Adopté en conseil des ministres le 28 juin 2021, le projet de loi-cadre n° 69-19 portant réforme fiscale apporte plusieurs nouvelles mesures visant à mettre fin à l’iniquité fiscale dans notre pays. Mohammed Réda Lahmini, Expert-comptable, Commissaire aux comptes et Associé du Cabinet Fidaroc Grant Thornton rend compte dans une note synthétique des principales mesures proposées par le projet de loi-cadre.
En application des dispositions de deuxième alinéa de l’Article 71 de la constitution, la loi-cadre n°69-19 détermine les objectifs fondamentaux de la politique fiscale de l’Etat, les modalités de leur mise en œuvre ainsi les conditions nécessaires permettant à l’Etat de mettre en place une politique fiscale juste, équitable, cohérente, efficace et transparente.
Dans le cadre de la mise en œuvre de sa politique fiscale, l’Etat s’est fixé des priorités majeures à tenir en compte, notamment : l’incitation à l’investissement productif, la création de valeur ajoutée et d’emploi de qualité ; la réduction des inégalités ; le développement territorial et la consolidation de la justice spatiale ; la consolidation de la confiance partagée entre l’Administration Fiscale et les contribuables en renforçant son efficacité et son efficience et l’ouverture sur les bonnes pratiques fiscales internationales.
Objectifs fondamentaux à atteindre
L’Etat a défini un nombre d’objectifs fondamentaux à réaliser et à atteindre dans le cadre de la réforme fiscale envisagée :
- le renforcement de la contribution de la fiscalité de l’Etat et des collectivités territoriales dans le financement des politiques de développement économique et social ;
- la baisse de la pression fiscale sur les contribuables au fur et à mesure de l’élargissement de l’assiette ;
- la consécration du principe de la neutralité fiscale en matière de TVA ;
- la convergence des dispositions fiscales avec les règles générales de droit et les règles comptables en vigueur ; la convergence des régimes préférentiels avec les normes et standards internationaux et les bonnes pratiques en matière fiscale ;
- l’incitation des entreprises en vue de consolider leur compétitivité au niveau national et international ;
- la mobilisation de l’épargne et son orientation vers les secteurs productifs ;
- la mise en œuvre progressive du principe de l’imposition du revenu global des personnes physiques;
- La rationalisation des incitations fiscales en fonction de leur impact socio-économique et au regard des priorités prévues par la loi-cadre ;
- la simplification et la rationalisation des taxes es collectivités territoriales ;
- la convergence des règle de la fiscalité des collectivités territoriales et leur harmonisation avec les règles régissant la fiscalité de l’Etat, et le regroupement des taxes portant sur des activités économiques et celles portant sur le patrimoine immobilier ;
- la simplification et l’adaptation du régime fiscal applicables aux activités de proximité génératrices de revenus modestes ;
- l’intégration du secteur informel dans l’économie structurée ;
- le renforcement des dispositifs de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales ;
Mécanismes et modalités de mise en œuvre
La mise en œuvre des objectifs et des mesures prioritaires, sera déployé via les mécanismes suivants :
- Consécration de la neutralité fiscale, notamment en matière de TVA, à travers: l’élargissement du champ d’application ; la réduction du nombre de taux ; la généralisation du droit au remboursement. • Convergence vers un taux unifié en matière d’IS ;
- Baisse progressive de la cotisation minimale ;
- Mise en place d’avantages fiscaux pour les « start-up », « incubateurs » et « agrégateur d’auto-entrepreneur » ;
- Elargissement de l’assiette de l’IR et réaménagement du barème ;
- Amélioration de la CPU pour favoriser l’intégration du secteur informel ;
- Mise en conformité avec les règles de bonne gouvernance en matière de fiscalité internationale en vertu des accords conventionnels.
- Institution d’un régime fiscal approprié favorisant la restructuration des groupes d’entreprise afin d’améliorer leur compétitivité et gouvernance.
- Prévoir des mesures fiscales adaptées pour le développement du secteur culturel ; la promotion de l’économie sociale et la protection de l’environnement à travers notamment l’instauration d’une taxe carbone.
- Rationalisation des incitations fiscales en les accordant uniquement selon les critères fixés par la loi et en étudiant au préalable leurs impacts afin de les maintenir, réviser ou supprimer selon le cas.
- Refonte des règles relatives à la fiscalité territoriale à travers les mesures législatives suivantes : rationalisation et clarification des taux d’imposition ; simplification de la fiscalité pour assurer des ressources pérennes ;
- Intégrer le secteur informel à l’économie structurée à travers : la mise en place d’un régime fiscal simplifié et accessible ; l’élaboration et la mise en œuvre d’un programme de sensibilisation et d’accompagnement ;
- Mise en place de mesures de lutte contre la fraude et l’évasion fiscale.
Amélioration de la bonne gouvernance
Ediction de mesures en vue d’encadrer le pouvoir de l’administration fiscale concernant la fixation et la rectification des bases imposables.
Amélioration de la qualité des services de l’administration fiscale à travers : la poursuite du processus de modernisation et digitalisation ; Le renforcement des ressources humaines ; le développement de la coopération avec les partenaires de l’administration fiscale ;
- Consolidation de la relation de confiance entre l’administration fiscale et les contribuables à travers: la clarification et l’amélioration de lisibilité des textes fiscaux ; la valorisation des missions des instances de recours fiscal ; le renforcement de l’assistance et du conseil aux contribuables ; l’amélioration des moyens de communication et d’information en vue d’inciter les contribuables à s’acquitter spontanément de leurs obligations fiscales ; l’intégration des valeurs du civisme fiscal dans le système national d’éducation et de formation.
- Mise en place d’un observatoire de la fiscalité qui procédera à une évaluation périodique de l’impact socio-économique direct et indirect des mesures fiscales et veillera à la préservation de l’équilibre des finances publiques.
Date d’effet de la loi-cadre
L’Etat s’engage à :
- Edicter les textes nécessaires pour la mise en œuvre des mesures prévues dans un délai de 5 ans à compter de la date d’entrée en vigueur de la loi cadre.
- Edicter, à compter de ladite date, les textes nécessaires pour la mise en œuvre des autres mesures prévues par la loi-cadre, de manière progressive.