Sans aucun doute, la pandémie du Covid-19 s’est rabattue sur la RAM comme une foudre. Avec tous les avions cloués au sol depuis fin mars, la compagnie nationale traverse l’une des pires crises de son histoire. Dans un courrier adressé aux collaborateurs de la RAM, le Président directeur général Abdelhamid Addou n’y vas pas par quatre chemins. La compagnie est dans de beaux draps. « Je voudrais partager avec vous, en toute transparence, la situation de notre compagnie et notre combat au quotidien pour préserver nos fondamentaux et notre marque », s’est confié A. Addou.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Le trafic a baissé respectivement de 60% en mars et 100% en Avril, par rapport à l’année dernière soit une perte du chiffre d’affaires de 50 millions de dirhams par jour. Rappelons que la ministre du Tourisme a récemment annoncé que l’estimation du coût des annulations est de 1 Md de DH dont environ 50% relatives au transport aérien (RAM). Il semble que la compagnie arrive à bout de son plan d’austérité déployé en mars (report des dépenses non essentielles, renégociation des contrats et des délais de paiement…) et qui lui a permis, tout de même, de respecter ses engagements pour mars, avril et mai.
« Juin nécessitera néanmoins un apport important, en termes de cash-flow. A l’instar de beaucoup de compagnies aériennes, nous pourrons lever de la dette garantie par l’Etat, pour faire face aux engagements du mois de Juin », a précisé le PDG. Ce qui risque d’aggraver l’endettement de la RAM qui figure par les établissements publics les plus endettés. Mais dans le contexte actuel, pas d’autre alternative.
Une reprise dans la douleur
Après avoir rappelé les défis que la RAM, à l’instar de toutes les compagnies aériennes, devra relever dans les prochains mois voire années, A. Addou a appelé les collaborateurs à faire preuve de discernement et d’abnégation pour privilégier l’intérêt commun et de préserver des emplois, aux considérations court-termistes.
« C’est la seule voie qui nous permettra de traverser cette épreuve difficile, avec le moins de dégâts possible », a-t-il affirmé.
En effet, la reprise du secteur s’annonce très compromettante associée à un manque de visibilité sur les modes de voyage qui vont certainement changer. Sans doute il y aura un avant et un après Covid-19 dans le secteur aérien.
« Pour autant, nous ne pouvons baisser les bras. Nous devons œuvrer ensemble pour sortir plus forts de la crise. Nos atouts sont réels. Nous avons une marque forte, des équipes reconnues parmi les meilleures de l’industrie, un leadership continental incontesté, renforcé davantage avec notre adhésion à OneWorld. Nous avons entamé une digitalisation forte de notre compagnie et de nos produits, nous sommes désormais plus efficaces », a souligné le PDG dans une tentative d’encourager les troupes.
Une motivation qui va suivre un appel à un effort collectif. Et pour cause, les prévisions tablent sur une reprise lente sur 3 ans soit 36 mois.
« La route sera donc longue et pleine de turbulences, notamment en termes de contraction de la demande mondiale et des financements. Nous serons dès lors amenés à faire des sacrifices importants, et réduire la voilure de manière drastique. Nous devons aussi changer notre manière de travailler et revoir nos coûts et nos charges fixes de manière forte et pérenne, afin d’être plus compétitif et plus agile », n’a pas manqué de préciser le PDG.
En d’autres termes, il annonce une politique d’austérité sans précédente que la compagnie sera amenée à appliquer pour sauver les meubles.
Dans son courrier, le PDG affirme que les discussions sont en cours avec l’Etat, depuis le début de la crise, pour mettre en place un plan de sortie de crise. « Nous travaillons étroitement avec plusieurs membres du gouvernement, afin de préparer une ébauche de plan de reprise à même de garantir la pérennité de notre entreprise à long terme », a-t-il précisé.
Vu les pertes engendrées, cette phase s’annonce des plus compliquées. Plusieurs scénarii sont en étude en termes de niveau et de délais de redémarrage de l’activité. Les actionnaires devront valider une direction qui devra garantir leur soutien au plan de relance.
Aussi des réunions de partage et de concertation seront tenues avec les partenaires sociaux afin de finaliser ledit plan. « Nous chercherons à préserver au maximum l’emploi tout en garantissant la pérennité financière de la compagnie, et cela dans un environnement concurrentiel des plus agressifs, entre low costs européennes et compagnies aériennes africaines, face à une demande en fort repli », a annoncé A. Addou.
La suite s’annonce donc tumultueuse pour la compagnie nationale qui devra compter sur l’Etat pour sortir la tête de l’eau.
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