Ecrit par L. Boumahrou |
Dans un contexte marqué par une accentuation du stress hydrique, la convergence des efforts de tous les intervenants est impérative. Le secteur financier a également un rôle important à jouer pour relever les défis nombreux de la gouvernance de l’eau.
Plus que jamais la question de l’eau revient avec acuité. Les faibles précipitations ont accentué la problématique du stress hydrique et mis en alerte les autorités. Toutes les occasions sont bonnes pour sensibiliser tous les acteurs de la société à la nécessité de rationaliser l’utilisation de cette ressource qui se fait de plus en plus rare.
C’est dans ce sillage que s’est tenue une table ronde co-organisée par Bank Al-Maghrib et la Coalition Marocaine pour l’Eau (COALMA) à l’occasion de la journée mondiale de l’eau, sur le thème « Quelle gouvernance de l’eau dans un contexte de rareté ?
Cette rencontre qui a réuni experts nationaux, responsables d’institutions publiques et privées, société civile ainsi que le secteur bancaire a été l’occasion de rappeler l’impératif de s’attaquer à cette problématique ô combien vitale pour notre survie et pour celle des générations futures.
La première question qui vient à l’esprit est celle de la relation entre la problématique de l’eau et la Banque centrale ?
La réponse a été apportée par le directeur général de BAM, Abderrahim Bouazza en affirmant que la réponse à cette question s’articule autour de 2 axes.
« D’abord, nous partageons la même conviction que la COALMA et d’autres institutions représentées ou non dans cet événement. La Banque s’est exprimée en effet à plusieurs reprises sur la vulnérabilité de l’économie marocaine au changement climatique », a-t-il précisé.
Ainsi, et dans son rapport annuel de 2021, présenté à Sa Majesté le Roi, la Banque a souligné que face au déficit sévère en ressources hydriques, la prise de conscience de la gravité de la situation reste encore insuffisante et qu’une approche holistique et surtout ferme demeure nécessaire pour renforcer la prise en compte des exigences climatiques comme une constante fondamentale de toute action publique ou privée.
Bouazza a rappelé que les politiques mises en place et les investissements dans les infrastructures sont essentiels pour réduire le stress hydrique, mais ils ne seraient pas suffisants s’ils ne sont pas accompagnés par des politiques agissant sur les comportements.
« Je rappelle dans ce cadre que Sa Majesté le Roi a souligné dans son discours d’Octobre 2022 au Parlement qu’il est indispensable de prendre en compte le coût réel de l’eau à chaque étape de la mobilisation de cette ressource. De même, le Nouveau Modèle de Développement a recommandé de mettre en place une tarification qui reflète la valeur réelle de la ressource et incite à la rationalisation des usages », a-t-il souligné.
Il a précisé en l’occurrence que Bank AL-Maghrib ne se limite pas uniquement à porter la bonne parole, elle passe aussi à l’acte pour donner l’exemple et contribuer à l’effort national pour une gestion responsable de l’eau. Dans le cadre de sa politique RSE, BAM a adopté en janvier de cette année une charte d’engagements pour rationaliser l’utilisation de l’eau au niveau des sites de la Banque et pour sensibiliser l’écosystème, en particulier le système financier sur l’usage responsable de la ressource eau.
« Le 2ème niveau de la réponse à la question, c’est que de manière générale les systèmes financiers, qui sont supervisés par les banques centrales et d’autres régulateurs, ont un rôle important à jouer pour financer les investissements nécessaires pour faire face aux dérèglements climatiques en particulier le stress hydrique, couvrir et maîtriser les risques climatiques et canaliser les ressources pour le verdissement de l’économie », a précisé le DG de BAM.
De son côté, la Présidente de la Coalition Marocaine pour l’Eau (COALMA), Houria Tazi Sadeq, a alerté sur la situation des ressources en eau. L’urgence climatique est de mise, a-t-elle proclamé. « Nous espérons à travers cette rencontre de revisiter le rapport des financiers à la question de l’eau », a-t-elle souligné.
En effet le rôle du secteur financier est indispensable pour faire face au stress hydrique et pour relever les défis de la gouvernance de l’eau. Malheureusement, son intervention reste encore limitée. Interpellé sur la question, le DG de BAM nous a affirmé que les banques centrales en tant que régulateurs du système bancaire favorisent la finance verte mais sont aussi tenues de surveiller les risques liés aux enjeux climatiques.
« En plus, les banques centrales ont pris conscience que les enjeux climatiques interfèrent dans les objectifs de stabilité des prix et de stabilité financière, objectifs qui relèvent de leur mandat. Pour coopérer à relever ces nouveaux défis, plusieurs banques centrales ont créé il y a cinq ans une coalition appelé NGFS, réseau des banques centrales et superviseurs pour le verdissement du système financier, dont Bank Al-Maghrib est membre », a-t-il précisé.
Bien que les banques centrales aient un rôle important à jouer dans la lutte contre le dérèglement climatique, force est de constater que la responsabilité première en matière de politique climatique revient aux gouvernements à travers l’engagement dans la neutralité carbone, des politiques sectorielles, la taxe carbone ou des incitations fiscales.
L’un des experts en la matière a affirmé que la question de l’eau ne requiert pas une stratégie gouvernementale mais plutôt une stratégie d’Etat.
Le secteur privé a également contribué à la réflexion autour de la gouvernance de l’eau. Parmi les intervenants, Saâd Azzaoui, Directeur maîtrise d’ouvrage à Lydec, est revenu sur les bonnes pratiques en matière de gouvernance durable et responsable de l’eau.
A noter que le délégataire des services de l’eau et de l’assainissement du Grand Casablanca dispose d’une feuille de route Développement Durable à l’horizon 2030 qui s’articule autour de 3 engagements et 12 objectifs stratégiques au service du développement durable de la Région de Casablanca-Settat.