En quelques années seulement, l’industrie automobile devenue tête de file des métiers mondiaux du Maroc, aux côtés de l’aéronautique et de l’électronique, a pris une importance prépondérante dans le tissu économique marocain.
Essentiellement, grâce à l’évolution de ses exportations qui ont culminé à plus de 65 milliards de DH en 2018, sur un total de 274,7 milliards de DH des biens exportés par le Maroc. Le secteur est devenu le premier poste d’exportation au Maroc contribuant ainsi de manière remarquable à l’amélioration du taux de couverture du Royaume.
Mais aussi parce que ce secteur est devenu pourvoyeur aussi bien d’emplois que d’investissements directs étrangers avec la mise en place des écosystèmes des Français Renault et PSA (Peugeot Citroën), (Bientôt celui du Chinois BYD ?) avec la mise en orbite d’un large réseau d’équipementiers. En effet, l’industrie particulièrement portée par la construction et le câblage a créé plus de 85.000 emplois entre 2014 et 2018 et les ouvertures de nouvelles usines ou l’extension de celles existantes laissent prédire une évolution de la production du secteur.
De même, les métiers mondiaux, dont l’automobile, ont permis de drainer des IDE qui ont totalisé 33,5 milliards de DH à fin 2018 en progression de 28,6% par rapport à 2017 (25,7 Mds de DH).
Mais avec toute l’importance qu’elle prend et le rôle prépondérant qu’elle joue dans notre économie, l’industrie automobile peut-elle souffrir d’une quelconque vulnérabilité ?
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Un risque systémique ?
La première ombre au tableau est la conjoncture morose dans la zone euro, principal marché destinataire de la production marocaine. En effet, non seulement la croissance du PIB se poursuit à un rythme modéré en Europe mais la tête de file de la zone euro qu’est l’Allemagne enregistre une croissance nulle, suite justement à une faible dynamique du secteur automobile. Sans oublier l’Italie qui est entrée en récession.
Aussi, le repli de la confiance économique dans la zone euro s’est-il poursuivi début 2019, comme le montre l’indice ESI de la Commission européenne (-1,2 point à 106,2 en janvier).
D’où découle la deuxième inquiétude qui plane sur notre industrie nationale de l’automobile. En effet, les deux principaux constructeurs qui portent la croissance et le développement de l’industrie automobile que sont Renault et PSA sont issus de la zone européenne. Cela ne risque-t-il pas de créer un risque systémique pour ce secteur en cas de défaillance de l’un ou l’autre des deux constructeurs ? Une hypothèse qu’écarte Driss Benhima, administrateur de Nataeej et ancien PDG de Royal Air Maroc.
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Tout est dans la capacité d’anticipation
Interpellé sur la question, Driss Benhima estime que ce n’est pas un risque systémique qui fait planer le doute sur l’industrie automobile, la menace viendrait d’ailleurs. Pour lui, le devenir de la filière réside dans la capacité d’anticipation face à l’automatisation et le recours en forte croissance aux robots dans la chaîne de production, pour pérenniser les emplois et assurer une production à haute valeur ajoutée. Tout en développant les métiers de la maintenance qui nécessitent toujours l’intervention de l’homme. Driss Benhima donne en cela l’exemple du secteur aéronautique chapeauté par le Gimas (Groupement des industries marocaines aéronautiques et spatiales), qui anticipe la menace de la robotisation sur certains métiers.
En effet, à en croire la dernière étude de la Fédération internationale de robotique, l’automatisation monte en puissance dans l’industrie mondiale et le nombre de robots s’élèverait à 3,05 millions en 2020 (soit du simple au double entre 2014 et 2020). « Ce taux est le résultat d’installations continues d’un grand nombre de robots, en particulier dans l’industrie électrique / électronique et dans l’industrie automobile », lit-on dans le rapport. Particulièrement sur la chaîne de montage, un peu moins dans le câblage et la connectique
Le Maroc ne saurait donc échapper à cette tendance, soutient Driss Benhima pour qui le Royaume continuera tout de même de jouir de ses atouts géostratégiques et sa proximité des principaux marchés pour drainer des IDE.
Pourvu que la filière entame une évolution des profils et des compétences pour bien implémenter l’automatisation sans que soit accentuée l’insécurité sur les emplois existants ou ceux en devenir. D’où l’importance de la formation mais également la formation continue pour préparer les métiers de demain. Un impératif que les opérateurs peuvent facilement prendre en charge. Faut-il rappeler qu’à l’instar de l’aéronautique qui dispose de l’Institut des métiers de l’aéronautique à Casablanca, le secteur automobile dispose d’une offre de formation conséquente notamment avec les instituts de formation aux métiers de l’industrie automobile, (IFMIA) ou encore l’institut de Formation de Renault à Tanger ?
Autre piste proposée par Driss Benhima pour maintenir le caractère compétitif de l’industrie automobile marocaine est la maintenance, comme c’est le cas de l’aéronautique. Une activité sur laquelle l’humain conserve un avantage indétrônable.
L’extension de l’activité à d’autres régions que Tanger et Casablanca (Somaca), notamment à l’Atlantic Free Zone à Kenitra avec tous les investissements conséquents de l’Etat à pérenniser, impose une réflexion pour faire face à une révolution en marche.
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