Ecrit par Lamiae Boumahrou |
Suite à l’annonce du gouvernement de réduire la durée de formation en médecine, pharmacie et médecine dentaire, nous avons interpellé le ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’innovation, Abdellatif Miraoui, sur l’enjeu de cette réforme. Une réforme qui permettra au Maroc de pallier au déficit des ressources humaines et ainsi faire aboutir le chantier de la généralisation de l’assurance maladie obligatoire.
Le compte à rebours a commencé. Et pour cause, le Maroc s’est lancé dans une course contre la montre pour honorer les engagements pris dans le cadre du chantier de la généralisation de la couverture sociale qui inclue la généralisation de la couverture sanitaire. Pour cela, le Maroc doit relever plusieurs défis pour respecter d’une part le calendrier de la mise en œuvre dudit chantier et d’autre part pour mettre à niveau le système de santé. Un système qui devrait accueillir, d’ici fin 2022, 22 millions de Marocains supplémentaires.
Parmi les défis prioritaires pour garantir la réussite du chantier de la généralisation de l’AMO celui de la résorption du déficit des ressources humaines. Et pour cause, le chantier de la généralisation ne pourra atteindre les objectifs escomptés sans une disponibilité des ressources humaines qui aujourd’hui fait défaut. Rappelons que le déficit s’élève à 32.000 médecins et 65.000 infirmiers soit 0,7 médecin et 1,1 infirmier et sage-femme par 1.000 habitants.
Etant loin des standards de l’OMS et étant contraint par le facteur temps, le gouvernement s’apprête à revoir la durée de la formation en médecine, pharmacie et médecine dentaire et d’augmenter les capacités d’accueil pour former plus en moins de temps.
Le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’innovation, a annoncé, dans une circulaire du 17 février, le renforcement de la formation en médecine, pharmacie et médecine dentaire qui passe par une réduction de la durée de 7 à 6 ans.
Interpellé sur cette réforme, le ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’innovation, Abdellatif Miraoui, nous a précisé qu’il s’agit d’une question de souveraineté du pays.
« La souveraineté de notre pays passe aussi par la souveraineté de notre système de santé. Si on ne prépare pas notre avenir nous serons un pays qui dépend des autres pays en matière de ressources humaines (médecins, pharmaciens, infirmiers)», a-t-il précisé.
C’est en effet une contrainte à laquelle le Maroc fait déjà face et qui l’a poussé à ouvrir la porte aux compétences étrangères pour pallier au déficit et préparer le système à répondre aux futurs besoins.
Lire également : ? La généralisation l’AMO : la problématique du déficit en ressources médicales refait surface
Le ministre de la Santé, Khalid Ait Taleb, avait alerté sur la durée de la formation en santé qui pénalise le système de santé et menace l’aboutissement de ce chantier stratégique. « Avec la formation actuelle, il nous faudra 25 ans pour résorber le déficit et être en conformité avec l’accompagnement de la couverture sanitaire », nous avait confié le ministre dans une interview.
D’où l’impératif de la refonte du système de la formation médicale qui est très longue au Maroc. « Il n’y a que la France qui est à 7 ans de formation en médecine alors que l’Allemagne et l’Italie sont à 6 ans, l’Irlande à 5 ans, le Canada et les Etats unis sont à 4 ans », a précisé de son côté Abdellatif Miraoui.
Et d’ajouter que « aujourd’hui on ne juge plus la formation par le nombre d’heures mais par la qualité de la formation ».
Quant au problème du déficit, Abdellatif Miraoui nous a précisé que le ministère compte augmenter la capacité d’accueil au niveau des universités et des facultés de médecine.
Faut-il rappeler que le nombre d’inscrits dans les facultés de médecine ne dépasse pas 2.200 étudiants avec un output de seulement 1.300 lauréats. Pis encore, sur ces 1.300 lauréats, le Maroc ne retient que 500 médecins tandis que les 800 autres quittent le Maroc.
« Nous envisageons de doubler le nombre des lauréats des facultés de médecine en augmentant la capacité d’accueil au niveau des facultés. Tous les moyens financiers exigés par les facultés de médecine et les présidents d’université ont été approuvés par le gouvernement », a précisé le ministre.
Il a également insisté sur les nouvelles technologies, le digital, l’intelligence artificielle, la simulation…, comme outils de formation à intégrer dans les cours pour améliorer la qualité de la formation.
Aujourd’hui, le Maroc n’a d’autre choix que d’aller jusqu’au bout de la réforme de l’enseignement pour rattraper le retard qu’il a accumulé dans plusieurs secteurs y compris celui de la santé.