Interviewé par Lamiae Boumahrou I
Le respect des règles concurrentielles par tous les acteurs (public et privé) est un impératif pour garantir la neutralité concurrentielle. Cette exigence est-elle respectée par les EEP ? Khalid Sbia, Directeur des entreprises publiques et de la privatisation (DEPP), revient sur les réformes engagées dans le secteur des EEP, sur l’enjeu de la neutralité concurrentielle dans le secteur et sur les objectifs à atteindre.
EcoActu.ma : La neutralité concurrentielle est requise pour garantir un marché concurrentiel où tous les acteurs, publics et privés, sont soumis aux mêmes conditions du marché. Qu’en est-il des EEP ? Respectent-ils les règles concurrentielles ?
Khalid SBIA : Tout d’abord et comme l’avait souligné la Ministre de l’Economie et des Finances lors de la Conférence, il serait réducteur de ne voir dans les Etablissements et Entreprises Publics (EEP) qu’une source de distorsion de la concurrence. Les EEP jouent un rôle stratégique dans la mise en œuvre des politiques publiques et le déploiement des stratégies sectorielles, la modernisation des infrastructures, l’amélioration de la compétitivité du pays et le développement territorial.
Afin de renforcer la neutralité concurrentielle des EEP, remédier aux distorsions potentielles du marché et améliorer l’efficience de leur action économique et sociale, les pouvoirs publics, sous l’impulsion des Hautes Orientations Royales, ont entrepris des réformes institutionnelles structurantes, notamment à travers le chantier de la réforme profonde des EEP porté par 2 textes fondateurs :
- La loi-cadre n° 50-21 relative à la réforme des EEP qui comprend plusieurs dispositions dédiées à l’équité et à la neutralité concurrentielle, à savoir :
- Le désengagement des EEP des activités qui ne relèvent pas, directement ou indirectement, de leurs missions principales ou de leur objet social et la cession des actifs et des participations qui ne sont pas nécessaires à l’exercice de ces missions ou activités ;
- La dissolution et la liquidation des établissements publics exerçant des missions pouvant être portées par le secteur privé, le cas échéant ;
- La transformation des établissements publics exerçant une activité marchande en sociétés anonymes pour permettre, entre autres, l’ouverture progressive de leur capital au secteur privé ;
- L’interdiction de créer un établissement public pour exercer une activité marchande, sauf en cas de nécessité impérieuse d’intérêt national ;
- L’évaluation périodique pour s’assurer de la pertinence des activités relevant de l’objet social des entreprises publiques en vue, le cas échéant, d’en transférer certaines au secteur privé.
- La loi n° 82-20 relative à la création de l’ANGSPE ayant pour objet la séparation de la fonction d’actionnaire des autres missions de l’État et la mise en place d’une politique actionnariale de l’Etat sur la base des sept orientations stratégiques approuvées par le Conseil des Ministres présidé, le 1er juin 2024, par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu L’assiste.
A côté de ces deux textes de référence, il y a d’autres réformes mises en place ou consolidées pour conforter la position du secteur privé en tant qu’acteur majeur de l’activité économique et favoriser le libre jeu de la concurrence en soumettant toutes les entreprises aux mêmes règles, indépendamment de leur structure de propriété ou de leur forme juridique. Il s’agit principalement du:
1) Développement du Partenariat Public-Privé : 5 ans après l’entrée en vigueur de la loi n° 86-12 relative aux contrats PPP, un amendement a été adopté par la loi n° 46-18 pour dynamiser les PPP, accélérer le rythme de réalisation des infrastructures pour soutenir les objectifs de développement économique et social et créer des opportunités d’emploi.
La modification du cadre juridique vise également à promouvoir la contribution du secteur privé aux efforts d’investissement en tant que véritable moteur de l’économie nationale et à favoriser l’émergence de champions nationaux tout en stimulant l’activité des PME par la sous-traitance pour bénéficier du transfert de technologie et du savoir-faire.
Le cadre juridique solide régissant les PPP notamment la loi n° 86-12 telle qu’elle a été modifiée et complétée par la loi n° 46-18 contribue à la neutralité concurrentielle à travers plusieurs leviers, notamment :
- L’engagement plus large du secteur privé dans la réalisation et la gestion des ouvrages et services publics ;
- La promotion de l’innovation et de l’efficacité ;
- Le processus de sélection transparent et compétitif sur la base de critères pertinents garantissant l’égalité de traitement des concurrents ;
- Le partage équitable des risques : clarification des rôles et des responsabilités, encourageant une concurrence saine et limitant les distorsions du marché ;
- Le suivi et l’évaluation de la performance sur la base de critères prédéterminés et alignés sur les meilleurs standards, contraignant les acteurs au respect des objectifs de qualité et d’efficience.
