Avec des besoins estimés entre 5.000 et 7.000 milliards de Dollars annuellement, les financements conventionnels ne peuvent à eux seuls contribuer à la réalisation des Objectifs de développement durable. Quel rôle de l’écosystème participatif ? Al Akhdar Bank lance le débat pour réveiller les consciences.
Le financement des Objectifs de développement durable (ODD) définis par l’ONU à l’horizon 2030 est une priorité nationale qui mobilise un grand nombre d’institution publiques et privées à travers le monde. Il faut donc puiser des ressources financières pour implémenter des projets en faveur des énergies renouvelables, d’agriculture durable, de lutte contre le réchauffement climatique et le développement durable. Un agenda ambitieux auquel le Maroc est une partie prenante.
« À l’échelle mondiale, les experts des nations unies évaluent les besoins de financement des projets pour réaliser ces ODD, entre 5.000 et 7.000 milliards de Dollars par an », explique Fouad Harraze, le Directeur d’Al Akhdar Bank.
La banque participative filiale du Groupe Crédit Agricole du Maroc et de la Société islamique pour le développement du secteur privé, organisait ces 20 et 21 février un important événement consacré au rôle de l’écosystème participatif dans le financement des ODD.
Cette conférence, tenue en partenariat avec le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) et le Global Islamic Finance and Impact Investing Platform (GIFIIP) a réuni nombre d’experts pour un échange d’expériences le plus constructif qui soit.
Selon Gülçin Salingan, experte du PNUD « quand sont épuisés les financements conventionnels, il reste un creux de 2.500 milliards de dollars par an à combler. Une niche qui commence à intéresser le secteur privé notamment les acteurs financiers islamiques puisque ces projets génèrent quelques 12.000 milliards de Dollars de bénéfices pour le secteur privé.
Les enjeux pour les ODD se situent sur trois niveaux, d’abord la mobilisation des ressources financières, ensuite l’innovation dans les mécanismes de levée de fonds et enfin, l’élargissement du cercle des partenaires.
« La finance islamique est considérée par plusieurs secteurs comme l’une des pistes alternatives prometteuses au vu de son ampleur grandissante à travers le monde et de la croissance remarquable qu’elle affiche avec une valeur totale qui s’est établie à 2.000 Mds de dollars en 2018 et devrait atteindre les 4.000 Mds de dollars en 2023, selon Thomson Reuters. Pour sa part le marché des capitaux islamiques représente 27% du total actif des institutions financières islamiques avec une valeur de 600 Mds de Dollars », poursuit Fouad Harraze, pour qui, il apparaît clairement que la finance islamique peut jouer un rôle majeur dans la mobilisation des ressources financières au profit des ODD.
Mais qu’en est-il au Maroc où l’écosystème demeure embryonnaire et toujours en phase de construction ? Evoquant l’expérience d’Al Akhdar Bank, Fouad Harraze souligne l’ultime conviction que le financement des ODD est aligné aux valeurs de l’investissement responsable puisque de par son business modèle, ses principes et ses objectifs, elle permet aisément de conjuguer rentabilité et financement des projets à fort impact social et environnemental. Ce qui est totalement en phase avec les valeurs de la finance islamique ou participative.
« Pour Al Akhdar Bank c’est d’abord une question d’ADN, mais pas que. Nos deux maisons mères, le Groupe Crédit Agricole du Maroc et la Société Islamique de développement du secteur privé (ICD) sont deux institutions de développement très actives dans ce domaine. D’ailleurs parmi les indicateurs d’évaluation de la banque et au-delà des performances financières, figure l’impact économique et social de nos actions », poursuit-il. La banque est donc doublement appelée à contribuer modestement aux projets responsables au même titre que les établissements conventionnels, et puis aussi pour inclure les porteurs de projets que ce soit des particuliers ou entreprises qui ne veulent pas faire appel au financement conventionnel pour des raisons de conviction. « Ceci nous permettra d’avoir un impact direct sur plusieurs ODD à la fois. Nous sommes également interpelés au sujet de l’économie basée sur la durabilité et qui impacte tous les secteurs d’activités. Nous nous devons de les intégrer dans nos mécanismes de nos financements pour accompagner nos clients », estime Fouad Harraze.
Dernier point évoqué et non des moindres, les critères d’évaluation des investisseurs à l’échelle mondiale sont en train de connaître un bouleversement en intégrant des critères d’impacts positifs de sorte à influencer les conditions d’accès aux financement d’une manière durable.
À travers cet événement, l’ambition est de contribuer activement d’abord à mettre en évidence ce lien direct entre la finance participative et les ODD. Mais surtout faire émerger une conscience d’implication forte de la part de l’écosystème participatif : banques, compagnies Takaful et fonds d’investissement dans le financement responsable et l’intégration des ODD au cœur de ses priorités.
Les expériences à travers le monde sont légion et le Maroc peut s’en inspirer, comme l’a souligné pour sa part Aamir Khan, le Directeur de l’ICD, qui dans son allocution, s’attarde sur la question migratoire. Il rappelle d’ailleurs que 2019 a réenregistré 279 millions d’émigrés, dont 130 millions de femmes et 30 millions d’enfants. Et cela ira crescendo avec l’impact du réchauffement climatique. D’ où l’importance de la prise de conscience des économies et des problèmes qui peuvent résoudre les financements des projets qui servent les Objectifs de développement durable.
Le défi réside également dans la mise en contact entre les marchés financiers et les entrepreneurs sociaux pour un investissement à fort impact social et environnemental. Mais si la prise de conscience est là, c’est déjà ça de gagné !