Le projet de loi 22.20 et l’énigmatique note de Ramid, nous replongent au cœur d’une querelle politicienne au sein même du gouvernement. Si l’on pourrait trouver ça banal d’habitude, en temps de pandémie cela relève de l’immaturité politique pour ne pas dire partisane, tous bords confondus.
En presque une décennie depuis l’accès aux commandes de l’Exécutif dans notre pays, à l’issue des législatives 2011, le PJD a régulièrement été au cœur et même à l’origine d’échauffourées politiques au sein même du gouvernement.
Rappelez-vous en 2013, les prises de becs entre Benkirane et Chabat, devenues populaires et très suivies, vont pousser l’Istiqlal à quitter la majorité et rejoindre les rangs de l’opposition, mettant à mal le PJD qui manque d’alliés et d’expérience pour mener la baraque. D’ailleurs les échauffourées vont ébranler régulièrement la cohésion de la majorité impactant son rendement et provoquant plusieurs remaniements ministériels avec le coût politique que cela engendre.
En 2013, le PJD a eu la chance de pouvoir compter sur le RNI, parti infaillible en cas d’urgence pour continuer à gouverner. Mais cela ne vaudra guère au parti de la colombe plus d’amitié de la part du parti de la lampe. Les querelles entre Benkirane et Mezouar sont devenues légendaires et Akhannouch aura Benkirane longtemps sur le dos, notamment au sujet du Fonds de Développement Agricole.
El Otmani censé être le sage des sages, lui aussi s’en donne à cœur joie lorsqu’il s’agit de titiller le patron du RNI, Aziz Akhannouch.
D’ailleurs El Otmani va tacler Akhannouch jusque après le discours royal du 11 octobre 2019 dans lequel le souverain en appelle justement à la responsabilité politique.
Le projet de loi 22.20, l’échauffourée de trop au sein du gouvernement ?
L’étrange mise en scène qui a accompagné le projet de loi 22.20 a une fois de plus révélé au grand jour l’ambiance réelle et l’inamitié qui règnent au sein de l’Exécutif. D’abord, le conseil de gouvernement approuve un projet de loi qui suscite des interrogations au sein même de l’Exécutif. Pourquoi dès lors ne pas l’avoir reporté tout simplement ?
Et pourquoi après l’avoir approuvé, le SGG ne l’a pas rendu public ?
L’autre question qui se pose avec acuité, est pourquoi Mustapha Ramid, le ministre des libertés et des droits de l’homme après avoir approuvé le projet de loi le 19 mars, envoie 8 jours plus tard, une note au chef de gouvernement et non pas à la commission technique censée revoir la copie de projet de Mohamed Benabdelkader, le ministre de la justice ?
Pourquoi cette note datant du 27 mars a fuité au même moment que l’article 14 du projet de loi 22.20 (qui contient 25 autres articles), relatif aux amendes et peines d’emprisonnement de l’appel au boycott. Et qui est la véritable taupe dans cette affaire ? Et pourquoi le Chef de gouvernement ne tire-t-il pas tout ça au clair et rappelle à l’ordre ses troupes ?
L’effet n’a pas raté lorsque ces passages ont été repris le 27 avril dans la soirée dans les réseaux sociaux. Certes le parti de l’USFP en a pris pour son grade, mais l’une des victimes collatérales de cette affaire n’est autre que le RNI, l’ennemi juré du PJD.
Il faut dire que depuis le début de la pandémie, le RNI a éclipsé tous les autres départements ministériels : sur les cinq ministères qui tournaient à pleine machine durant cette pandémie du Covid-19, trois relèvent du RNI. Finances, Industrie, Agriculture… le trio Benchaâboun-Elalamy-Akhannouch, sans oublier, Laftit, Ait Taleb et Amzazi, est presque révéré en cette période, malgré toutes les critiques qu’on peut leur faire… Que cela peut leur valoir des jalousies et animosités d’autres composantes de l’exécutif ? Pas exclu, mais ce n’est certainement pas le moment, le Maroc fait face à une crise sanitaire sans précédent et une crise économique qui nécessite une cohésion de toutes les composantes de la société.
Aussi, si machination il y a eu et quel qu’il en soit l’auteur, ça manque de beaucoup de finesse politique et de sobriété, d’autant qu’on est encore loin des législatives 2021.
Au final, nous sommes face à un projet de loi liberticide du ministère de la Justice envoyé par le Chef de gouvernement à l’ensemble des ministres, approuvé en conseil de gouvernement et qui a provoqué un tollé auprès des Marocains. Autant dire, une bourde qui a fini par éclabousser et mettre à nu tout le monde !
2 Commentaires
Nous avons des pots lits tissent yens non des politiciens
On ne peut qu’être effaré de voir un Premier Ministre faire voter une loi liberticide donc appelée à être rejetée et combattue alors que notre pays connait la pire des crises économique et sociale depuis l’indépendance.
Durant cette pandémie, un vent de solidarité a soufflé dans notre Société et un sens de la collectivité est devenu prégnant, renforcé par la fierté de voir notre pays cité en exemple.
Et c’est le moment choisi pour secouer cet édifice et voter une loi qui remettra tout en cause et instillera la fracture sociale.
Vous avez dit Gouvernement …?