3 ans après l’adoption de l’amendement de la loi 13/2009 sur les énergies renouvelables qui autorise l’ouverture du réseau à la basse tension, les décrets d’application n’ont toujours pas vu le jour. Il semblerait que les pouvoirs publics ne sont pas encore prêts à franchir ce pas pourtant inévitable voire impératif pour réussir la transition énergétique.
Les particuliers, administrations, communes et entreprises devront attendre quelques années avant de pouvoir produire leur propre énergie et l’injecter dans le réseau. Pareil pour les investisseurs privés qui s’impatientent depuis l’adoption de la loi 13/2009 et qui déplorent un retard non justifié de sa mise en application.
Les experts, quant à eux, imputent ce blocage au lobbying de l’ONEE et celui des régies d’eau et d’électricité qui retardent l’application effective de cet amendement. La raison évoquée, un manque à gagner qui impacterait leurs équilibres financiers. En effet, cette ouverture impliquera une chute des ventes d’électricité et par conséquent celle de leurs gains.
L’ouverture de la basse tension se joue donc entre les intérêts financiers du producteur et des distributeurs et ceux de l’Etat.
Toutefois, préserver les intérêts des producteurs/distributeurs ne devrait pas freiner l’élan du développement des énergies renouvelables dans notre pays. Car les conséquences de ce ralentissement sur la transition énergétique et l’économie nationale ne sont pas à négliger.
En effet, cette ouverture permettra au Maroc de baisser sa demande nette en électricité et par conséquent réduire sa facture énergétique qui pèse sur la balance commerciale. Autrement dit, plus on produit de l’énergie propre, moins on importe et plus on réduit le déficit de la balance commerciale. Rappelons qu’à fin juillet dernier, le déficit commercial s’est aggravé de 8% à plus de 118,3 milliards de dirhams (MMDH) contre 109,5 MMDH durant la même période un an auparavant, selon l’Office des changes. L’importation des produits énergétiques a cru de 6,5 MMDH. Le prix du baril a franchi la barre des 74 dollars fin juin à début juillet. C’est dire que le Maroc est toujours à la merci des fluctuations des cours internationaux du pétrole.
D’où l’enjeu d’ouvrir la moyenne et la basse tensions au réseau ce qui permettra au pays d’augmenter la part des besoins en énergie que le Maroc est appelé à répondre grâce aux énergies propres. Faut-il rappeler que l’objectif de porter la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique à 42% à l’horizon 2020 et de 52% en 2030 ne permettra de répondre qu’à 21% des besoins en énergie électrique en 2020 et à seulement 10% de tous les besoins en énergie. Booster cette part requiert donc la généralisation de l’utilisation des énergies propres par toutes les composantes de la société.
A cet effet, le gouvernement doit faire preuve de plus de courage politique pour aller jusqu’au bout de cette ouverture. La réussite du pari énergétique que le Maroc s’est lancé dépend non seulement des grands projets lancés dans le solaire et l’éolien. Mais de tous les autres piliers de la stratégie y compris la moyenne et basse tension. Autre point et pas des moindres, il faut élargir le champ d’intervention de l’Autorité Nationale de Régulation de l’Electricité dont le président, Abdellatif Bardach, a récemment été nommé par SM le Roi, à la basse tension. Aujourd’hui seules la très haute, haute et moyenne tensions sont concernées par le Projet de loi n° 48-15 relatif à la régulation du secteur de l’électricité.