Interviewé par Imane Bouhrara |
Le Roi Mohammed VI a imprégné la politique étrangère du Maroc de réalisme et pragmatisme. Ali Lahrichi, docteur en Droit et relations internationales et Doyen de l’ISPJS/Mundiapolis revient sur quelques points de rupture.
EcoActu.ma : Quelles sont les principales caractéristiques de la politique étrangère sous le règne du Roi Mohammed VI ?
Ali Lahrichi : La politique étrangère sous le règne du Roi Mohammed VI s’est imprégnée de réalisme politique partant du principe que le Maroc est un Etat incontournable et une puissance émergente qui veille à garantir la paix et la sécurité dans sa région et dans le monde, et qui participe à la réalisation d’un développement durable et une prospérité collective dans son environnement immédiat et son continent.
A ce titre, le Maroc s’est inscrit sur une trajectoire de diversification des partenaires, que ce soit ceux traditionnelles notamment européens, ou bien avec des pays africains avec un renforcement manifeste du partenariat Sud-Sud, ou encore les partenaires de la région MENA à savoir les pays arabes du Moyen-Orient particulièrement les pays du Golfe.
La dimension atlantique est également très manifeste, notamment les alliances solides et historiques avec les Etats-Unis d’Amérique. Le Maroc est également ouvert sur les pays asiatiques. A ce niveau, nous pouvons citer le partenariat avec la Chine dans le domaine de la santé avec pour exemple édifiant l’unité de fabrication des vaccins anti covid et autres vaccins.
La politique étrangère actuelle démontre que le Maroc est un acteur régional qui se distingue par un leadership incontesté et confirmé dans son environnement immédiat, à savoir maghrébin, africain, arabe et aussi méditerranéen.
Quid des nouveaux paradigmes dans la relation du Maroc avec l’UE sous le règne du Roi Mohammed VI ?
Les nouveaux paradigmes de la politique étrangère s’articulent autour de la clarté de la position de nos partenaires traditionnels par rapport à l’intégrité territoriale du Royaume du Maroc, particulièrement les pays européens ; notamment, l’Allemagne, l’Espagne, et dans une moindre mesure la France.
A ce sujet, le message de Sa Majesté le roi Mohammed VI a été très explicite dans son discours de l’année dernière, où il a exprimé d’une manière limpide les attentes du Maroc de ses partenaires : « nous sommes tout à fait fondés à attendre de nos partenaires qu’ils formulent des positions autrement plus audacieuses et plus nettes au sujet de l’intégrité territoriale du Royaume », et « à ceux qui affichent des positions floues ou ambivalentes, Nous déclarons que le Maroc n’engagera avec eux aucune démarche d’ordre économique ou commercial qui exclurait le Sahara marocain ».
En effet, les destinataires de ce message, qui sont par ailleurs nos alliés traditionnels, mais dont les positions étaient floues et ambiguës, ont bien répondu à l’appel de Sa Majesté.
D’ailleurs, l’Allemagne qui avait une attitude hostile aux intérêts du Maroc a fait un revirement de sa position après la tenue des élections en Allemagne et l’installation d’un nouveau gouvernement qui s’est aligné sur la position marocaine.
Pour l’Espagne, on peut parler d’un tournant historique dans le cours des relations entre le Maroc et l’Espagne et qui met fin aux tergiversations de la position espagnole par rapport au Sahara Marocain.
En effet, la nouvelle position de l’Espagne s’inscrit parfaitement dans la légitimité historique et juridique de la véracité de la question de l’intégrité territoriale du Maroc et sa souveraineté sur ses provinces du Sud.
Peut-on parler d’un revirement majeur sur le dossier du Sahara marocain ?
Nous ne pouvons que nous féliciter des termes et de l’esprit de la résolution 2602 qui conforte le Maroc sur la véracité de la marocanité du Sahara et la position immuable du Royaume sur son intégrité territoriale ad vitam aeternam.
Tout d’abord, la résolution 2602 s’aligne parfaitement comme les précédentes sur l’initiative marocaine pour une solution politique pacifique, juste et durable et ce depuis 2007.
En effet, d’un côté, dans les exposés des motifs de la résolution du Conseil de Sécurité (CS) nous relevons que ce dernier réaffirme son ferme appui aux efforts que le Secrétaire général et son Envoyé personnel font pour mettre en application les résolutions précédentes depuis la résolution 1754 de 2007 à la résolution 2548 de 2020.
Et aussi que le CS prend note de la proposition marocaine présentée au Secrétaire général le 11 avril 2007 et se félicite des efforts sérieux et crédibles faits par le Maroc pour aller de l’avant vers un règlement définitif de ce dossier.
Aussi, le CS se félicite-t-il des mesures et initiatives prises par le Maroc, du rôle joué par les commissions du Conseil national Des droits de l’homme à Dakhla et à Laayoune et de l’interaction entre le Maroc et les mécanismes relevant des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme de l’Organisation des Nations Unies.
D’un autre côté, dans les décisions émises dans ladite résolution, le CS appelle les acteurs concernés à s’asseoir autour d’une table de négociation pour trouver une solution politique. Seulement, l’Algérie, qui a participé aux tables rondes de 2018 et 2019, et qui est le principal concerné par ce différend refuse de le faire.
On ne peut éluder également des succès sur ce dossier auprès des pays africains depuis le retour du Maroc au sein de l’Union africaine en 2016.
Le retour du Maroc au sein de l’UA est le résultat d’une politique éclairée de Sa Majesté le Roi Mohammed VI.
En effet, ce retour triomphal est la démonstration limpide d’une part du retour du Royaume à sa vraie place de leader en Afrique. Pour rappel, le Maroc est l’un des fondateurs de l’ancêtre de l’UA à savoir l’OUA, qu’il avait quittée en 1984 après les manœuvres basses de l’Algérie.
Et d’autre part, c’est l’articulation de la politique étrangère marocaine, qui plaide en faveur du développement mutuel, à travers la construction sur des bases solides et équitables des rapports Sud-Sud avec les Etats africains.
D’autre part et comme nous l’avons évoqué auparavant, le leadership du Maroc sous le règne du Roi Mohammed VI est confirmé de par sa position, sa diplomatie, sa puissance sécuritaire et dans le monde des renseignements, et aussi par tous les efforts consentis pour instaurer et faire prévaloir les principes des Nations-Unies notamment le maintien de la paix et la sécurité internationale.
Le Maroc, puissance régionale qui œuvre pour la réalisation de ces objectifs, s’inscrit parfaitement dans l’optique de la lutte contre le terrorisme qui frappe malheureusement le monde et particulièrement l’Afrique, où DAECH et les groupes terroristes sévissent sévèrement dans la région du Sahel, qui a connu en 2021, 35 % des décès à cause du terrorisme dans le monde contre seulement 1 % en 2007.
Le Maroc, acteur de paix et de sécurité dans le monde par les faits et par l’action a co-présidé récemment avec les Etats-Unis, sous l’égide de l’ONU, la réunion organisée à Marrakech au mois de mai de cette année, la coalition anti-Daech, où 85 pays, soit la moitié de la planète, étaient présents pour lutter contre ce fléau mondial : le terrorisme.