semble cette fois-ci déterminée à aller jusqu’au bout, les mesures étant devenues définitives.
Le Maroc dans une mauvaise posture… face à la Turquie
Le Maroc est en train de revivre exactement le même scénario qui s’est passé avec la Turquie. Comme le rappelle Jamal Machrouh, Senior Fellow de Policy Center for the New South et professeur universitaire des relations internationales à l’Université Ibn Tofaïl à Kénitra, le 3 octobre 2016, la Turquie a demandé l’ouverture de consultations avec le Maroc au sujet des mesures antidumping appliquées contre certains produits en acier laminés à chaud. Au mois de novembre de la même année, deux séries de consultations ont eu lieu entre les deux parties sans qu’aucune solution à l’amiable n’ait pu être trouvée. La Turquie a décidé, alors, d’actionner la phase juridictionnelle du système de règlement des différends de l’Organisation mondiale du commerce, en demandant l’établissement d’un groupe spécial.
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Non seulement le Maroc n’a pas pu bloquer la procédure, mais il a été débouté par le rapport de ce groupe, qui a reconnu qu’effectivement, comme l’avançait la Turquie, le Royaume n’a pas respecté la durée maximale prévue dans l’Accord antidumping pour terminer son enquête, à savoir dix-huit mois.
« En deuxième lieu, le Groupe spécial s’est penché sur la question de la légalité du recours par le Maroc aux données de faits disponibles pour calculer les marges de dumping des deux producteurs turcs. Sur ce point, également, le Groupe spécial a constaté que la mesure marocaine était contraire au droit de l’OMC. Il a surtout reproché au Maroc d’avoir rejeté les données communiquées par les deux producteurs turcs, Erdemir Group et Colakoglu, sans avoir réussi à démontrer, de manière objective, leurs caractères insuffisants et/ou erronés », poursuit Jamal Machrouh dans son analyse, publiée par le Policy Center for the New South.
Pour le Groupe spécial, le Maroc n’a jamais informé les exportateurs turcs du fondement précis de sa décision de recourir aux données de fait disponibles et a manqué à son devoir de divulguer les données utilisées pour calculer le taux de dumping.
Enfin, le Groupe spécial a constaté que le Maroc n’a pas corroboré son allégation de non établissement de sa branche de production nationale, représentée en l’espèce par le seul producteur Maghreb Steel, par des éléments de preuve positifs et que son examen de la question n’était pas objectif.
Le Groupe spécial a conclu que le Maroc a agi d’une manière incompatible avec l’Accord antidumping et lui a recommandé de rendre ses mesures conformes à ses obligations au titre de cet Accord. Le Royaume a interjeté appel contre le rapport du Groupe Spécial… une procédure toujours en cours qui pose de grandes interrogations sur la stratégie juridique marocaine en la matière.
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Au lieu de travailler ensemble pour améliorer le commerce internze dans la zone Maghreb, on voit des geste comme celle-ci… Nord Afrique typique…