Ecrit par Imane Bouhrara |
Le renforcement de la sécurité médicamenteuse s’est imposé comme impératif suite à la crise du Covid-19. Dans ce sens, le ministre de la Santé et la Protection sociale, Khalid Aït Taleb, a tenu une réunion dans ce sens avec la FNST. Mais à l’heure où l’on prône une approche participative et une action commune, d’autres acteurs concernés se sentent exclus. Détails.
La pandémie du Covid-19 a dévoilé l’importance d’avoir une souveraineté médicale et vaccinale. La perturbation des chaînes mondiales d’approvisionnement a en effet impacté la distribution des médicaments et traitements mettant en danger la vie de millions de gens, particulièrement en Afrique où l’industrie pharmaceutique est peu développée si l’on exclut un club très fermé de pays africains dont le Maroc fait partie.
Mais aussi l’accès inéquitable au vaccin qui a accentué la prise de conscience de l’enjeu de concourir à une autonomie ou souveraineté vaccinale.
Il faut dire que bien avant la crise, le Roi Mohammed VI dans son discours prononcé devant les participants de la Journée Mondiale de la Santé pour l’année 2019, a souligné l’importance de « l’adoption d’une politique médicamenteuse pertinente, visant à garantir l’accès aux médicaments élémentaires dont dépendent les programmes prioritaires de santé publique, et l’encouragement de la production locale de médicaments génériques et de matériel médical de qualité, dans l’optique d’atteindre la souveraineté médicamenteuse ».
Face à la crise sanitaire, le Maroc sous impulsion royale, a dévoilé le 7 juillet dernier son projet, fruit d’un partenariat public-privé, qui vise à démarrer à court terme avec une capacité de production de 5 millions de doses de vaccin anti-Covid19 par mois, avant de démultiplier progressivement cette capacité à moyen terme. Il mobilisera un investissement global de l’ordre de 500 millions de dollars.
Sur un autre plan, le ministère de la tutelle avait pour tâcher d’entamer la réflexion pour une nouvelle politique pharmaceutique nationale 2021-2025. Dans la foulée, et dans l’optique de renforcer la sécurité médicamenteuse, le ministre a organisé une séance de travail le 22 novembre au terme de laquelle il a scellé partenariat avec la Fédération nationale de la Santé.
Il n’en pas fallu moins pour susciter une levée de bouclier, d’ailleurs, la Confédération des syndicats pharmaciens du Maroc (CSPM) a démenti le contenu du communiqué du ministère qui souligne la présence des représentants des pharmaciens à cette séance de travail.
Dans un communiqué datant du 24 novembre, la CSPM assure que le ministre n’a jamais reçu ni les représentants de la confédération ni d’aucun représentant professionnel des pharmaciens depuis sa nomination dans l’ancien exécutif à ce jour, soit depuis plus de deux ans.
La confédération a annoncé son refus catégorique de principe de discuter du secteur du médicament et de la pharmacie avec la Fédération nationale de la santé, qu’elle qualifie de la « fédération de l’administration n’ayant aucune légitimité de représenter les pharmaciens ni de parler en leur nom ». Elle s’interroge d’ailleurs sur la démarche du ministre dans ce sens et des politiques sectorielles qu’il souhaite mener en l’absence des représentants du secteur.
La CSPM a annoncé son refus catégorique de toute recommandation émanant de la future politique pharmaceutique nationale, ni y adhérer ou la mettre en œuvre si les pharmaciens demeurent exclus de son élaboration.
Par ailleurs, la confédération a appelé le Chef de gouvernement à la création d’un ministère dédié au médicament et à la pharmacie comme l’ont fait certains pays, « pour préserver ce secteur vital et stratégique et le mettre à niveau à travers la mise en œuvre des réformes suspendues depuis des années ».
Pour Dr Mohamed Lahbabi, Président de la CSPM, « on ne peut évoquer la sécurité médicamenteuse sans pharmaciens ». Selon lui, les pharmaciens ne sont pas les seuls absents du débat puisque ce secteur et sa politique concernent également d’autres acteurs tels que les chirurgiens-dentistes, les médecins généralistes, les kinésithérapeutes… et d’autres disciplines en première ligne.
Si l’on admet que la politique du médicament et le renforcement de la sécurité médicamenteuse sont menés dans le cadre d’une stratégie plus globale de santé publique, il est donc tout à fait normal que d’autres acteurs de l’écosystème se sentent tout autant concernés par les discussions en cours, qu’ils peuvent par ailleurs enrichir et compléter pour en assurer la pertinence et l’efficacité.
D’autres séances de travail seraient-elles prévues avec d’autres acteurs ? C’est toute la question qui demeure posée.