2) L’encadrement des opérations de gestion déléguée : la loi n°54-05 relative à la gestion déléguée des services publics comporte des clauses et des dispositions alignées sur les principes favorisant un environnement concurrentiel et équitable notamment :
- L’équilibre du contrat de gestion déléguée : le maintien de l’équilibre financier du contrat est fondamental pour assurer la neutralité concurrentielle à travers une rémunération juste du délégataire sans pour autant recevoir de subventions ou de compensations qui pourraient fausser le libre jeu de la concurrence.
- Un régime financier fixant les modalités de rémunération, les ajustements tarifaires et les gains de productivité qui sont en lien direct avec la neutralité concurrentielle.
- Les obligations du délégant : le respect des engagements contractuels du délégant, surtout en matière tarifaire, est essentiel pour garantir les conditions d’une concurrence équitable.
3) L’élaboration d’un nouveau Code des bonnes pratiques de gouvernance : la DEPP pilote le chantier de la préparation du nouveau Code des bonnes pratiques de gouvernance. Ce Code s’adresse aux EEP et les guide pour adopter des normes de gouvernance plus élevées, propres à assurer une plus grande transparence, un respect rigoureux des actionnaires et de leurs droits et une meilleure protection du public. Il s’agit aussi d’améliorer leur image auprès des parties prenantes et de consolider la confiance de leur environnement économique, financier et social afin de renforcer leur neutralité concurrentielle et de remédier aux distorsions potentielles de marché.
Le nouveau Code vise en particulier à :
- Asseoir et diffuser les meilleures pratiques de gouvernance des EEP, ancrer la culture de reddition des comptes et promouvoir les valeurs de transparence, d’égalité de genre, d’information et de communication ;
- Renforcer le rôle et les responsabilités des organes de gouvernance des EEP en leur permettant d’avoir les pouvoirs, les compétences et l’indépendance nécessaires pour assurer leur fonction de pilotage stratégique et de surveillance de l’équipe de direction de l’EEP ;
- Améliorer la performance, la viabilité et l’efficience de l’action des EEP en consolidant leur contribution au développement d’un tissu économique compétitif ; et,
- Garantir le traitement équitable des parties prenantes et la préservation de leurs droits.
4) L’amélioration des délais de paiement et le déploiement du mécanisme de sanctions pécuniaires : pour assurer un équilibre juste et renforcé entre les secteurs public et privé, mais aussi entre opérateurs privés, un mécanisme de sanctions a été instauré par la loi n° 69-21 modifiant la loi n°15-95 formant Code de commerce et édictant des dispositions transitoires particulières relatives aux délais de paiement.
Ce mécanisme consiste en la mise en place d’une amende pécuniaire pour les retards de paiement de toutes les entreprises, quelles que soient leur structure de propriété, leur localisation ou leur forme juridique, avec obligation de déclaration trimestrielle à l’administration fiscale des factures payées en retard et celles payées en respect du délai légal.
L’entrée en vigueur de ce dispositif a eu des effets positifs notamment en termes d’amélioration des délais de paiement, y compris interentreprises, augurant des perspectives favorables pour le rééquilibrage des rapports entre les grandes et petites entreprises.
En somme, les EEP sont tenus, en vertu du corpus législatif et réglementaire auquel ils sont soumis, d’opérer dans un environnement concurrentiel libre, saint et équitable sans discrimination et sans bénéficier d’aucun privilège afin de consolider le libre jeu de la concurrence.
Jusqu’à quel degré la nouvelle réforme des marchés publics peut-elle favoriser la neutralité concurrentielle ?
La consolidation du cadre réglementaire des marchés publics a toujours été une priorité du Ministère de l’Economie et des Finances (MEF) à travers des révisions successives favorisant la transparence et le libre jeu de la concurrence. En effet, le processus de la commande publique est régi par une réglementation qui n’a cessé de connaître des réformes continues notamment via les décrets relatifs aux marchés publics, de 2007, 2013 et 2023 pour s’aligner sur les meilleurs pratiques et standards internationaux. Cette réglementation repose sur les règles universelles et les principes fondateurs suivants :
- La liberté d’accès aux marchés publics ;
- L’égalité de traitement des concurrents : les EEP ne bénéficient d’aucun traitement privilégié ;
- La garantie des droits des concurrents, notamment en termes d’accès à l’information et de mécanismes de recours et de réclamation ;
- La transparence dans les choix du maître d’ouvrage ;
- L’intégrité et les principes de bonne gouvernance ;
- La bonne utilisation des deniers publics : choix de l’offre économiquement la plus avantageuse.
