Selon les récentes Perspectives économiques en Afrique du Nord 2023, publiées par la BAD, la croissance économique au Maroc devrait connaître une hausse significative, à 3,3%, le pays se remettant de la sécheresse de 2022.
Au niveau régional, la croissance dans MENA devrait augmenter légèrement pour atteindre 4,6% en 2023 et se stabiliser à 4,4% en 2024, avec d’importantes disparités entre les pays.
L’inflation dans la région MENA devrait continuer à augmenter pour atteindre un taux à deux chiffres de 14,2% en 2023 et retomber à 6,9% en 2024.
Le déficit budgétaire régional devrait se maintenir autour de 3,5% du PIB en 2023 et 3,2% du PIB en 2024. Toutefois, les chocs extérieurs, tels que les fluctuations des prix des produits de base, et le changement climatique représentent un risque pour l’assainissement budgétaire.
Le déficit régional de la balance courante devrait se contracter pour atteindre 0,5% du PIB et 0,2% du PIB en 2023 et 2024 respectivement. L’environnement économique mondial, y compris la structure des échanges, le tourisme et les flux d’investissements directs étrangers, devrait influencer la position extérieure de la région.
Les priorités immédiates à court terme comprennent la coordination des politiques monétaires et budgétaires, pour faire face à la hausse de l’inflation et protéger les petites entreprises et les populations grâce à des dépenses publiques ciblées. Avec une inflation mondiale élevée, les pays d’Afrique du Nord devront concilier l’impératif de lutte contre l’inflation et l’objectif de maintien de taux de croissance élevés du PIB. De même, le maintien et l’appui de la sécurité alimentaire dans la région restent un objectif crucial, grâce à des investissements dans des variétés améliorées de cultures de base, de meilleures stratégies de gestion de l’eau et des sols.
La région doit renforcer sa résilience, notamment dans le cadre du lien « transition énergétique – gestion de l’eau – sécurité alimentaire ». Enfin, pour relever les défis de l’assainissement budgétaire, les pays doivent poursuivre leurs efforts pour mettre en œuvre des réformes, notamment en améliorant l’administration fiscale par une numérisation accrue, en élargissant l’assiette fiscale, en réduisant le gaspillage des dépenses publiques et en renforçant les systèmes de gouvernance afin d’améliorer la transparence et la responsabilité.
À moyen terme, les gouvernements de la région devraient s’attaquer aux facteurs sous-jacents qui influencent les positions extérieures en encourageant la diversification économique, en améliorant l’environnement des affaires pour attirer les investissements directs étrangers (IDE) et en renforçant le développement du secteur privé et la compétitivité des exportations.
Le renforcement de l’intégration régionale, par le biais de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA), peut offrir des possibilités de stimuler les échanges et les investissements intra-africains et d’améliorer les positions extérieures des pays du Nord.
En ce qui concerne le fardeau de la dette, les gouvernements d’Afrique du Nord devraient s’attaquer aux niveaux croissants de la dette publique à moyen terme, en allouant les fonds de la dette de manière transparente, en restructurant les entreprises publiques en situation difficile et en procédant à des examens réguliers des dépenses publiques.
La nécessité d’une croissance verte devient de plus en plus urgente en Afrique du Nord, car la région est confrontée à d’importants effets du changement climatique, à l’épuisement des ressources naturelles et aux émissions de gaz à effet de serre, ce qui entraîne un développement économique non durable.
Bien que les pays d’Afrique du Nord restent engagés en faveur de la croissance verte, les faibles montants des financements dédiés représentent un obstacle important à la transition de la région vers une économie verte.
L’investissement annuel nécessaire pour mettre en œuvre le plan d’action climatique de la région, conformément aux contributions déterminées au niveau national (CDN), est estimé à 25,7 milliards d’USD jusqu’en 2030. Cependant, le total des flux de financement climatique en Afrique du Nord s’élève à 5,9 milliards d’USD, ce qui ne représente que 23% des besoins annuels estimatifs. Au niveau régional, les donateurs bilatéraux ont été les principales sources de financement climatique, représentant environ 80% des flux totaux. Les contributions du secteur public de l’Afrique du Nord représentent 18%, tandis que les 2% restants proviennent du secteur privé.
Parmi les autres besoins financiers figurent les investissements dans l’agriculture durable (estimés à 33 milliards d’USD par an), tandis que les investissements dans la gestion des déchets et le développement urbain sont estimés à 5-7 milliards d’USD par an et 30-40 milliards d’USD par an respectivement.
Malgré plusieurs défis, les pays d’Afrique du Nord ont la possibilité de débloquer des investissements privés et de stimuler la transition vers une croissance verte, en particulier dans les domaines des énergies renouvelables, de l’agriculture durable et du tourisme durable.
Le potentiel du Maroc en tant que producteur mondial de batteries pour véhicules électriques
Le Rapport de la BAD souligne que les réserves massives de phosphate du Maroc sont un facteur essentiel de sa transformation en un pôle mondial de production de batteries pour véhicules électriques (VE). Une tendance croissante dans les voitures électriques consiste à remplacer les batteries Li-ion nickel-manganèse-cobalt (NMC) par des batteries lithium-fer-phosphate (LFP), en substituant le cobalt et le nickel coûteux ainsi que le manganèse par du phosphate et du fer relativement moins onéreux.
Bien qu’elles n’offrent pas la même autonomie que les batteries NMC, les batteries LFP à base de phosphate sont moins chères, plus sûres et durent plus longtemps que leurs homologues à base de cobalt. En 2020, les exploitations minières de l’Office Chérifien des Phosphates (OCP) ont produit 40,7 millions de tonnes de phosphate et exporté 10,3 millions de tonnes de matières premières.
À partir de ses approvisionnements en phosphate, le groupe OCP a fabriqué 7,1 millions de tonnes d’acide phosphorique, exportant 1,9 million de tonnes de l’intrant principal.
Le Maroc devra développer sa production de phosphate et d’acide phosphorique pour fabriquer des batteries LFP pour véhicules électriques. En utilisant le phosphate et le fer – le Maroc est également un exportateur net de minerai de fer – pour fabriquer des batteries LFP, au lieu du nickel, du manganèse et du cobalt pour les batteries NMC, le Maroc pourrait bénéficier d’un avantage de coût allant jusqu’à 70% par kilogramme.