Budget temps – tarif minimum une oeuvre de l’Ordre des experts-comptables du Maroc qui risque de dérégler l’ascenseur social.
Franc du collier
L’expert –comptable se présente comme étant le garant d’une bonne information financière et le gage de plusieurs opérateurs économiques. Sa mission d’assurance permet de rassurer le marché à mettre à sa disposition une information financière fiable vraie assise de la prise de décision. Dans sa mission, l’expert-comptable, évoluant dans un cadre très normé, est dans l’obligation de dérouler plusieurs diligences avant de se faire une conviction et émettre une opinion. Il est donc amené à affecter un budget temps pour procéder à tous les contrôles et vérifications nécessaires et généralement dictés par les normes professionnelles.
Du nouveau chez les experts-comptables
Conscient de l’intérêt du métier d’expert-comptable, le gouvernement a adopté le code des devoirs professionnels de l’Ordre des experts-comptables. Ce dernier fait référence, entre autres, au budget alloué aux missions d’audit. Juste après la publication dudit code, l’ordre s’est précité pour émettre et rendre applicable une directive traitant du taux horaire moyen minimum. La mise en application de ces deux supports, selon l’instance ordinale, permettra de hisser la qualité des rendus, notamment au niveau des missions conduites dans le secteur public. Il faut avouer que depuis plusieurs années, l’adjudication des marchés d’audit dans ce secteur se fait bon marché. Néanmoins, il ne faut pas omettre qu’un prix élevé ou du moins raisonnable n’a jamais été synonyme de qualité et de sincérité. D’ailleurs, les grands scandales, en matière d’audit, étaient l’œuvre de cabinets très cotés et très bien payés.
Le couple …
Au couple budget-temps et tarif horaire moyen minimum, plusieurs experts-comptables lui ont déroulé le tapis rouge. Mais, il risque de se prendre les pieds dans ce tapis. En effet, son entrée en vigueur permettra sans aucun doute d’exploser les budgets, jusqu’à présent, très limités des entités publiques sujettes à l’audit contractuel ou légal. En cette période de disette, la Direction des Entreprises et des établissements publics ne restera pas désintéressée.
Le clou du spectacle
Ce n’est pas le tarif minimum qui dérange mais c’est plutôt le budget temps qui parait contraignant. En effet, dans plusieurs cas, il peut se révéler hors budget car il est assis sur des paramètres sans aucune corrélation avec le temps à allouer à chaque mission. De même, le budget temps ne tient compte ni de l’expérience de l’auditeur ni de la récurrence de la mission. En effet, ces deux facteurs sont source d’économie du temps. La facturation indûment de temps non servi constituera alors un enrichissement sans cause au détriment du client. Ce dernier est alors en mesure de demander répétition. Et pour cause le marché n’est pas conclu au forfait.
Le travail pour tous
En outre, la mise en application de ce couple devenu mythique donnera, dans le cadre des appels d’offres, naissance à des offres financières identiques. Les cabinets seront alors départagés en recourant à la variable technique. Cette dernière est fonction de l’ancienneté du cabinet, de la qualité de ses équipes et de ses références techniques. Sur ce chapitre, les cabinets à taille humaine ou ceux qui essaient de se faire une place sous le soleil ne verront que du feu. La directive parait alors une mesure limitant l’accès au marché et le libre exercice de la concurrence. Elle débouche alors sur une pratique anticoncurrentielle prohibée par la loi sur la liberté des prix et de la concurrence.
La directive Aspirine
En outre, comment ne pas nuancer la norme budget temps pour le secteur public qui regorge d’outils de contrôles et est soumis à la loupe de plusieurs instances. La notion de risque devant primer dans le travail de l’expert-comptable auditeur doit tenir compte des travaux de contrôle menés par ces instances. La prise en considération de ce facteur réduirait éventuellement les risques et réviserait sans aucun doute le budget temps à allouer à la mission.