Ecrit par I. Bouhrara |
La réponse du Maroc au Covid-19 a été rapide pour lisser ses effets sur l’économie. Mais dans des secteurs comme le tourisme, des filières entières sont menacées de faillite et de saisie à cause de l’accumulation des impayés, les entreprises ayant été à l’arrêt pendant plusieurs mois.
Depuis le déclenchement de la crise sanitaire et sur Hautes Instructions Royales, le Maroc s’est doté d’un Fonds spécial pour la gestion de la pandémie de Coronavirus qui a mobilisé 33,7 milliards de dirhams, dont 10 milliards émanant du budget de l’Etat, le reste provenant de diverses donations.
Une véritable bouée d’oxygène puisque quelque 24,65 milliards de dirhams ont financé des mesures d’appui social et l’achat du matériel médical nécessaire et 5 milliards de dirhams ont été affectés à la relance économique, notamment les crédits garantis par l’Etat pour couvrir le risque de défaut de paiement.
D’autres mesures importantes ont été prises dans le cadre du CVE pour limiter les dégâts de la crise sanitaire sur les ménages et les entreprises, à travers des aides directes aux ménages, des indemnités forfaitaires aux salariés déclarés à la CNSS, le report de certaines cotisations sociales… et des moratoires et reports de crédits aussi bien aux particuliers qu’aux entreprises.
Sauf que certaines mesures n’ont pas pu éviter le pire pour certaines activités totalement à l’arrêt en raison des mesures restrictives liées à la mobilité et de la fermeture des frontières.
Le tourisme en est l’exemple édifiant et au moment où l’on parle de reprise économique, ce secteur voit son écosystème fragilisé par les problèmes où pataugent certaines filières de transport, d’hébergement ou de services.
Pour ne citer que le transport touristique ou la location de voitures, les alertes se multiplient sur le risque de saisie qui plane sur des centaines d’entreprises en raison de leur incapacité à honorer leurs engagements vis-à-vis des établissements de crédit et organismes assimilés.
Les alertes des associations et fédérations professionnelles décrivent une situation chaotique et un climat de tension avec les établissements de crédit et organismes assimilés, particulièrement les sociétés de financement en raison des recouvrements et des saisies.
Ce qui menace les chances de recouvrement de ce secteur locomoteur de l’économie marocaine.
Une situation qui n’échappe pas au Wali de Bank Al-Maghrib, interpellé sur la question lors du point de presse à l’issue du conseil de la Banque centrale ce 13 octobre.
« Sur les moratoires, 527.000 demandes ont été formulées portant sur 124 Mds de DH, dont 73 % ont été régularisées, mais – 9 % ont été déclassées », rappelle Abdellatif Jouahri, alors que d’autres dossiers ont été rééchelonnés.
« Nous poussons les banques à faire preuve de la plus grande souplesse nécessaire et œuvrer, au cas par cas, à faire passer cette étape difficile pour différents secteurs », soutient-il.
Il affirme d’ailleurs avoir reçu ces différentes doléances concernant les créances en souffrance et impayés qui planent sur des centaines d’entreprises et des milliers d’emplois.
« J’ai fait recevoir les représentants de ces fédérations aussi bien au niveau du GPBM que de la Direction de la supervision bancaire à BAM. Dans ces doléances, certaines relèvent du système bancaire mais il y a des demandes qui relèvent plutôt du CVE. L’exemple des intérêts intercalaires. Si les opérateurs ne veulent pas les pays, qui va les prendre en charge. Certainement pas les banques », explique Abdellatif Jouahri.
Il a d’ailleurs annoncé avoir provoqué une réunion qui devra se tenir prochainement avec la participation de toutes les parties prenantes, notamment Bank Al-Maghrib, le GPBM, le Ministère des Finances, et éventuellement la DGI autour d’une même table pour voir les options possibles pour sortir de ce cap difficile.
S’il est recommandé la levée progressive des différentes mesures d’aide pour ne pas briser l’élan de la reprise, pour certaines secteurs et activités, le CVE doit réfléchir à des mesures spécifiques pour les secteurs touchés en profondeur pour avoir souffert de manière plus prolongée que les autres le confinement et les différentes mesures restrictives.
Et une prochaine réunion du CVE est de ce fait très salutaire.