Depuis le lancement du Ramed en 2012, les contributions des collectivités locales destinées au financement du régime et qui constituent des dépenses obligatoires, comme prévu par le loi 65-00, n’ont jamais été versées. Qu’est-ce qui explique ce manque à gagner pour un secteur qui souffre de plusieurs maux en raison d’un déficit en financement ?
Contrairement à beaucoup de pays à niveau socioéconomique similaire, le Maroc a fait le choix de généraliser l’accès aux soins à tous les Marocains en se fixant comme objectif la couverture sanitaire universelle. Une volonté qui s’est traduite par le lancement du Ramed en 2012 pour les populations les plus vulnérables et par le lancement du processus de la couverture des indépendants via l’AMO TNS (toujours en cours de discussions). Certes cette couverture a permis à plusieurs Marocains qui n’avaient pas accès au système de santé de jouir d’un droit constitutionnel. Toutefois 7 ans après son lancement, le Ramed continue de souffrir de plusieurs maux structurels notamment d’ordre financier mais aussi de qualité de soins.
Les raisons de ces dysfonctionnements du régime sont surtout liées au montage financier du Ramed, à la complexité de la gestion des droits d’accés…
D’une part parce que le régime a été conçu pour une population de 5 millions de Marocains avec une enveloppe 3 Mds de DH alors qu’aujourd’hui il couvre 13 millions de Marocains avec le même budget voire moins. Et pourtant le principe du tiers-payant adopté pour le financement de ce régime avec une contribution de l’Etat, des collectivités territoriales à hauteur de 6% ainsi que des bénéficiaires avec un ticket de 100 DH était censé remédier à tel frein financier.
Malheureusement, les 13 millions de ramedistes sont pris en charge par le budget du ministère de la Santé qui reste très faible pour répondre aux besoins en santé de plus en plus pressants des Marocains.
Ceci étant pourquoi les collectivités territoriales ne versent-elles toujours pas les 6% du budget alloué au Ramed ? La question a récemment été soulevée suite à la polémique provoquée par le député Omar Balafrej qui avait dénoncé le fait que le Conseil de la ville de Rabat ait utilisé les fonds dédiés au Ramed pour le financement du Festival de la Fête des lumières.
Cette dénonciation a fait réagir l’adjoint du Maire de Rabat Lahcen El Amrani qui a rejeté en bloc les accusations du député de gauche démocratique. Il adosse le non versement des dus des collectivités territoriales pour le financement du Ramed à des contraintes procédurales. Lahcen El Amrani avait déclaré que le Conseil de la ville de Rabat a contacté à plusieurs reprises les autorités concernées à savoir l’ANAM afin de préciser le compte où transférer l’argent. Des requêtes qui « d’après les dires de Lahcen El Amrani » sont restées sans réponses.
C’est d’ailleurs de ce qu’a confirmé récemment Hicham Nejmi, Secrétaire général du ministre, en précisant que les collectivités ne versent toujours pas les 6% de leur budget au financement du Ramed.
Rappelons que la loi 65-00 portant code de la couverture médicale de base a stipulé que les contributions des collectivités locales destinées au financement dudit régime constituent pour ces dernières des dépenses obligatoires conformément à la législation en vigueur.
L’article 126 de la loi 65-00 stipule que ces contributions sont inscrites dans les budgets des dites collectivités. Elles sont fixées annuellement à 40 DH par bénéficiaire en situation de pauvreté.
Ce qui nous amène à nous poser plusieurs questions : Quid de ses dépenses obligatoires que les collectivités territoriales devaient verser au Ramed depuis 2012 soit 7 ans déjà ? Où sont passés les milliards de DH qui devaient contribuer à améliorer les prestations de soins des ramedistes ? Qu’est-ce qui bloque réellement ? Qui est responsable de ce laisser-aller sachant que l’une des principales raisons souvent évoquées en matière de qualité des soins est le financement ?
Mais pas seulement. On se demande également pourquoi l’organisme gestionnaire indépendant du ministère de la Santé et de l’ANAM, qui doit devenir une autorité de régulation des deux régimes (AMO et Ramed) n’a-t-il pas encore vu le jour ?
Hicham Nejmi nous a assurés que la loi 65-00 en cours de révision permettra de pallier les dysfonctionnements dont souffre notre système de santé en insistant sur la nécessité d’opérer non pas une réforme mais carrément une refonte du système. A bon entendeur !
Autant de questions qui remettent sur la table une question fondamentale celle de la gouvernance de notre système de santé, de sa pérennité et de sa capacité à répondre aux besoins fondamentaux de soins des Marocains.