Dans sa 26ème édition tenue du 23 au 25 septembre, la Conférence de la Fédération Afro-Asiatique d’Assurance et de Réassurance (FAIR) a été un moment fort pour les professionnels africains et asiatiques de mettre le curseur sur les nouveaux risques qui guettent le secteur de l’assurance et de la réassurance dans les deux continents. Après 2007, c’est la deuxième fois que la ville ocre accueille cet événement qui se veut un partage d’expérience et de savoir-faire entre les différents pays membres. Pour 2019, cet évènement phare s’inscrit pleinement dans l’actualité internationale et se tient sous le thème : « Les nouvelles barrières économiques dans les marchés afro-asiatiques des assurances ».
Organisée sous l’égide de la Société Centrale de Réassurance (SCR), filiale du groupe CDG et hôte organisateur de FAIR 2019, cette 26ème édition coïncide avec le 60ème anniversaire du réassureur national, précise Abdellatif Zaghnoun Directeur Général de la CDG.
« En effet, dans un contexte marqué par des tensions géopolitiques, des guerres commerciales et du retour des mesures de protectionnisme, les compagnies d’assurance et de réassurance doivent être sur le qui-vive », avise A. Zaghnoun. Elles doivent développer de nouvelles approches d’évaluation et de couvertures de risques. Dans ce sillage, la coopération afro-asiatique ne peut être que de bon augure.
Que ce soit en Afrique ou en Asie, le potentiel existe dans la mesure où ces deux continents ont fait preuve de résilience et ont emprunté un trend haussier de croissance économique au cours des dernières années. Outre la croissance économique, celle démographique peut être un terreau propice pour le développement de l’assurance et de la réassurance. Le marché émergent de l’assurance représente en effet 20% du marché mondial. D’ici 10 ans, il pèsera pour 30%.
Au Maroc et conformément aux orientations du Souverain, la coopération Sud-Sud revêt une grande importance. Elle se veut un axe stratégique pour permettre au secteur des assurances, à travers le partage d’expérience, de jouer le double rôle qui est le sien en matière de mobilisation de l’épargne et de couverture de risques. A rappeler à juste titre d’ailleurs qu’au Maroc, le total actif représente 15% du PIB. Son rôle est donc déterminant pour la croissance économique.
Aujourd’hui, avec l’introduction de nouvelles assurances obligatoires telles que la couverture des catastrophes naturelles (Démarage du FSEC le 1er janvier 2020) et bientôt l’assurance inclusive, le marché de l’assurance affiche une sorte de dynamisme qu’il ne faut pas perdre de vue.
Toutefois, vaille que vaille, les compagnies d’assurance sont appelées à se préparer aux risques numériques ou les cyberattaques, aux changements climatiques en s’orientant vers des projets verts… sans omettre un renforcement de la réglementation qui reste l’épine dorsale du secteur des assurances.
« Dans un contexte en perpétuel changement, en tant que régulateur, notre mandat premier est de protéger le secteur contre l’instabilité financière, nous avons encore frais dans nos mémoires l’impact négatif de la crise financière de 2008 dans certains pays », explique Hassan Boubrik, président de l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS) . Et d’enchaîner : « Nous devons protéger la solvabilité des compagnies d’assurance afin qu’elles puissent faire face à leurs engagements envers les assurés dans leurs différentes opérations que ce soit avec les intermédiaires ou avec les compagnies ».
Il est du devoir du régulateur de promouvoir le développement du marché et de promouvoir l’accès d’une large frange de la population aux services de l’assurance par le biais d’une réglementation favorable, une supervision efficace et souple qui encourage à titre d’exemple l’inclusion financière. Aussi, dans un contexte de plus en plus digitalisé, le régulateur est-il appelé à appréhender de nouveaux modèles de l’assurance. Chaque jour qui passe, il est questionné sur son plan de développement.
Autre défi majeur est la digitalisation. Il est désormais judicieux de mettre en place de nouveaux modèles d’assurance qui découlent de Big Data ou de l’intelligence artificielle.
Dans un contexte pareil, il est également du rôle des compagnies d’assurance de sortir des sentiers battus et faire preuve d’innovation.
Pourquoi les compagnies d’assurances n’innovent-elles pas assez ?
« On n’a eu cesse de le dire : Le taux de pénétration de l’assurance au Maroc reste faible (3,74%). Une faiblesse qui résulte essentiellement d’une offre disponible qui ne répond parfaitement aux besoins des citoyens. C’est dire que les compagnies d’assurance n’innovent pas assez ou le font timidement. En tant que leader sur le marché nous essayons de tirer le marché vers le haut. Nous commercialisons des produits innovants tout en espérant que les autres compagnies nous emboîtent le pas », explique Slimane Echchihab, Directeur Général Délégué de Wafa Assurance.
Questionné sur les ingrédients pour qu’une compagnie d’assurance ait le succès escompté, il ajoute « Il faut un management visionnaire qui anticipe, des administrateurs jouissant de l’expérience et de l’autonomie nécessaires, des qualités de ressources humaines engagées et performantes et un Système d’Information bien développé.
Il faut dire que les compagnies d’assurance foncent les murs et arrêtent de commercialiser juste les produits classiques d’il y a des années parce que tout a changé. Autrement dit, il faut écouter le client et non pas concevoir des produits en les lui imposant ».
Rôle précurseur dans la micro-assurance
« En termes de micro assurance, notre objectif est que les autres compagnies fassent de même. Cela ne peut être que bénéfique pour l’économie en général et pour le secteur des assurances en particulier. Il y a quelques années, à Wafa Assurance, on disait que ce produit ne peut être rentable parce qu’il s’agit de petites primes. Après un test pilote, le management a complètement changé d’avis. Aujourd’hui, on se retrouve avec un ratio combiné de 50% grâce à la mutualisation et à la vente de masse. Dans le monde et même dans des pays africains, l’assurance inclusive est rentable. Pourquoi ? Tout simplement parce que ce sont des produits adaptés aux besoins de la population », conclut Slimane Echchihab.