Ecrit Lamiae Boumahrou |
La généralisation de l’AMO devrait entraîner une augmentation de la consommation des médicaments qui sera multipliée par 3. Une économie d’échelle pour les industriels qui devrait se répercuter sur le prix du médicament. L’ANAM aurait réuni les industriels pharmaceutiques pour en discuter du projet d’assainissement du Guide des médicaments remboursés (GMR).
La généralisation de l’assurance maladie obligatoire dans le cadre du chantier de la généralisation de la couverture sociale lancé par le Maroc en 2021 va révolutionner le système de santé marocain. Grâce à ce projet, 22 millions de Marocains, qui étaient hors système, vont pouvoir accéder à un droit élémentaire celui de l’accès aux soins. Et qui dit accès aux soins dit augmentation de la consommation du médicament. « Le médicament doit être un élément central de la couverture médicale », nous avait affirmés le ministre de la Santé, Khalid Ait Taleb.
Cela devrait renverser la tendance de la consommation du médicament au Maroc qui ne dépasse pas 450 DH par habitant par an. A rappeler que le Maroc est bien loin de l’Europe ou encore des Etats-Unis.
« La comparaison avec d’autres pays montre que la consommation marocaine du médicament reste très faible. Ainsi, la consommation moyenne annuelle des médicaments aux Etats-Unis d’Amérique est de près de 576 euros et des pays européens est de 248 euros par habitant. En volume, la consommation a enregistré en 2019 près de 354 millions de boites de médicaments », lit-on dans l’avis du Conseil de la Concurrence sur la situation de la concurrence dans le marché des médicaments au Maroc.
Chiffres à l’appui, sur 10,8 millions d’assurés AMO, les dépenses liées à la consommation de médicaments représentent 3 Mds de DH sur 10 Mds de DH soit 30% des dépenses globales.
La généralisation de l’assurance maladie qui va intégrer, d’ici fin 2022, 22 millions de Marocains supplémentaires dont 11 millions des travailleurs non-salariés (TNS) et 11 millions de Ramédistes, va forcément stimuler la consommation des médicaments.
La dépense des médicaments sera multipliée par 3 et ce dès 2023. Une aubaine pour les laboratoires pharmaceutiques qui ne cessent de déplorer cette faible consommation qui pénalise l’essor du secteur pharmaceutique.
Une baisse des prix du médicament s’impose
Certes la consommation du médicament au Maroc est très faible. Mais il faut reconnaître que les prix des médicaments sont plus élevés par rapport à ceux ayant cours dans un certain nombre de pays voisins du Maroc malgré les efforts de baisse des prix entrepris.
Pour renverser cette tendance, les industriels devraient de leur côté faire des efforts en matière de production pour approvisionner le marché et répondre à une forte demande mais également en matière de prix.
En effet, on passe d’un marché de 10 millions à 32 millions de consommateurs en une seule année. Une économie d’échelle qui devrait se répercuter sur le prix des médicaments notamment fabriqués localement.
Dans ce sillage, il paraĂ®t que l’Agence nationale de l’Assurance Maladie (ANAM) a rĂ©uni rĂ©cemment les reprĂ©sentants de l’industrie pharmaceutiques à savoir la FĂ©dĂ©ration Marocaine de l’Industrie et de l’Innovation Pharmaceutiques (FMIIP), les Entreprises du mĂ©dicament au Maroc (LEMM) et l’Association marocaine du mĂ©dicament gĂ©nĂ©rique (AMMG), apprend-on de source sĂ»re.
Au menu de cette réunion, l’effort à faire par les industriels en matière de révision des prix du médicament mais aussi de remboursabilité des médicaments. Aujourd’hui, force est de constater que le remboursement de certains médicaments au Maroc coute beaucoup plus cher que dans d’autres pays.
Un projet d’assainissement du Guide des médicaments remboursés (GMR) serait en gestation pour mettre à niveau les prix des médicaments par rapport au prix le plus bas des pays benchmarkés. Il semble que le travail au niveau des commissions a déjà commencé.
Cette révision des prix est d’autant plus nécessaire pour garantir la soutenabilité financière du régime. Surtout que la question des équilibres financiers du système s’impose avec acuité et persistance. Outre cette baisse du prix, il est impératif de mettre en place des garde-fous pour garantir une consommation raisonnable et éviter de faire saigner ce régime.
D’autant plus, cette révision s’accorde avec les recommandations de l’avis du Conseil de la Concurrence qui a stipulé qu’ « il s’avère urgent et indispensable que la régulation du marché du médicament au Maroc connaisse une refonte en profondeur au niveau de son cadre légal, de sa gouvernance, de son organisation et de sa gestion ».
Le Conseil a également recommandé la révision du mode de fixation des prix des médicaments qui est la clé de voûte pour baisser les prix du médicament et développer la concurrence entre les différents établissements pharmaceutiques industriels. « Ce nouveau mode doit être basé sur un mécanisme approprié de fixation négociée et concertée entre les acteurs du marché du médicament. Ce système peut être porté conjointement par l’Agence Nationale des Médicaments et Dispositifs Médicaux et l’ANAM », lit-on dans l’avis.