L’un des objectifs fondamentaux de la dernière réforme de 2023 est l’adoption d’un référentiel unique des marchés publics applicable à l’État, aux collectivités territoriales, aux établissements publics et aux autres personnes morales de droit public afin de donner une plus grande visibilité et davantage de clarté aux opérateurs économiques.
Quant aux EEP exerçant une activité marchande, ils sont dotés de règlements propres de passation de marchés qui tiennent compte des spécificités de leurs activités et de la flexibilité nécessaire pour la préservation de leur capacité compétitive sur le marché, tout en s’alignant sur les règles et les principes fondamentaux de la commande publique.
Dans le même sillage et grâce au portail de la commande publique déployé par la Trésorerie Générale du Royaume, la dématérialisation du processus de passation de la commande publique allant du lancement de l’appel d’offres) jusqu’à l’attribution de la commande a permis de consolider la transparence, de renforcer l’équité et de garantir une traçabilité totale des procédures des marchés publics.
Par ailleurs, la passation des contrats de PPP et de gestion déléguée est soumise aux mêmes règles et principes précités, notamment la liberté d’accès, l’égalité de traitement des candidats, l’objectivité, la concurrence, la transparence, l’intégrité, et le respect des règles de bonne gouvernance.
Ainsi et conformément aux meilleurs standards internationaux, les règles des différents modes de passation de la commande publique assurent un traitement équitable à tous les soumissionnaires, sans discrimination et indépendamment des critères de structure de propriété et de forme juridique du soumissionnaire. Les EEP, en tant que soumissionnaires, sont assujettis aux mêmes règles et pratiques que celles s’appliquant à tout autre candidat.
Pour les partenaires techniques et financiers internationaux, les marchés publics sont attribués de manière concurrentielle, ce qui favorise l’efficacité de la prestation de services et consolide la neutralité concurrentielle.
Comment le MEF et notamment la DEPP contribue à la conciliation entre la neutralité concurrentielle et la mise en œuvre des politiques publiques sans pour autant créer des distorsions dans le marché ?
Grâce à la panoplie et à la richesse de ses missions et de son champ d’intervention, la DEPP, en collaboration avec l’ensemble des parties prenantes, internes et externes au MEF, contribue à l’enrichissement de l’environnement juridique et joue un rôle important dans la définition et la mise en œuvre du cadre législatif et réglementaire favorisant la neutralité concurrentielle des EEP à travers les principaux domaines d’action suivants :
1) Exercice du contrôle financier : grâce à ses agents de contrôle déployés sur tout le territoire national, la DEPP :
- Assure un accompagnement et une assistance aux EEP et veille au respect du corpus législatif et réglementaire favorisant l’équité et le libre jeu de la concurrence ;
- Appuie les EEP pour l’optimisation de l’utilisation des deniers publics qui leur sont transférés (notamment par le Budget général de l’Etat) pour la réalisation des objectifs des politiques publiques tout en assurant leur neutralité concurrentielle ;
- Apprécie les performances économiques et financières des EEP ainsi que la conformité de leur gestion aux missions qui leur sont assignées en lien avec les objectifs escomptés des politiques publiques.
Actuellement, le dispositif de contrôle financier est en train de connaître un changement substantiel marquant une rupture par rapport à l’existant afin répondre aux objectifs de la loi-cadre n°50-21 susvisée. La réforme vise à ouvrir aux EEP la voie vers l’adoption des meilleurs standards en matière de pilotage stratégique et de contrôle financier à travers un ensemble de principes et de règles articulés autour de l’ancrage des pratiques de bonne gouvernance, le renforcement de la transparence et de la reddition des comptes ainsi que l’allégement et la modulation du contrôle financier pour l’orienter principalement vers l’appréciation des performances, l’évaluation du dispositif de gouvernance et la prévention des risques.
2) Mise en place d’une nouvelle démarche de contractualisation au service de la neutralité concurrentielle moyennant l’adoption d’une nouvelle philosophie de contractualisation basée sur les principes majeurs suivants :
- Réduction des transferts et alignement sur les standards de marché: les EEP sont appelés à réduire leur dépendance aux Budget général de l’Etat et à développer leur autonomie financière en renforçant leurs recettes propres et à opérer dans des conditions normales de marché, évitant ainsi toute distorsion de la concurrence.
