La publication des délais de paiement par les EEP pourrait être une aubaine pour l’économie nationale qui se trouve paralysée par un tissu d’entreprises très fragile. Toutefois, certains délais de paiement publiés frôlent l’irréel.
Le 31 octobre 2019, le ministre des finances a honoré ses engagements en publiant les délais de paiement déclarés par les Entreprises et Etablissements Publics (EEP). Comme expliqué à plusieurs reprises, une telle action s’inscrit dans le cadre de l’implémentation des orientations royales adressées aux administrations publiques et aux collectivités territoriales pour qu’elles s’acquittent de leur dû aux entreprises. Bien qu’elle ne soit pas à elle seule responsable de la situation d’asphyxie dans laquelle se trouve une partie importante du tissu économique, la problématique des délais de paiement constitue un sérieux handicap qui parfois se traduit par des faillites en cascade.
Toutefois, la publication du 31 octobre des délais de paiement de certains EEP interpelle dans la mesure où certains établissements affichent des délais de 2, 3 ou 4 jours pour ne citer que la Société Marocaine d’Ingénierie Touristique ou la Caisse Centrale de Garantie.
Or, dans le décret n°2-16-344 fixant les délais de paiement et les intérêts moratoires, l’ordonnancement des dépenses relatives aux commandes publiques doivent avoir lieu dans un délai maximum de 45 jours, à compter de la date de la constatation du service fait et après présentation à l’ordonnateur ou au sous-ordonnateur de toutes les pièces justificatives dont la production est mise à charge du titulaire de la commande publique. C’est pour dire qu’un délai de 45 jours compte à partir de la constatation du service fait.
Autre article important dans le texte de loi est : le délai de 15 jours imparti au comptable public ou à la personne chargée du paiement reprend à partir de la date de la réception des ordonnances ou mandats de paiement régularisés par l’ordonnateur ou le sous-ordonnateur.
Il s’ensuit que l’ordonnateur et le comptable public disposent d’un délai consolidé maximum de 60 jours.
A noter que la réalisation des délais de paiement publiés par certains EEP est pratiquement impossible dans la mesure où après la constatation de service fait, l’ordonnateur est tenu de réunir toutes les pièces justifiant le paiement prévu par l’arrêté du ministre des finances n° 3026-14 du 5 hija 1435 (30 septembre 2014) fixant la nomenclature des pièces justificatives du paiement des dépenses desdits établissements publics. De son côté, le comptable public est tenu de s’assurer de la régularité de la dépense, de son imputation, de la disponibilité des crédits et de l’identité du bénéficiaire du paiement.
Il est donc inconcevable de prétendre la réalisation des délais record publiés sauf erreur dans le modèle d’évaluation desdits délais de paiement. Le modèle de calcul des délais de paiement suscite ainsi des interrogations.
Assurément, l’idéal serait de ne pas dépasser le délai cité ci-dessus soit 60 jours pour éviter les intérêts moratoires, mais cela n’empêche que l’Etablissement public ne doit non plus payer dans des délais aussi courts au risque de perdre les intérêts qu’il pourrait encaisser auprès du Trésor parce que les comptes des EEP sont généralement rémunérés. Autrement dit, l’établissement public en question devra agir en bon père de famille dans la gestion des fonds publics.