Ecrit par Soubha Es-Siari |
Les Investissements Directs Etrangers connus sous l’acronyme IDE est un indicateur souvent scruté par les économistes et les analystes parce qu’il permet outre l’évaluation de l’impact de ces investissements sur l’économie marocaine de jauger le climat des affaires au Maroc.
Les Investissements Directs Marocains à l’Etranger (IDME) eux le sont moins et pourtant ils permettent de dégager des retours sur investissement au Maroc lorsqu’ils sont couronnés de succès.
Dans ce cadre, la thématique : « Les Investissements Marocains Directs à l’Etranger : quelles pistes de croissance ? » a été débattue à l’occasion d’un webinaire co-organisé par l’IFC, filiale de la Banque Mondiale et la CGEM.
Intervenant à ce sujet, le représentant de l’Office des changes Driss Bencheikh a tenu à rappeler de prime abord l’évolution au fil des années de la réglementation des changes au Maroc en matière d’investissement à l’étranger. A noter que depuis plusieurs années, la réglementation des changes s’inscrit dans le cadre d’une approche de libéralisation progressive et de simplification des procédures qui vise une intégration de l’économie nationale à l’environnement international.
Cette libéralisation des changes a été couronnée en 1993 par l’adhésion du Maroc à l’article 8 des statuts du FMI à savoir la libéralisation des opérations courantes (importations de biens, exportations, transferts…).
1996 se veut également une date clé dans le processus de libéralisation des changes dans la mesure où c’est la première fois que le Maroc institue le marché des changes qui permet aux banques de la place d’échanger les devises entre elles.
En 2002, les places financières marocaines et les salles de marché ont commencé à utiliser les instruments de couverture de change. Le but étant de se prémunir contre les risques financiers (change, intérêt…).
2007 c’est l’année de possibilité pour les sociétés marocaines résidentes d’effectuer des investissements à l’étranger avec des plafonds et des conditions bien déterminées.
« A partir de 2010, il y a un grand effort aussi bien en ce qui concerne la libéralisation de la réglementation des changes que d’assouplissement de la réglementation relative aux textes, aux circulaires… de façon à rendre cette réglementation simple, facile, accessible et lisible aussi bien pour les opérateurs, les investisseurs que pour les banques de la place. Cet effort a donné lieu à l’adoption d’un seul document qui réglemente les opérations de change avec l’international, il s’agit de l’IGOC (Instructions générales des opérations de change) », annonce Driss Bencheikh.
Le plafond actuel est de 200 MDH/an
En 2022, l’Office des changes a également déployé un grand effort pour franchir une autre étape dans l’ouverture du compte capital pour les résidents et pour répondre aux orientations du nouveau modèle de développement où l’investissement en tant que créateur d’emplois et de richesses occupe une place de choix. Il s’agit de la revue à la hausse du plafond d’investissement.
En 2007, le plafond d’investissement à l’étranger pour les résidents a été de 30 MDH/an. Ce plafond a par la suite augmenté à 50 MDH pour l’ensemble des continents avec une exception pour l’Afrique dont le plafond était à 100 MDH. L’objectif est d’encourager les échanges Sud-Sud.
Aujourd’hui, les sociétés résidentes au Maroc peuvent effectuer des investissements à l’étranger (Afrique et hors Afrique) avec un plafond de 200 MDH/an.
Toutefois cet investissement est conditionné des exigences de la part de l’Office des changes à savoir la tenue d’une comptabilité certifiée par la société en question, l’investissement à l’étranger en lien avec l’activité de la maison mère et que l’entreprise souhaitant investir jouit de 3 ans d’activité.
L’Afrique se taille la part du lion
Selon Driss Bencheikh, toutes ces mesures de facilitation ont permis des résultats probants en ce qui concerne l’investissement à l’étranger. Il étaye ses propos par des chiffres.
Sur les cinq dernières années de 2016 à 2020, on note que les IDME ont atteint 8 Mds de DH en 2016, 12 Mds de DH en 2017, 9,9 Mds de DH en 2018 et 11 Mds de DH en 2019. Durant les neuf premiers mois de 2020, les IDME ont atteint presque 8 Mds de DH. Il ressort ainsi que malgré la crise liée à la pandémie, les investissements à l’étranger ont poursuivi la même tendance en 2020.
La répartition des investissements par continent fait ressortir que l’Afrique se taille la part léonine. Ainsi en 2019, le volume de l’investissement en Afrique se chiffre à 7 Mds de DH (63%) contre 4 Mds de DH hors Afrique soit 36%.
Aussi, sur 2020 (chiffres disponibles sur les 9 premiers mois) la même tendance est-elle confirmée avec 5 Mds de DH en Afrique et 2,5 Mds de DH dans les autres continents.
Quid du retour sur investissement ?
La question qui se pose d’emblée après avoir brossé le panorama des IDME est quel impact sur le Maroc ?
Selon le représentant de l’Office des changes, le retour sur investissement est en moyenne entre 2 et 2,5 Mds de DH/an soit entre 17% et 30%. Ce qui dénote d’un effet positif sur l’économie marocaine.
Tout cela n’empêche pas de dire que l’investissement marocain à l’étranger n’est pas une mince affaire et que le parcours est semé d’embûches (réglementation du pays d’accueil, la double imposition…). D’où la nécessité pour l’investisseur d’être bien accompagné pour éviter les surprises. Comme tout investissement, il faut savoir saisir les opportunités et avoir les visions sur le moyen et long terme. La course aux profits dans le court terme n’est surtout pas conseillée.
L’investissement à l’étranger nécessite par ailleurs une maîtrise du savoir-faire chez soi avant de penser à l’exporter.