L’ACAPS a effectué une mission de contrôle sur place de la Mutuelle Générale du Personnel des Administrations Publiques (MGPAP) au titre des exercices 2013 à 2018. La mission assurée par la Brigade de contrôle relevant de l’ACAPS a donné lieu à un rapport de 104 pages dont Ecoactu.ma détient une copie.
D’abord, la mission a relevé l’insuffisance de réactivité de la MGPAP aux demandes et requêtes formulées par la brigade.
Parmi les premières remarques soulevées dans ce rapport est que le poste de Trésorier a connu une certaine instabilité. A cet effet, quand le Trésorier manifeste une réticence par rapport à une dépense donnée, il est remplacé par son premier ou second adjoint. Le cas le plus éloquent dans ce cadre était la signature de l’ordre de virement n°1014/2014, d’un montant de 120.840 DH par le deuxième trésorier adjoint suite au refus de le signer par le trésorier en raison du non respect des termes de la convention pluriannuelle liant les Mutuelles à la CNOPS.
Concernant le cadre organisationnel, la Brigade a relevé qu’aucune fiche de poste ne lui a été communiquée. Or en l’absence de ces fiches, l’organigramme de la MGPAP ne constitue qu’un simple schéma de structures ne permettant pas la délimitation des responsabilités des différentes entités administratives.
Autre exemple, dans son appréciation du dispositif de contrôle interne, la Brigade a soulevé entre autres insuffisances que malgré l’entrée en vigueur en 2008 du plan comptable des sociétés mutualistes, la MGPAP n’a pas procédé à l’actualisation de son manuel de procédure comptable. D’ailleurs, le rapport souligne le refus de certification des comptes des exercices 2013 à 2017 par le commissaire aux comptes.
Par ailleurs, le processus des achats est exclusivement manuel et l’expression des besoins n’est pas toujours formalisée. Ainsi le risque qu’une prestation réceptionnée sans que le besoin soit exprimé est élevé, lit-on dans le rapport.
Pis, face au relâchement constaté dans le classement et l’archivage de documents importants, le rapport dévoile l’égarement des dossiers de maladie constituant la preuve d’un détournement de fonds intercepté par l’inspection générale de la mutuelle. « Cette situation démontre de graves insuffisances au niveau de la gestion des dossiers de maladie et expose la Mutuelle au risque de poursuite en justice par la CNOPS ».
Venons-en à l’exécution de la dépense. Selon les données communiquées par les responsables de la MGPAP à la brigade, la Mutuelle a passé 68 marchés sur la période 2013-2017. Sur l’analyse d’un échantillon de 16 marchés, la Brigade de contrôle de l’ACAPS constate le recours presque systématique à la signature des ordres de paiement par le Vice-président (1ème ou 2éme) et le trésorier adjoint (1er ou 2ème) en l’absence de tout formalisme fixant l’ordre, les conditions et modalités de cette suppléance.
On note également que certains marchés sont reconduits par des bons de commandes. « Nous citons à titre d’exemple le marché n°10/MGPAP/2013 relatif à l’exécution des prestations d’accueil et le marché n°19/MGPAP/2013 relatif aux prestations de gardiennage. Les montants de certains marchés reconduits dépassent de loin le seuil du bon de commande prévu par le règlement de passation des marché de la MGPAP en vigueur, soit 250.000 DH ».
Le rapport révèle à ce titre, qu’un appel d’offre dont le coût moyen annuel dépasse 1,5 MDH a été reconduit, avec le même prestataire sans aucun appel à la concurrence, après trois ans de prestations.
Aussi, la passation des marchés se fait en infraction aux termes de la convention pluriannuelle passée entre la CNOPS et les Mutuelles, notamment le marché de sous-traitance de la prestation de réception et de traçabilité des dossiers de maladie, déléguées par la CNOPS à la MGPAP. « L’objet de ce marché est déguisé en le recrutement d’hôtesses d’accueil qualifiées, où nulle part n’est indiqué que ces hôtesses sont chargées de la traçabilité des dossiers de maladie … Cette prestation pourrait être considérée comme une masse salariale déguisée d’une vingtaine de personnes dont le coût moyen annuel dépasse 1,5 MDH ». Dans le même sillage le rapport souligne que le Trésorier a refusé la signature du deuxième ordre de virement dudit marché suite à des doutes sur le respect des termes de la convention pluriannuelle.
Plus loin dans le rapport, on apprend que la MGPAP a passé en 2013 un marché dont le montant dépasse 5 MDH et en 2015, un marché négocié dont le montant dépasse 1 MDH. Conformément au règlement de passation des marchés, ces deux marchés doivent obligatoirement faire l’objet d’un rapport d’audit et de contrôle adressé au Président de la Mutuelle. A cet égard, aucun rapport n’a été présenté à la Brigade de l’ACAPS malgré les multiples relances.
Le rapport détaille l’analyse de certains marchés ayant relevé plusieurs infractions. De même pour la dépense par voie de bons de commande. Dans ce sens, le rapport relève entre autres remarques, le recours à des bons de commande de régularisation. « Certains bons de commande ont servi à régulariser des dépenses exécutées antérieurement ».
Par ailleurs, la liste des dépenses exécutées par contrats et conventions communiquées à la brigade de contrôle n’est pas exhaustive. Ainsi, la brigade a pris connaissance de l’existence de contrats et de conventions qui ne lui ont pas été déclarés et dont l’existence n’a été dévoilée qu’à travers l’examen des documents comptables.
Plusieurs anomalies et écarts sont soulignés concernant le produit Achamil.
Le rapport révèle également le train de vie de la MGPAP. Ainsi l’organisation des assemblées générales lors des exercices 2013 à 2018 a coûté à la mutuelle près de 18 MDH. Le rapport conclut au versement, par des moyens frauduleux, d’indemnités aux délégués à l’occasion de l’organisation ce ces assemblées ou des Team Building.
De même que l’importance des dépenses liées aux déplacements des administrateurs et des réceptions : plus de 3 MDH pour les premiers et près de 5 MDH pour les deuxièmes.
Le rapport s’est attardé également sur l’analyse de la situation financière des œuvres sociales marquée par un déficit chronique, à la gestion de la caisse complémentaire de décès relevant plusieurs irrégularités, l’appréciation de la convention pluriannuelle avec la CNOPS relevant l’autorisation à des tiers l’accès aux données personnelles des assurés de la CNOPS.
L’appréciation de la gestion des ressources humaines au sein de la MGPAP révèle le maintien de certains employés au-delà de l’âge légal de départ à la retraire sans autorisation préalable, ou encore le non respect des dispositions du statut du personnel de la MGPAP ou encore un faux taux de rotation.
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