L’année 2018 a particulièrement été difficile, peut-être moins éprouvante que 2017, pour les partis politiques, mis au défi de rétablir la confiance et renouer le dialogue avec les citoyens. Le défi aujourd’hui est de chasser la mauvaise perception qui colle à l’action politique. Réhabiliter le champ politique est une condition sine qua non de l’exercice de la démocratie.
Aucun jeu démocratique ne peut se faire sans une action des partis politiques, encore faut-il qu’ils soient crédibles et jouissent de la confiance des citoyens. Or, pendant des années, les Marocains ont commencé petit à petit à déserter la politique. Résultat des courses : Les partis politiques évoluent en vase clos et en déconnexion avec la vie des Marocains. Leur rôle de dynamiser la vie, de stabiliser le régime démocratique et de structurer l’opinion publique a été mis en veilleuse.
On pouvait s’en accommoder si ce ne sont des événements comme le Hirak ou encore les manifestations de Jerada qui ont rappelé les partis politiques à leur responsabilité et au danger d’avoir abandonné leurs fonctions « tribunitienne ». Un rappel aussi des plus sévères était contenu dans le discours du Trône de juillet 2017 : « l’évolution politique du Maroc et ses progrès en matière de développement ne se sont pas répercutés positivement sur l’attitude affichée par les partis, les responsables politiques et les administratifs, au regard des aspirations et des préoccupations réelles des Marocains. En effet, quand le bilan se révèle positif, les partis, la classe politique et les responsables s’empressent d’occuper le devant de la scène pour engranger les bénéfices politiques et médiatiques des acquis réalisés. Mais, quand le bilan est décevant, on se retranche derrière le Palais Royal et on lui en impute la responsabilité. Voilà pourquoi les citoyens se plaignent, auprès du Roi, des administrations et des responsables qui font preuve de procrastination dans le règlement de leurs doléances et le traitement de leurs dossiers. Voilà pourquoi ils sollicitent Son intervention pour mener leurs affaires à bonne fin ».
Une année plus tard, peut-on dire que la leçon ait été retenue ? Pour le politologue Younes Dafkir, il suffit de relever la nuance entre les deux discours du Trône, de 2017 et de 2018.
En effet, « Il est vrai que les partis s’efforcent de s’acquitter au mieux de leur tâche. Néanmoins, il leur faudra attirer de nouvelles élites et inciter les jeunes à s’engager dans l’action politique, les générations d’aujourd’hui étant les mieux placées pour connaître les problèmes et les nécessités de leur époque. Les partis doivent également renouveler leurs méthodes de travail et rénover leurs modes de fonctionnement », lit-on dans le discours du Trône de juillet 2018.
Pour Younes Dafkir, la nuance est grande entre les deux discours : « La différence est que les partis semblent avoir compris la leçon et surtout saisi l’importance de leur rôle dans le jeu démocratique. Le champ politique essaye de retrouver ses marques et l’Etat essaye de soutenir ».
Toujours est-il que des mouvements tel que celui du boycott d’avril 2018 montre que la partie est loin d’être gagnée pour rétablir la confiance des Marocains en la portée de l’action des partis politiques dans le sens de défendre leurs intérêts et de porter leur voix.
Pour Nabil Benabdellah, Secrétaire général du Parti du Progrès et du Socialisme, la tâche est d’autant plus difficile que cette année 2018 « a été marquée par un vent d’inquiétude, une sorte de malaise général qui s’est répandu dans divers milieux du fait d’une perception globalement négative à l’égard du développement de la scène politique, de la scène économique et qui se passe également sur le plan social ; et à partir de là pour notre parti, le Progrès et le Socialisme nous avons considéré qu’il était nécessaire d’insuffler un souffle démocratique nouveau à notre pays pour que nous puissions sortir de cet état et de cette perception négative et pour remobiliser l’ensemble des acteurs nationaux, qu’ils soient acteurs politiques, mais aussi économiques, sociaux et culturels ». Pour lui, le discours du trône est allé dans ce sens et les partis ne peuvent que s’en réjouir. « C’est un discours qui a appelé à une réhabilitation du champ politique, à un rôle accru des acteurs institutionnels en particulier les partis politiques. C’est une manière de rectifier le tir par rapport à la perception générale à l’égard des partis politiques et ce discours a également appelé à la nécessité d’une charge sociale importante au niveau des politiques publiques. C’est ce que nous avons constaté au niveau de la Loi de Finances 2019 récemment votée. Nous espérons que 2019 pourra être, grâce à des mesures économiques et sociales adéquates et grâce à un encadrement politique plus présent, sera plus bénéfique et se déroulera sous de meilleures auspices… », analyse Nabil Benabdellah.
Et de conclure « C’est notre espoir est que cette dynamique puisse se transformer de manière perceptible en 2019 ».
Aujourd’hui au Maroc, particulièrement la jeunesse a trouvé de nouveaux espaces d’expression qu’il faille vraiment innover pour les faire revenir vers l’action politique et partisane et son poids de représentativité des attentes des citoyens. Aussi, ces jeunes ont besoin de trouvé au sein de ces formations politiques des figures auxquelles ils peuvent s’identifier et un discours fluide qu’ils comprennent.
Les partis doivent saisir leur responsabilité envers la communauté et non se concentrer sur des calculs politiciens et comprendre que leur crédibilité est un élément essentiel pour la légitimité du processus démocratique et des institutions. A défaut la méfiance ne fera que croître au détriment de la démocratie.