Faire évoluer la fiscalité d’une simple technique administrative vers son véritable rôle d’outil de gestion et d’orientation de l’économie nationale, c’est le difficile exercice auquel se prêteront les 3èmes Assises sur la fiscalité. Equité fiscale, rentabilité et équité de l’impôt, TVA, IS, IR… Le point avec Abdelaziz Arji, le Président de la Commission juridique et fiscale de la CFCIM.
EcoActu.ma : Les 3èmes assises sur la fiscalité se veulent un moment fort pour la communauté des affaires. En tant que président de la commission fiscale au sein de la CFCIM, quelle appréciation faites-vous de la note de cadrage dans sa globalité ?
Abdelaziz Arji : C’est une vision ambitieuse et participative. On perçoit la volonté de la Direction des impôts d’anticiper les décisions en associant ses partenaires à la réflexion.
La note de cadrage retient 15 thématiques qui seront débattues. Ces thématiques répondent-elles aux besoins des opérateurs et des particuliers ?
Les 15 thématiques tentent en effet d’établir un équilibre entre les aspirations des entreprises et celles des particuliers.
Pour les premiers, elle promet de faire de la fiscalité un levier pour la croissance. Pour les seconds, elle préconise l’élargissement de l’assiette fiscale et la taxation plus du capital et moins du travail.
Jusqu’à quel degré convergent-elles vers l’équité, le socle des prochaines assises ?
L’équité est perçue dans chacun des points préconisés. Toutefois, l’Administration aura à résoudre l’équation difficile qui consiste à arbitrer entre la rentabilité et l’équité de l’impôt.
Le législateur doit absolument consacrer le principe de capacité contributive comme moyen d’équité fiscale. Ainsi, chaque contribuable se doit de contribuer au budget de la nation à hauteur de sa capacité contributive et non en fonction de sa capacité à consommer du service public.
Pour ce faire, on doit distinguer :
L’équité horizontale : traiter de la même manière tous les citoyens se trouvant dans une même situation. On prend en considération à cet effet certains Critères autres que le revenu. Ex : situation familiale. La situation géographique
Équité verticale : elle consiste à répartir l’impôt entre les contribuables ayant des revenus différents. On doit pour ce faire privilégier la progressivité de l’impôt pour chaque catégorie de revenu, de sorte à taxer faiblement les bas revenus.
L’impôt sur le revenu est certes progressif, mais les tranches sont tellement basses que les couches les moyennes subissent une imposition aussi lourde que les hauts revenus.
Entre autres thématiques qui feront l’objet de débat, la neutralité de la TVA dont souffrent certains opérateurs qui subissent de plein fouet cet impôt et ce bien qu’ils soient des intermédiaires. D’après-vous l’atteinte d’un tel objectif est-elle réalisable dans un contexte empreint d’une hausse du coût de la vie ?
Des mécanismes sont à imaginer par le législateur pour éviter d’accumuler des crédits de TVA que l’État peine à rembourser. Je préconise par exemple pour les opérateurs qui ont un butoir comme les exportateurs, de leur permettre d’acheter les biens et services sans TVA pour ne pas devoir en demander le remboursement.
Un comité scientifique sera constitué pour veiller au bon déroulement des assises et atteindre l’objectif de l’équité. Outre les fiscalistes, ce comité ne doit-il pas comprendre en son sein des professeurs universitaires de Droit public et de droit constitutionnel si l’on prend en considération que l’équité est dictée dans le droit constitutionnel et par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme ?
En effet, la fiscalité n’est pas une simple technique administrative. C’est un outil de gestion et d’orientation de l’économie nationale. Les mesures fiscales ont des conséquences économiques, sociales, environnementales…
Par conséquent, la politique fiscale doit être pensée par économistes, des juristes, des philosophes, des politiques et bien entendu des techniciens que sont les fiscalistes.
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2 Commentaires
La politique fiscale doit aussi être PENSÉE par les concernés commerçants et leurs représentativités surtout le commerce du quartier qui représente 68% du tissage économique les professeurs ou philosophes sont loin de la réalité sur le terrain
Merci Monsieur Mohamed Chahid de votre commentaire. Effectivement, toute politique ne peut aboutir et porter ses fruits sans concertation avec les plus concernés et prendre en considération leurs doléances et remarques. Bien cordialement.