Dans un contexte économique en pleine effervescence, comment se profilent les indicateurs de la bourse de Casablanca ?
Au-delà des signaux conjoncturels, d’autres éléments, notamment d’ordre réglementaire, peuvent contribuer à cette incertitude.
Les détails avec Bachir Tazi, Directeur de CFG Bank Capital Markets.
Le début de l’année 2018 était certes très intéressant en termes de performances (un pic de 6%) et de volumes. Toutefois, depuis la publication des résultats annuels, il y a eu un dépassement dans les deux sens et la hausse affichée depuis le début de l’année a été corrigée. D’abord sur le plan performance qui est aujourd’hui négative de 1%. Aussi, les volumes se sont-ils tassés pour passer d’une fourchette 200 – 250 MDH à une fourchette de 110 – 120 MDH par jour en moyenne.
Pour quelles raisons ? La première est d’ordre géopolitique liée essentiellement à une augmentation du prix du Brent (à peu près 80 dollars), à une hausse du prix du dollar et à celle des taux aux Etats-Unis.
S’ajoute à cela, les projections d’une hausse des taux dès 2019 par la BCE et les risques politiques en Italie et en Espagne.
La concomitance de tous ces éléments peut avoir un impact sur la reprise économique dans le monde y compris en Europe notre principal partenaire et par ricochet sur le Maroc.
A noter qu’à un certain moment, le marché boursier national avait déjà anticipé les résultats de l’exercice 2017 publiés à fin mars 2018. « A partir de 2018, il y a eu un tassement de la masse bénéficiaire, soit à des rythmes de 5 à 6%. Ce tassement ne prend pas en considération le boycott sur Centrale Danone qui a déjà émis le profit warning et hors l’effet d’un éventuel plafonnement des marges ou des prix de Total », tient à expliquer Bachir Tazi, Directeur de CFG Bank Capital Markets. Tous ces risques alimentent l’incertitude chez l’investisseur et l’effet d’éviction qui peut en découler au détriment des pays émergents et donc du Maroc au profit d’autres pays en l’occurrence les Etats-Unis.
Il est temps de généraliser l’obligation de la publication trimestrielle à toutes les sociétés cotées
Après Samir, Stroc Industrie éprouve de sérieuses difficultés financières et ce depuis pratiquement son introduction en Bourse. Cela ne risquerait-il pas de ternir l’image de la Bourse de Casablanca ?
Bachir Tazi n’est pas de cet avis : « En fait, ce qui est arrivé à Stroc Industrie est tout à fait normal dans la vie d’une société. Une entreprise peut très bien fonctionner, puis à un moment donné éprouver quelques difficultés, ce qui impacterait bien entendu son cours en Bourse ».
Par contre, il y a une question qui ne laisse nulle place à la divergence, celle de la qualité du reporting de la société (chiffres publiés). Si l’on prend le cas de Stroc, tout le monde savait que la société était en difficulté depuis trois années. Mais au-delà des chiffres, le management de la société n’a pas souhaité communiquer sur le degré de la gravité de la situation.
Pour Bachir Tazi, il peut être alerté sur les chiffres, mais si la communication qualitative fait défaut, nul ne saurait jauger la situation réelle d’une entreprise. Autrement dit, même si la société publie des résultats positifs, elle peut omettre volontairement de communiquer aux investisseurs les risques qu’elle pourrait encourir pendant l’exercice suivant.
En effet, si de par l’aspect réglementaire, elle est obligée de communiquer sur les chiffres, elle n’est pas tenue de dévoiler l’éventuelle perte d’un gros contrat à titre d’exemple. C’est là où le bât blesse. « Dans plusieurs cas, la publication d’un profit warning ne se fait pas », alerte B. Tazi. Il n’y a obligation en la matière que lorsque le client perd un contrat et quand cela commence vraiment à impacter les chiffres. Ce n’est qu’à ce moment que le management de la société est tenu de publier le profit warning.
D’où la nécessité d’améliorer la communication qualitative des sociétés cotées et à l’instar des banques généraliser l’obligation de la publication trimestrielle. C’est de cette manière que les investisseurs auront plus de visibilité.