Ecrit par Imane Bouhrara |
Les transferts de fonds ou les remises migratoires, ont fait montre dâune rĂ©silience surprenante avec des records mĂȘme, le cas de des transferts MRE, en pleine crise du Covid-19. Sauf que les pays dâorigine nâexplorent pas suffisamment la pleine opportunitĂ© de cette manne. Pis, aujourdâhui, il faut la dĂ©fendre contre des rĂ©glementations internationales qui risquent dâĂȘtre pĂ©nalisantes.
Il nây a pas un rapport de la Banque mondiale sur les remises migratoires qui ne pointe pas du doigt les coĂ»ts de transfert, qui plus est, sont nettement Ă©levĂ©s pour la diaspora africaine comparativement Ă dâautres rĂ©gions du monde.
Il faut croire que cette problĂ©matique revĂȘt une grande importance au plus haut niveau en Afrique, comme en tĂ©moigne la prĂ©sence ce 12 janvier, des principaux protagonistes au Forum de Rabat sur la RĂ©duction des coĂ»ts de transferts de fonds de la Diaspora africaine, co-prĂ©sidĂ© par Nasser Bourita et le ministre des Affaires Ă©trangĂšres, de lâIntĂ©gration RĂ©gionale et des Togolais de lâExtĂ©rieur, Robert Dussey.
Pour le ministre des Affaires étrangÚres, de la Coopération africaine et les MRE, cette initiative pertinente traduit en actes la convergence des approches. Il est dans ce sens fondamental de traduire la volonté politique en politique volontariste et de sortir du plaidoyer pour traiter les questions liées au transfert de fonds de la Diaspora.
Partant de la Vision Royale dâune migration africaine porteuse dâopportunitĂ©s pour lâAfrique et pour ses partenaires, lâon doit sâinterroger dâabord sur ce que lâAfrique peut faire pour la Diaspora avant de demander ce quâelle peut faire, elle, pour lâAfrique, poursuit Nasser Bourita.
Et de rappeler que la Diaspora câest la 6Ăšme rĂ©gion africaine. Vecteur de dĂ©veloppement socio-Ă©conomique avec100 milliards de dollars en 2021 dont 10 milliards de dollars pour le Maroc, elle est un pourvoyeur de fonds et de stabilitĂ© macro-Ă©conomique et une source fiable pour les Ă©conomies africaines.
Sauf que le coĂ»t des transferts de la diaspora africaine est le plus onĂ©reux au monde avec un taux de 8%, qui demeure Ă©levĂ© et source de frustration si on le compare au 6% dâautres rĂ©gions et au 3% fixĂ© par lâObjectif de DĂ©veloppement Durable n°10 des Nations Unies.
« Ce forum vise Ă identifier les pistes qui guideront les travaux du Haut comitĂ© et sera lâoccasion de discuter de questions clĂ©s comme lâapport des nouvelles technologies pour la rĂ©duction des coĂ»ts de transfert ou encore la pertinence du cadre rĂ©glementaire actuel », soutient le ministre marocain.
Et force est de croire que cette problĂ©matique commune, nĂ©cessite une solution commune et concertĂ©e, mais aussi pour identifier les levers dâune meilleure mobilisation de ces fonds vers le dĂ©veloppement la croissance Ă©conomique des pays dâorigine. Â
Dans ce sillage, le co-prĂ©sident du Forum, et ministre des Affaires Ă©trangĂšres, de lâIntĂ©gration RĂ©gionale et des Togolais de lâExtĂ©rieur, Robert Dussey, a soulignĂ© quâau-delĂ de la problĂ©matique de des coĂ»ts de transferts, le Forum planche sur la multiplication des possibilitĂ©s pour les migrants Ă contribuer au financement des projets de dĂ©veloppement dans leurs pays d’origine notamment par l’utilisation des nouveaux instruments pour capter les placements.
« Cette dĂ©marche doit associer Ă©troitement l’institut africain pour les transferts de fonds et faire l’objet d’un plan de communication et d’appel Ă projets innovants (fintech, assurtech, investech…) au sein de la diaspora africaine dans le cadre de la DĂ©cennie des racines et des diasporas africaines », soutient-il.
