Depuis quelques années, les mêmes dysfonctionnements du secteur de la Santé reviennent sans cesse. Pourquoi les établissement publics de santé ont du mal à gérer leurs ressources financières?
Une fois de plus, le secteur de la Santé n’a pas échappé à la loupe des expertes de la Cour des comptes qui ont passé au peigne fin l’un des secteurs sociaux le plus décrié dans notre pays. Et sans surprise, le rapport révèle des dysfonctionnements en matière de planification stratégique et de programmation, de gouvernance hospitalière, de gestion des services médicaux, de facturation, de recouvrement des recettes ainsi que de gestion des médicaments et du matériel médical. Ce qui interpelle le plus c’est que ce sont les mêmes insuffisances qui reviennent depuis quelques années dans le rapport de l’équipe de Driss Jettou. La qualité des prestations de santé publique n’a donc pas bougé d’un iota. Bien au contraire, elle s’est détériorée notamment à cause de l’élargissement de l’assurance maladie obligatoire (AMO) qui s’est fait avec les mêmes moyens humains, techniques et financiers.
Outre les dysfonctionnements que les Marocains perçoivent d’eux-mêmes, les experts de la Cour des comptes ont également pointé du doigt la gestion des ressources financières des établissements publics. Il ressort ainsi que les sept centres hospitaliers, objet du contrôle, connaissent toujours des problèmes liés à la facturation de leurs services et au recouvrement de leurs recettes.
Chiffres à l’appui, en 2017, les hôpitaux publics n’ont bénéficié que de 8% soit 680 MDH des remboursements effectués, dans le cadre de l’assurance maladie obligatoire, par la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) et la Caisse nationale des organismes de prévoyance sociale (CNOPS) sur un montant global de 8,5 Mds de DH. Le secteur privé s’est, quant à lui, accaparé les 92% des paiements soit 7,82 Mds DH.
Les paiements directs des organismes gestionnaires de l’AMO au public ont même baissé de 2,3% par rapport à 2013 et ce malgré l’élargissement de l’AMO. Les chiffres du ministère de la Santé révèlent qu’en 2013 les hôpitaux publics ont bénéficié de 10,3% de l’ensemble des paiements directs des organismes gestionnaires de l’AMO.
Ce constat n’a qu’une seule explication: les bénéficiaires de l’AMO préfèrent se faire soigner dans le privé (malgré la cherté des prestations) plutôt que dans le public où la qualité des soins laisse à désirer. L’interprétation que nous pouvons faire des conclusions du rapport est que la crise de confiance entre les citoyens et leurs systèmes de santé ne cesse de se détériorer.
Une crise qui touche également les professionnels de santé. A noter que depuis quelques mois, rien ne va entre le ministère de la Santé et ses employés. La démission collective de 130 médecins le 24 octobre de la région Casablanca-Settat en témoigne de l’ampleur de la crise dans laquelle le secteur est plongé. L’arrivée de Anass Doukkali à la tête du département n’a fait qu’aggraver la situation. Le Plan santé 2025 que le ministre visait à élaborer en partenariat avec les hommes et femmes du secteur sera-t-il compromis ? Il faudra attendre la suite des événements et voir si Anas Doukkali réussira-t-il au moins à présenter son plan dans les délais.