Quand plus de 5.000 commerçants grossistes versent moins de 5.000 DH d’IS ou d’IR, que 62 % des 16.000 médecins paient moins de 10.000 DH d’IR par an, alors que 75% de l’IR est acquitté par les salariés et employés, dire que le système fiscal est inéquitable est d’une évidence. C’est d’ailleurs en dressant un tableau des dysfonctionnements du régime actuellement et en soulevant les limites dans l’exécution des deux précédentes Assises de la fiscalité, que le parti du Progrès et du Socialisme entame sa contribution à ces troisièmes assises. C’est justement ce caractère injuste et peu productif du régime actuel que les mesures proposées par le PPS tentent de rectifier. Notamment l’élargissement de l’assiette fiscale (lutte contre l’évasion et la fraude fiscales en plus de l’inclusion fiscale du secteur informel), la rationalisation des dépenses fiscales selon des critères transparents et démocratiquement élaborés, l’instauration de plus de justice fiscale et d’équité fiscales, l’encouragement de l’épargne productive et de l’investissement créateur de richesses et d’emplois, la simplification des taux et des procédures, le renforcement de la souveraineté fiscale du Royaume.
Aussi, le PPS propose-t-il d’aligner progressivement les taux d’imposition des revenus non salariaux sur ceux des revenus salariaux et de supprimer les systèmes de retenue à la source libératoires à taux réduits.
Concernant l’IR, le PPS propose de revoir le barème en relevant le seuil de la première tranche d’imposition à 45.000 DH annuellement, en allégeant les taux des tranches intermédiaires, en augmentant ceux des tranches élevées et en créant un taux marginal de 50% pour les très hauts revenus (supérieurs à 2 MDH par an). D’ailleurs le PPS propose l’accélération de la mise en œuvre du système d’imposition graduelle des revenus agricoles et à l’application du seuil d’imposition de 5 MDH de chiffre d’affaires annuel à l’ensemble des exploitations appartenant au même groupe ou relevant du même centre de décision.
On appelle également à introduire dans la fiscalité des entreprises des dispositions de soutien à l’investissement et à la croissance économique: barème progressif de l’impôt sur les sociétés avec un premier seuil à 5% et un taux marginal de 25%, provisions réglementées, exonération des plus-values à long terme, exonération totale dans un premier temps puis partielle après les 5 premières années d’activité des profits réinvestis, amortissements accélérés
Pour encourager l’épargne, le PPS préconise la mise en place d’un dispositif fiscal très incitatif pour les plans d’épargne salariale et les plans d’épargne en actions et réorienter massivement le régime fiscal de l’assurance-vie vers l’épargne longue investie en actions (à coupler avec les fonds de pension). De même qu’on prêche l’introduction de la fiscalité écologique pour accompagner la transition écologique et mettre en œuvre les engagements internationaux pris par notre pays au niveau de la lutte contre le réchauffement climatique. Faire de la fiscalité le fer de lance d’une politique écologique ambitieuse et volontariste préservant les ressources du pays et protégeant les intérêts des futures générations.
Pas de réforme sans inclusion de l’informel
A l’instar d’autres propositions formulées par différents acteurs de la scène publique marocaine, le PPS appelle à faire de l’inclusion de l’économie informelle (2,4 millions de personnes employées pour près de 410 MMDH de chiffre d’affaires, selon le HCP) et de la lutte contre l’évasion et la fraude fiscales, une priorité absolue : cartographier la fraude au niveau géographique et sectoriel, élaborer une monographie fiscale des techniques de fuite devant l’impôt, renforcer les moyens et les effectifs des services du contrôle fiscal et augmenter les objectifs de recouvrement (10,8 MMDH recouvrés en 2015 suite au contrôle fiscal sur place et sur pièces pour un total de 206 MMDH de recettes fiscales soit 5% environ) , mettre en place un plan de lutte ambitieux contre l’économie souterraine, les fausses factures, les ventes sans facture, les déductions abusives, les pratiques de fraude internationale liées aux prix de transfert et aux sociétés offshore domiciliées dans les paradis fiscaux ou bancaires, procéder à un ciblage plus pertinent des contribuables «à risque», qui feront l’objet d’un contrôle fiscal plus méthodique et plus récurrent.
Sur un autre registre, la réflexion, en coordination avec les instances internationales, doit être menée au sujet de l’introduction d’une fiscalité sur le commerce électronique appelé à prendre plus d’importance à l‘avenir, estime le PPS.
L’une des mesures proposées consiste en l’élaboration d’une loi sur les signes extérieurs de la richesse pour dissuader les fraudeurs et ceux qui ont recours aux techniques astucieuses et frauduleuses de l’optimisation fiscale et l’instauration d’un taux de TVA majoré sur les produits dits de luxe en veillant, bien entendu, à en exclure tous ceux qui pourraient favoriser une activité de contrebande. Dans le même ordre d’idée, l’on suggère d’instaurer une fiscalité sur le patrimoine et un impôt sur la fortune.
Sur une vingtaine de propositions du PPS, le parti appelle également à résoudre définitivement la question du boutoir et respecter les règles de la neutralité de la TVA.
Et à l’instar d’autres partis, il appelle à ce que les contribuables puissent bénéficier de crédits d’impôts pour les frais de santé et de scolarité.
Actualité oblige avec le chantier de la régionalisation avancée, le PPS préconise l’élargissement du champ d’application de la fiscalité locale en identifiant de nouvelles sources de revenus (taxe sur l’électricité, redevance sur les déchets, versement transports, la révision du taux de la taxe sur les terrains non bâtis, etc.), al modernisation des impôts locaux et rendre leur assiette plus dynamique et plus en phase avec l’évolution du PIB et le développement de la régionalisation.
Dans le cadre de la relation avec l’administration et dabs la perspective de renforcer les droits des contribuables, le PPS suggère de simplifier les procédures administratives relatives à la déclaration, au recouvrement et au contrôle de l’impôt, fusionner les services de la DGI et de la TGR et créer des guichets fiscaux uniques, revaloriser le statut des vérificateurs, nommer des médiateurs fiscaux régionaux, renforcer la charge de la preuve incombant au fisc, publier la jurisprudence de la Commission nationale du recours fiscal ….
Aussi, est-il proposer d’élaborer un rapport annuel sur les recettes fiscales qui sera porté à la connaissance de SM le Roi et, le cas échéant, fera l’objet d’un débat au parlement.
« Nous émettons l’espoir de voir les prochaines assises fiscales déboucher sur une nouvelle ère marquée par l’instauration de relations de confiance entre l’administration des impôts et les contribuables. L’amélioration du climat de confiance entre l’administration fiscale et l’administration des impôts passe nécessairement parle respect de la légalité, une plus grande transparence et une meilleure lisibilité des règles », espèrent les auteurs du livrable.
Ils soulignent par ailleurs que l’interprétation des textes et des lois fiscales ne peut être de la seule compétence de la Direction Générale des Impôts ou de l’administration en général. Les relations entre les contribuables et l’administration doivent être de nature institutionnelle entre partenaires égaux en droits et obligations. D’où la nécessité de créer une entité indépendante, instance de médiation fiscale seule à même de trancher sur les contentieux fiscaux.