Interviewé par Imane Bouhrara |
La ZLECAF qui pèse pour 54 économies africaines constitue un important relais de croissance pour le continent africain. Mais l’exploration de marchés relativement inconnus pour une entreprise ne peut se faire sans une appréciation objective du risque.
Dans cette dynamique, Hicham Alaoui Bensaïd, le Directeur général d’Euler Hermes ACMAR, considère l’assurance-crédit comme un levier incontournable, autant pour recueillir l’appréciation du risque de contrepartie que pour sécuriser ses impayés potentiels.
EcoActu.ma : Tout d’abord, qu’est-ce qui a motivé la non-tenue de l’Observatoire international du Commerce que vous organisez chaque fin d’année ? Est-ce en raison du climat d’incertitude que fait planer la pandémie même en 2021 ?
Hicham Alaoui Bensaïd : Je ne peux que me satisfaire de votre question, qui atteste clairement de l’impact visiblement conséquent d’un tel évènement. A ce titre, je peux avancer deux éléments de réponse.
Tout d’abord, nous avons estimé cette année que très certainement, un nombre inédit de webinaires, traitant de problématiques économiques spécifiques, avait été organisé, par différents intervenants, et que notre Observatoire International du Commerce n’aurait vraisemblablement pas sa valeur ajoutée usuelle.
Par ailleurs, dans un contexte macro-économique aussi délicat, la totalité des salariés d’Euler Hermes ACMAR n’a eu comme unique priorité que de consacrer toute son énergie à servir au mieux nos clients ; quitte à choisir, nous avons, sans hésiter, préféré nous dédier à nos partenaires, dont les besoins et les attentes n’ont jamais été aussi importants.
Comment évaluez-vous l’incidence de cette année de pandémie sur l’activité du groupe, sur les prévisions élaborées fin 2019 mais également sur la carte des risques notamment les défaillances ?
Nous parlons concrètement d’une des pires années, d’un point de vue économique, de l’Histoire récente, en temps de paix.
Dans une telle configuration, le risque de contrepartie a mécaniquement augmenté, dans des proportions très substantielles, se traduisant, au Maroc notamment, par une projection de hausse des défaillances d’entreprises de plus de 23%, à l’horizon 2022, comparativement à l’exercice 2020.
Quelles actions ont-elles été déployées pour contrecarrer l’émergence de nouveaux risques en raison de la pandémie ? De nouvelles couvertures ?
Forts, d’une part, de notre qualité de filiale ultime de l’assureur mondial Allianz, une des entreprises financières les plus solvables et les plus résilientes au Monde, comme en attestent ses ratings auprès des agences de notation les plus réputées ; mais également, d’autre part, de notre position de leader du marché d’assurance-crédit au Maroc, avec près de 30 ans d’observation et d’analyse des comportements de paiements inter-entreprises, nous avons, somme toute, apporté une réponse circonstanciée et proportionnée à la conjoncture actuelle, à mon avis.
De fait, autant notre ADN de prévention structurelle des risques, que notre solvabilité financière ainsi que celle de nos actionnaires, nous ont permis d’allier amont et aval de la chaîne de valeur, apportant ainsi un certain confort dans une conjoncture tellement incertaine.
Ce début d’année marque le lancement de la Zlecaf qui concerne 54 pays africains. Quelle place de l’assurance-crédit de cette nouvelle dynamique africaine des échanges commerciaux ?
Je considère l’assurance-crédit comme un levier incontournable d’une telle dynamique, tout simplement parce que ce mécanisme permet, pour une entreprise marocaine exportatrice, autant de recueillir l’appréciation du risque de contrepartie, émanant de professionnels expérimentés, que de sécuriser ses impayés potentiels.
Par essence, l’exploration de marchés encore relativement inconnus s’accompagnant de son lot d’incertitudes et de risques, faire l’économie de professionnels du risque de crédit pourrait s’avérer un pari beaucoup trop risqué à mon sens.
Quid des actions de sensibilisation des clients sur les risques potentiels sur ce marché unique en devenir face à 54 pays tout aussi différents qu’hétérogènes avec des risques variables et de l’importance de l’assurance-crédit ?
La méthodologie du Groupe Euler Hermes s’articulant autour d’une analyse actualisée des risques pays, sectoriels et entreprises, notre évaluation est bien entendu individualisée et spécifique à chaque contexte.
L’apport d’une telle expertise, accumulée au cours de tant d’années d’expérience, peut à ce titre s’avérer particulièrement précieux.
A votre avis, quelle serait la meilleure démarche d’expansion en Afrique à suivre pour une entreprise notamment celles de petites tailles ? Surtout si elle n’a pas de connaissance des marchés pour sécuriser ses opérations encore moins cette mentalité de gestion du risque ?
Je répondrais, sans hésiter, qu’il s’agirait pour une telle entreprise de s’adosser à un opérateur de premier plan en assurance-crédit, car le triptyque prévention du risque, recouvrement gratuit de créances et indemnisation de créances impayées garanties peut tout simplement permettre aux entreprises, notamment les TPE et les PME, de se consacrer à leur cœur de métier.
L’externalisation d’activités annexes à des professionnels me semble clairement être dans l’ordre des choses, surtout lorsque la concurrence entre entreprises se joue de plus en plus sur des détails marginaux.
On avance les retombées de la Zlecaf en termes d’échanges commerciaux, mais qu’en est-il du potentiel d’évolution de l’activité de l’assurance-crédit dans le continent ?
Je le qualifierais tout simplement d’insoupçonné, car nous parlons concrètement d’un des rares continents appelés à croître, tant démographiquement qu’économiquement, dans les décennies à venir.
L’Afrique est un continent aux influences tellement diverses (arabes, francophones, anglophones, lusophones…) que la collaboration intra-africaine, actuellement la plus faible au Monde si nous nous référons concrètement à l’intégration économique stricto sensu, constitue un relais de croissance évident, avec des retentissements escomptés à l’échelle locale, régionale et mondiale.