Si le PMV a permis certains exploits au cours des dix dernières années, force est de constater que la performance du secteur agricole est restée modérée, en comparaison avec l’objectif fixé par ledit plan. Voici les appréhensions du HCP.
Dans un contexte en perpétuelle mutation, l’examen de la situation de la production agricole et de ses perspectives d’évolution sur le long terme s’avère indispensable pour apporter un éclairage approfondi sur la capacité de l’offre locale à couvrir les besoins futurs de la consommation et à conforter le développement des exportations.
C’est dans ce cadre que s’inscrit l’étude élaborée par le HCP et publiée dans les brefs du Plan. Il en ressort que le rythme de progression des activités agricoles s’est accéléré au cours des dix dernières années, profitant de la mise en œuvre du Plan Maroc vert et des conditions climatiques particulièrement favorables (une pluviométrie moyenne annuelle de 385 mm, supérieure à une saison normale). La valeur ajoutée du secteur agricole s’est élevée à 124,4 Mds de DH en 2018, contribuant pour 11,5 % au PIB global. En volume, le taux de croissance du secteur agricole s’est amélioré entre 2009 et 2018, atteignant +6,3%, en moyenne par an, au lieu de +2,4% entre 1998 et 2007. Les recettes des exportations des produits agricoles ont affiché une croissance annuelle moyenne de 8,6 % au cours des dix dernières années, passant de 11,4 Mds de DH en 2008 à 27,1 Mds en 2018. La prise en compte des produits agroalimentaires a permis de relever les exportations des produits agricoles (bruts et transformés) à 58,1 Mds de DH en 2018, contribuant pour 13,5% aux exportations de biens.
Quant aux importations des produits agricoles et de la pêche, elles se sont élevées à 40,7 milliards de dirhams en 2018, mais leur rythme d’évolution au cours des dix dernières années a été moins soutenu que celui des exportations, +0,07% en moyenne par an. La contribution des produits agricoles aux importations a ainsi reflué à 4,3% en 2018, au lieu de 6,6 % en 2008. En conséquence, le taux de couverture des importations par les exportations des produits agricoles s’est amélioré significativement en 2018, pour atteindre 61,9%, en moyenne, sur la même période.
Un manque à gagner de 31,7 milliards de dirhams entre 2013 et 2018
Ces réalisations n’empêchent toutefois pas les analystes du HCP d’annoncer que la performance du secteur agricole est restée modérée, en comparaison avec l’objectif fixé par le PMV (un additionnel de 100 milliards de dirhams de richesse créé par le secteur à l’horizon 2020). Ce qui se traduit par un manque à gagner de 31,7 milliards de dirhams entre 2013 et 2018. C’est pour dire que, chiffres à l’appui, malgré l’effort de restructuration et de modernisation de l’agriculture, la poursuite de la volatilité de son taux de croissance et la légère baisse de sa part dans le PIB n’ont pas permis d’entretenir son apport à la croissance économique. A ce titre, il est utile de rappeler que la moyenne de la croissance économique est restée fortement dépendante des aléas climatiques.
La part du secteur dans l’emploi total a également connu une baisse tendancielle, entre 2008 et 2018, passant de 40,9% à 34,1%, alors que la dynamique engendrée par le PMV devait s’accompagner d’une création brute de 125 000 emplois, en moyenne, par an.
L’exercice de scénarisation de l’évolution de la production agricole pour la période 2019-2025, met en relief deux scénarios (tendanciel et SPMV*) et qui confirment la persistance de la dépendance alimentaire du Royaume en matière de produits de base à l’horizon de 2025, en dépit des gains potentiels en termes de création de richesse.
Hors produits à base animale et fruits et légumes, les autres biens alimentaires présenteraient toujours un problème de couverture à l’horizon 2025. Le Maroc continuerait à importer des quantités non négligeables de céréales, et le déficit de la production par rapport à la consommation atteindrait 28% selon le scénario tendanciel et 41% selon le SPMV. La part du blé dans les importations de céréales se maintiendrait à un niveau élevé (63% en moyenne). Le taux de dépendance vis-à-vis des marchés extérieurs atteindrait 43% en moyenne, selon le scénario SPMV.
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Globalement, et pour chacun des deux scénarios examinés par le HCP, les projections de l’offre et de la consommation humaine laissent entrevoir une amélioration de la couverture des besoins alimentaires de la population à l’horizon 2025. La dépendance vis-à-vis des marchés extérieurs devrait se réduire progressivement mais resterait critique pour les céréales, les légumineuses alimentaires, le sucre et l’huile d’olive. Il convient, néanmoins, de noter que la convergence des perspectives de l’évolution de la production des filières agricoles précitées vers un des deux scénarios, notamment celui du PMV, resterait difficile et conditionnée par trois principaux facteurs :
- Une pluviométrie au-dessus de 300 mm par an, répartie favorablement au cours de la campagne agricole ;
- La poursuite des incitations publiques en amont et en aval des filières agricoles (FDA), notamment pour le blé tendre et le sucre, malgré l’importance des coûts budgétaires y afférents. La suppression des subventions dont ils bénéficient pénaliserait l’offre alimentaire du pays en ces produits ;
- L’effort de rattrapage quant aux cibles relatives aux filières sucrière, oléicole et laitière : les projections d’augmentation de la production agricole s’inspirent des prévisions de la stratégie du Plan Maroc vert. Or, la comparaison des réalisations des filières sucrière, oléicole et laitière par rapport à ces prévisions dix ans après le lancement du PMV a révélé un retard relativement important en termes de réalisation des objectifs.
Des efforts considérables sont ainsi nécessaires pour faire converger les performances de ces filières vers leurs sentiers d’évolution prévus par le PMV.
Voir également : [WEBTV] BILAN EXHAUSTIF DU PLAN MAROC VERT AVEC EL MAHDI ARRIFI DG DE L’ADA