Bien que le passage en prison soit un épisode qui marque à vie le parcours d’un individu, il ne devrait toutefois pas signifier la fin de la vie professionnelle ni même personnelle du détenu. C’est dans cette optique que s’inscrit la Conférence de consensus sous le thème « La recherche scientifique au service de la préparation à la réinsertion des personnes détenues au Maroc ».
Une rencontre qui s’inscrit dans le cadre du projet de jumelage institutionnel entre le Maroc et l’UE et dont l’objectif est de définir et d’initier des mécanismes susceptibles de permettre aux universités de contribuer au renforcement des capacités institutionnelles de la Direction Générale de l’Administration Pénitentiaire et à la Réinsertion (DGAPR) ainsi qu’à l’amélioration des politiques publiques nationales en matière d’administration pénitentiaire.
Le ministre de l’Education Nationale, de la Formation Professionnelle, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, Saaïd Amzazi, qui a présidé la réunion de démarrage des travaux préparatifs de la Conférence de consensus, a rappelé le devoir sociétal que l’université doit jouer étant donné ses missions de production et de transmission du savoir.
« La fonction de levier de croissance ne doit pas pour autant occulter un autre rôle fondamental de l’université : celui de contribuer à la construction de politiques publiques capables de répondre aux grands défis sociétaux, notamment en révélant et en diagnostiquant des phénomènes complexes, puis en les analysant, dans l’objectif d’orienter ses multiples partenaires publiques dans leurs réflexions et dans leurs actions », a-t-il souligné.
C’est dans ce contexte que s’inscrit la contribution du ministère dans la réinsertion des détenus. A noter que le ministère de l’Education Nationale, de la Formation professionnelle, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique a toujours collaboré avec la Délégation Générale à l’Administration Pénitentiaire et à la Réinsertion.
Chiffres à l’appui, le nombre de détenus inscrits dans différents niveaux de l’enseignement a considérablement augmenté passant de 1.423 détenus en 2009 à 4.544 détenus en 2019. Quant à la formation professionnelle qui constitue une voie prioritaire pour faciliter la réinsertion des détenus, comme précisé par le ministre, le nombre de détenus inscrits dans différentes filières est passé de 4.077 en 2009 à 8.840 en 2019, avec près de 65 centres de FP ouverts dans les centres pénitenciers sous l’impulsion éclairée de SM.
Saaïd Amzazi a toutefois insisté sur l’amélioration de la qualité du mode d’enseignement dans le cadre de l’enseignement général et des apprentissages dans le cadre de la formation professionnelle au sein des établissements pénitentiaires ainsi que celle d’encadrement. Preuve en est, les taux de réussite, surtout au niveau du certificat des études primaires, et du baccalauréat ont connu une nette progression avec un taux de réussite au bac en 2019 chez les candidats détenus de 47%, soit une hausse de 10 % par rapport à 2018.
« Dans le même esprit, un mémorandum a été signé entre le ministère de l’Education nationale, la DGAPR, l’Université Mohammed V de Rabat et la Fondation Mohammed VI pour la réinsertion des détenus pour créer un espace universitaire pénitentiaire à Salé en vue de permettre aux étudiants prisonniers inscrits à l’Université Mohammed V de Rabat, de suivre leurs études universitaires et de communiquer avec leurs enseignants dans les meilleures conditions. Je rappelle qu’au cours de la période 2018-2019, ce sont 842 étudiants prisonniers qui étaient inscrits dans les universités marocaines dans les différents nouveaux LMD », a tenu à préciser le ministre.
Le ministère de l’Education ne compte toutefois pas s’arrêter là. « Les universités marocaines, qui sont sous sa tutelle, disposent d’un vivier d’enseignants chercheurs en Sciences humaines et sociales qui sont déjà nombreux à travailler sur des thématiques de recherches spécifiquement nationales. Ces derniers, en explorant davantage l’univers carcéral, pourraient grandement contribuer à l’élaboration de politiques publiques, notamment celles à caractère social et pénal. C’est d’ailleurs un peu dans cet esprit qu’avait été initié, il y a quelques années, le Master ‘Univers carcéral, prévention et réinsertion’ à la FLSH de Rabat », a souligné Saaïd Amzazi.
Pour cela, plusieurs conventions bilatérales ont été signées entre les universités et la Délégation Générale à l’Administration Pénitentiaire visant, entre autres, la mise en place d’un Consortium pour le développement de la recherche scientifique en matière pénitentiaire.
L’enjeu de cette rencontre et des recommandations qui émaneront sera d’impacter les dispositifs et les politiques mis en œuvre au sein du système pénitentiaire, voire même impacter le fonctionnement de la justice.