De mĂȘme quâen rĂ©duisant de maniĂšre substantielle les frais de transfert, d’importantes ressources financiĂšres pourraient ĂȘtre dĂ©gagĂ©es chaque annĂ©e au profit des mĂ©nages les plus vulnĂ©rables et orientĂ©es vers des investissements productifs crĂ©ateurs d’emplois.
Il a encouragĂ© tous les Etats africains Ă tirer davantage profit du potentiel d’investissement que constitue les Africains de l’extĂ©rieur. Il s’agira, entre autres, de crĂ©er un environnement suffisamment incitatif pour les projets de la diaspora africaine. Il faut cependant, pour que les actions aient plus d’impact, de les mettre en cohĂ©rence et en synergie au niveau du continent dans son ensemble.
« La dĂ©cennie (2021-2031) des racines et des diasporas africaines soutenue par le Royaume du Maroc nous semble ĂȘtre le cadre le plus appropriĂ© pour initier et porter ensemble des projets innovants impliquant la diaspora et les afro descendants au service du dĂ©veloppement de l’Afrique. A ce titre, je voudrais vous annoncer l’initiative du Togo d’organiser en 2024 le CongrĂšs Panafricain de LomĂ©, avec pour thĂšme : « renouveau du panafricanisme et place de l’Afrique dans la gouvernance mondiale : mobiliser les ressources et se rĂ©inventer pour agir », conclut-il.
Câest justement de cette gouvernance mondiale que se profile Ă lâhorizon une nouvelle menace, cette fois dâordre rĂ©glementaire, pour les transferts de la diaspora africaine.
Citant lâexemple de lâEurope, Abdellatif Jouahri, Wali de Bank Al-Maghrib a soulignĂ© que les activitĂ©s dâaccompagnement des Marocains du Monde pratiquĂ©es depuis des dĂ©cennies par les banques marocaines en toute transparence et dans le respect des rĂ©glementations locales sont depuis quelques annĂ©es confrontĂ©es Ă un durcissement sans prĂ©cĂ©dent de leurs conditions dâexercice.
« En effet, plusieurs autoritĂ©s bancaires de pays de lâUnion ont dĂ©cidĂ© de suspendre lâactivitĂ© dâintermĂ©diation opĂ©rĂ©e par les filiales bancaires situĂ©es en Europe auprĂšs de la diaspora et pour le compte de leurs maisons mĂšres marocaines. Les conditions de prestation de cette activitĂ© vont davantage se durcir si le projet de directive europĂ©enne relatif notamment aux succursales de pays tiers est votĂ© en lâĂ©tat. Ce projet, dont lâadoption est imminente, prĂ©voit lâinterdiction pour les banques Ă©trangĂšres non Ă©tablies dans lâUE dâoffrir des services bancaires du pays dâorigine directement Ă leurs clients rĂ©sidant dans un pays de lâUnion », explique-t-il.
Il a plaidĂ© dans ce sens, en faveur dâune action diplomatique dâenvergure des pays africaine, pour alerter sur ces dĂ©veloppements prĂ©occupants et Ćuvrer Ă prĂ©server les acquis et Ă maintenir les liens, tout particuliĂšrement des derniĂšres gĂ©nĂ©rations des migrants sur le sol europĂ©en avec la mĂšre patrie.
A ces contraintes, sâajoute la convention de lâOCDE portant sur lâĂ©change dâinformations fiscales dont lâentrĂ©e en vigueur prochaine suscite la grande inquiĂ©tude des Marocains du Monde. Il sera nĂ©cessaire dâĆuvrer, dans lâintĂ©rĂȘt de notre continent et de nos compatriotes, pour que cette norme soit dĂ©ployĂ©e sans entraver les transferts de fonds des migrants, conclut le gouverneur de la Banque centrale.
Ce forum sera sanctionnĂ© de conclusion pour une action commune Ă cette problĂ©matique de coĂ»t de transferts mais aussi des moyens et leviers dâintĂ©grer ces fonds dans les politiques publiques des pays africains et leur crĂ©er le cadre adĂ©quat pour une mise au profit du dĂ©veloppement des pays dâorigine.