- Clarification des objectifs et attentes de l’Etat: en précisant les objectifs assignés aux EEP et les moyens mis à leur disposition pour les atteindre, les contrats-programmes limitent les interventions qui pourraient favoriser un EEP par rapport aux acteurs privés, ce qui contribue au libre jeu de la concurrence.
- Clarification des objectifs et des engagements en matière de performance et d’efficacité: adoption de règles similaires à celles du secteur privé à travers la conclusion de contrats de performance avec les organes délibérants et des contrats d’objectifs avec les responsables de l’EEP conformément aux dispositions de la loi cadre n°50-21 précitée.
3) Dynamisation des PPP : en collaboration avec les départements ministériels et les EEP concernés, la DEPP a recensé une soixantaine de projets d’investissement réalisables en mode PPP pour un coût global d’environ 50 MM dh qui concernent principalement les secteurs de l’Eau, de l’Energie, du Transport et de la Logistique, de l’Agriculture, du Commerce et de l’Industrie, de l’Enseignement Supérieur, de la Santé et l’Habitat et l’Urbanisme.
Ces projets de PPP permettront de promouvoir la contribution du secteur privé à la création de valeur en tant que véritable levier de l’activité économique et de renforcer, par conséquent, la neutralité concurrentielle tout en assurant le déploiement des politiques publiques.
4) Rationalisation et assainissement du portefeuille public : les travaux d’identification réalisés par la DEPP en concertation avec les départements ministériels et les EEP concernés ont permis d’arrêter un programme global des opérations de restructuration concernant une centaine d’EEP au sens de la loi-cadre n°50-21 (regroupement, fusion, dissolution, liquidation et transformation en SA).
Ces travaux seront poursuivis en vue d’élargir les évaluations à l’ensemble du portefeuille non marchand.
Lesdites opérations de restructuration au sens de la loi-cadre n° 50-21 concernent divers secteurs et EEP et se déclinent en deux grands groupes :
- Des opérations en cours d’exécution ou ayant un niveau de maturité avancé (soixantaine d’EEP), et,
- Des opérations en cours d’étude et de réflexion.
Dans le prolongement de ses actions et mesures d’assainissement du portefeuille public, la DEPP s’est lancée dans une réforme du dispositif encadrant le processus de liquidation visant l’élaboration d’une feuille de route pour l’accélération des liquidations et l’opérationnalisation de l’Instance Centrale chargée de la liquidation des EEP à travers la mise en place du cadre législatif fixant ses missions, sa composition et les modalités de son fonctionnement.
5) lancement des opérations de privatisation : la DEPP est chargée du lancement des opérations de privatisation régies par la loi nº 39-89 autorisant le transfert d’entreprises publiques au secteur privé, qui prévoit la liste des actifs privatisables. L’éligibilité des EEP à cette opération obéit à plusieurs règles et critères permettant de s’assurer de la pertinence de ce choix pour la création de la valeur ajoutée escomptée.
Compte tenu de l’impact de ces opérations de privatisation sur la situation financière et concurrentielle de chaque entreprise transférée au secteur privé et sur le renforcement de la neutralité concurrentielle, la réduction des distorsions de marché et la consécration du rôle du secteur privé en tant qu’acteur majeur de l’économie tout en assurant le désengagement de l’Etat des activités ne relevant pas de ses missions principales, la refonte du cadre de la privatisation figure parmi les chantiers de la réforme des EEP. Ce travail est en cours, en parfaite coordination entre le Ministère de l’Economie et des Finances et l’ANGSPE compte tenu de son rôle central en matière de proposition et de suivi des Orientations stratégiques de la Politique actionnariale de l’Etat.
6) Amélioration des délais de paiement : la DEPP assure le secrétariat de l’Observatoire des Délais de Paiement (ODP) créé en novembre 2017. L’ODP joue un rôle important et constitue un laboratoire de réflexion pour entreprendre des mesures afin d’améliorer les pratiques et les délais de paiement.
Depuis sa création, l’ODP a publié quatre rapports confirmant la tendance d’amélioration des délais de paiement du secteur public (Etat, Collectivités Territoriales et EEP) ce qui offre une meilleure visibilité aux opérateurs, consolide la confiance du secteur privé et permet un impact positif sur la compétitivité globale du marché à travers le respect du délai légal de paiement qui est un levier incontournable pour une neutralité concurrentielle renforcée.
