La cotisation minimale trouve toute sa légitimité dans le système fiscal actuel et l’impôt ne peut donc être indexé sur les résultats.
Nous sommes en pleins préparatifs du Projet de Loi de Finances 2020. Toutes les fédérations reviennent à la charge avec en bandoulière les dispositions fiscales n’ayant pas été satisfaites dans le cadre de la Loi de Finances 2019. Ce projet se distingue de ses précédents par le démarrage de la loi-cadre relatif à la réforme de la fiscalité. Mais pas seulement. Il doit tenir compte de l’impératif d’un nouveau modèle de développement économique et ce dans un contexte économique trop pressant aussi bien sur le plan national qu’international.
En faisant le diagnostic de la situation fiscale actuelle, le ministre de l’Economie et des Finances, Mohammed Benchâboun conclut la nécessité de rationaliser les incitations fiscales et remédier à la problématique relative à l’équité concernant l’impôt sur le revenu puisque les professionnels non-salariés paient uniquement 5% de la totalité de cet impôt contre 95% pour les salariés et les fonctionnaires. Il ressort également du diagnostic du ministre que 33% des entreprises déclarent des bénéfices et 73% d’entre-elles paient le minimum. Des ratios qui en disent long sur les failles de notre système qui, dans ces conditions, ne peut être taxé que par une forte pression fiscale.
Salariés vs entreprises déficitaires
Après avoir échoué à faire passer la baisse de la cotisation minimale dont le taux s’est établi, dans le cadre de la Loi de Finances 2019, à 0,75% (vs 0,5%), le Patronat va encore aiguiser ses armes pour convaincre l’Exécutif à abaisser le taux de la cotisation minimale. A rappeler que la cotisation minimale est acquittée essentiellement par les assujettis dont les activités se soldent par des résultats déficitaires. Reste que le déficit peut être réel ou fictif.
L’Etat cédera-t-il ou pas aux doléances ? Rien n’est sûr pour le moment. Dans une conjoncture économique marquée par la rareté des ressources financières où l’Etat s’est trouvé astreint à vendre quelques bijoux de famille (la cession d’une partie de la participation de l’Etat dans le capital de la société Itissalat Al-Maghrib), il est difficile de concevoir voire d’imaginer une satisfaction de cette disposition et du coup, une baisse du taux de la cotisation minimale. Les chiffres publiés mensuellement par la Trésorerie Générale du Royaume attestent que les finances publiques sont sous pression et se soldent par un déficit récurrent de la situation du Trésor.
Bref, notre humble raisonnement ne se limite pas uniquement à la contrainte financière. Mais bien au-delà en épousant le principe de l’équité et la justice fiscale qui ont été le fil conducteur de la thématique des récentes Assises de la fiscalité.
Baisser le taux de cotisation minimale à des entreprises au moment où le simple salarié est prélevé directement de l’impôt sur le revenu est une aberration dénuée de tout sens. Tout en étant imposé sur ses revenus, le salarié n’a pas cette latitude de demander à l’Etat de défalquer toutes ses charges (frais de scolarité, soins médicaux, loyers…) avant d’imposer ses revenus. Au moment où l’entreprise déduit ses charges avant d’être soumise à l’impôt sur les sociétés.
Dans cette foulée, l’entreprise ne peut encore exiger la baisse du taux de la cotisation minimale pour la simple raison qu’elle n’a pas dégagé des bénéfices. Cela pourrait être le résultat d’une stratégie commerciale déficiente, de l’absence d’une approche innovante… Donc l’entreprise ne peut se passer pour une victime et faire supporter à l’Etat ses résultats déficitaires.
Encore faut-il ne pas omettre que cette entreprise qui se dit agonisante à cause d’un système fiscal injuste ait bien profité de la dépense publique (services administratifs, infrastructures, ouverture des marchés…). En contrepartie, elle est obligée de remplir sa part du contrat et payer ses dus.
Il faut dire que malgré les doléances, la cotisation minimale trouve toute sa légitimité dans le système fiscal actuel et l’impôt ne peut donc être indexé sur les résultats.
Pour remédier un tant soit peu à cette situation et limiter le nombre des entreprises enregistrant des résultats déficitaires, le législateur doit pouvoir séparer le bon grain de l’ivraie. Avec la digitalisation et le recoupement des informations, il est désormais capable de dénicher les délinquants fiscaux qui fardent leurs déclarations. Une autre paire de manche.
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