Par ailleurs, un projet de réorganisation de la DEPP visant sa restructuration est en cours de finalisation afin de s’adapter aux mutations du cadre institutionnel et mieux accompagner les EEP pour consacrer les principes de la performance, de l’efficacité, de la transparence, de l’équité et du libre jeu de la concurrence et ce, conformément aux orientations de la loi-cadre n°50-21 susvisée.
Les principaux objectifs de la nouvelle organisation peuvent être déclinés comme suit :
- Prise en charge des chantiers structurants de la DEPP, notamment la modernisation du contrôle financier, la gestion des risques, l’appréciation des performances, la restructuration du portefeuille public, l’amélioration de la gouvernance et la consolidation de la contractualisation ;
- Assurer un meilleur portage et accompagnement des chantiers structurants de l’Etat au regard du champ d’intervention des EEP (santé et protection sociale, éducation, régionalisation avancée, etc.) ;
- Intégration des nouveaux métiers et renforcement de certains métiers, en l’occurrence l’évaluation des missions des EEP, la généralisation du contrôle financier, l’opérationnalisation des nouveaux modes de contractualisation, etc. ;
- Garantir une meilleure organisation des structures de contrôle financier et une redéfinition du champ de leur intervention et mise en relief des secteurs à forts enjeux ;
- Développement et modernisation de la fonction de l’audit interne tout en respectant les normes internationales en la matière.
Dans un contexte marqué par une succession de crises où l’Etat est appelé à intervenir massivement pour soutenir le tissu économique et préserver le pouvoir d’achat des consommateurs, comment doit-il œuvrer pour ne pas fausser le jeu de la concurrence?
D’abord, il y a lieu de rappeler que les EEP ne bénéficient d’aucun avantage fiscal dans la mesure où les EEP sont soumis au Code Général des Impôts au même titre que les entreprises privées.
En outre, 70% des transferts budgétaires de l’Etat sont destinés aux EEP non marchands investis d’une mission de service public. Par ailleurs, les subventions accordées à un nombre très limité d’entreprises publiques interviennent dans un contexte particulier répondant à des contraintes liées soit à la réalisation d’un programme de développement économique et social nécessitant un investissement « budgétivore », soit pour faire face à une conjoncture défavorable, comme le renchérissement des prix des matières premières qui contraint l’Etat d’intervenir –via l’octroi de subventions- pour garantir la continuité des services publics de base et/ou la non-augmentation des tarifs appliqués aux consommateurs .
Dans ce cadre, deux principaux dispositifs ont été mis en place pour renforcer la neutralité concurrentielle des EEP :
- Identification et chiffrage de l’Obligation de Service Public à travers la clarification de ladite Obligation qui doit faire l’objet d’une convention qui fixe les droits et les obligations de l’Etat et des EEP concernés ainsi que le mode de financement (Article 54 de la loi-cadre n° 50-21 susvisée). Les diligences sont en cours pour mettre en place les mécanismes d’évaluation des coûts des Obligations de Service Public et de détermination des financements qui leur seront alloués.
- Réforme de la compensation : le Maroc a entrepris depuis plusieurs années une réforme progressive de la compensation en vue de réduire les distorsions du marché. Cette réforme, matérialisée par une décompensation graduelle de plusieurs produits notamment des produits de première nécessité, a été accompagnée par des transferts directs et un ciblage des aides grâce au déploiement du Registre Social Unifié. Le soutien direct aux consommateurs pour l’achat de biens et services favorise le libre jeu de la concurrence dans la mesure où le bénéficiaire peut utiliser ce soutien financier librement pour acquérir lesdits biens et services auprès de n’importe quel fournisseur, ce qui permettra de remédier aux distorsions de marché engendrées par les aides publiques.
En guise de conclusion, on peut dire que les EEP participent largement au développement économique et social du Maroc. Néanmoins, il est primordial de rechercher un équilibre entre neutralité concurrentielle et réalisation des objectifs des politiques publiques.
Dans cette optique, le Maroc a réalisé de grandes avancées en termes de libéralisation des marchés, d’ouverture au secteur privé et d’amélioration du climat des affaires et toutes les actions de réforme entreprises s’inscrivent dans le cadre d’une philosophie visant le renforcement de la neutralité concurrentielle et la garantie de l’égalité des règles du jeu en remédiant aux distorsions potentielles du marché.
Lire également : Neutralité concurrentielle : A. Rahhou revient sur le rôle du Conseil de la concurrence pour veiller au respect des règles
Lire également : Entretien : Neutralité concurrentielle : l’OCDE invite les gouvernements à veiller à la neutralité des règles sur les marchés