Lors du précédent entretien, nous avons interrogé Omar Bakkou au sujet des dispositions de la règlementation des changes régissant les opérations d’investissement étranger au Maroc. Les explications données par O. Bakkou nous ont permis de saisir tout d’abord l’objet de cette règlementation : mettre en place un cadre libéral pour la réalisation des opérations d’investissement étranger au Maroc.
Ce cadre, consigné dans la sous-section 1 de la section 1 du chapitre IV de l’Instruction Générale des Opérations de Change-24, s’articule autour de deux volets : la définition des opérations d’investissement étranger au Maroc et la fixation des conditions de réalisation de ces opérations.
Ces deux volets concernent les trois séquences du « cycle de vie » des opérations d’investissement étranger, à savoir : les opérations initiales, celles intermédiaires et celles finales.
Les opérations initiales désignent l’opération d’investissement étranger réalisée au début : prise de participation par un non-résident ou un étranger au capital d’une société marocaine, etc.
S’agissant des opérations intermédiaires, elles désignent les opérations relatives aux revenus générés par les opérations d’investissement étranger.
Quant aux opérations finales, il s’agit des opérations de cession ou de liquidation des investissements réalisés.
Ainsi , en partant de cette structuration de la règlementation des changes régissant les investissements étrangers au Maroc, nous avons interrogé O.Bakkou au sujet de la première séquence présentée ci-dessus , à savoir celle relative aux opérations d’investissement initiales.
Dans le présent entretien, nous allons interroger O.Bakkou au sujet de la deuxième séquence du « cycle de vie » des investissements étrangers , à savoir celle relative aux opérations afférentes aux revenus générés par ces investissements .
Lors du précédent entretien, vous avez souligné que le cadre libéral établi par la règlementation des changes en matière d’opérations d’investissement étranger au Maroc englobe les revenus générés par ces opérations. Pourriez-vous nous éclairer à ce sujet ?
Effectivement, les revenus générés au titre des opérations d’investissement étranger bénéficient d’un cadre libéral.
Ce cadre s’articule autour de deux volets : la définition des opérations relatives aux revenus générés au titre des investissements étrangers et la fixation des conditions de réalisation de ces opérations.
Définition des opérations relatives aux revenus générés au titre des investissements étrangers, pourriez-vous nous donner des précisions à ce sujet ?
Selon l’article 159 de l’Instruction Générale des Opérations de Change-24(l’IGOC-24), les opérations relatives aux revenus générés par les investissements étrangers réalisés au Maroc comprennent :
– Les dividendes ou parts de bénéfices distribués par les sociétés de droit marocain ;
– Les bénéfices réalisés par les succursales au Maroc de sociétés étrangères ;
– Les revenus locatifs ;
– Les intérêts produits par les prêts apparentés et avances en compte courant d’associés ;
– Les intérêts générés par les titres de dettes ;
– Les intérêts produits par les dépôts à terme.
Quid des conditions de réalisation des opérations relatives aux revenus générés au titre des investissements étrangers au Maroc ?
Les conditions de réalisation des opérations relatives aux revenus générés au titre des investissements étrangers au Maroc consistent en un ensemble de dispositions qui visent à assurer la traçabilité des paiements en devises au titre de ces opérations.
Cette traçabilité s’avère nécessaire afin de pouvoir vérifier à postériori l’effectivité des dépenses en devises au titre desdites opérations.
Vérification à postériori de l’effectivité des dépenses en devises au titre des opérations relatives aux revenus générés par les investissements étrangers réalisés au Maroc?
Ce sujet a été traité de manière détaillée lors de la soixante-dix neuvième partie de notre entretien.
Revenons à notre question, quelles sont concrètement les conditions de réalisation des opérations relatives aux revenus générés par les investissements étrangers réalisés au Maroc ?
Comme il est indiqué ci-dessus, ces conditions consistent en un ensemble de dispositions visant à assurer la traçabilité des paiements en devises au titre de des opérations relatives aux revenus générés par les investissements étrangers réalisés au Maroc.
Cette traçabilité est mise en œuvre par la règlementation des changes à travers l’institution d’un schéma procédurale composé des trois principaux éléments suivants : les modalités de règlement des opérations, les formalités pré-règlements de ces opérations et les formalités post-règlements desdites opérations.
Ce canevas tracé par la règlementation des changes fonctionne concrètement comme suit :
-En premier lieu, les personnes qui souhaitent convertir en devises les dirhams générés par des revenus issus d’opérations d’investissement étranger réalisés au Maroc doivent remettre les documents justificatifs à la banque (formalités pré-règlements) ;
-En second lieu, la banque procède à la conversion en devises des dirhams qui lui sont remis par le client, puis elle vire ces devises à l’étranger (modalités de règlement);
-En troisième lieu, la banque transmet les informations relatives à l’opération concernée à l’Office des Changes, puis elle conserve les documents justificatifs de l’opération de service (formalités post-règlements).
Quelles sont les formalités pré-règlements prévues par la règlementation des changes en matière d’opérations relatives aux revenus générés par les investissements étrangers réalisés au Maroc ?
Les démarches pré-règlements désignent les documents devant être remis aux banques, préalablement à l’exécution par ces dernières des paiements au titre des opérations relatives aux revenus générés par les investissements étrangers réalisés au Maroc.
Ces documents, tel que définis par l’article 161 de l’IGOC-24, différent selon les types de revenus d’investissement étranger : les dividendes, bénéfices des succursales, revenus locatifs, etc.
Quels sont les documents justificatifs prévus en matière de dividendes ?
Les documents prévus en matière de dividendes ou parts de bénéfices distribués par les sociétés de droit marocain sont les suivants :
– Les bilans et les comptes de produits et charges (CPC) afférents à l’exercice au titre duquel le règlement est demandé, visés par l’Administration des Impôts (y compris le visa électronique via la plateforme de la DGI) ;
– Les procès-verbaux des Assemblées Générales Ordinaires ou des décisions de l’associé unique, à date certaine ayant décidé la distribution des dividendes et faisant ressortir le montant des dividendes distribués ;
– La liste des actionnaires étrangers ou marocains résidant à l’étranger avec indication de leur identité, nationalité, adresse et nombre de titres détenus par chacun d’eux ;
– Les justificatifs de règlement en devises ou en dirhams convertibles des opérations d’investissement étranger prévus par l’article 13 de la présente Instruction ,pour les étrangers résidents et les marocains résidant à l’étranger
Et quels sont les documents justificatifs prévus en matière de bénéfices d’exploitation des succursales des sociétés étrangères ?
Les documents prévus en matière de bénéfices d’exploitation des succursales des sociétés étrangères sont les suivants :
– Les bilans et les comptes de produits et charges, afférents à l’exercice au titre duquel le règlement est demandé, visés par l’Administration des Impôts (y compris le visa électronique via la plateforme de la DGI) ;
– Etat des rectifications extracomptables effectués pour obtenir le résultat fiscal.
Quels sont les documents justificatifs prévus en matière de revenus locatifs :
Les documents prévus en matière de revenus locatifs sont les suivants :
– Le certificat de propriété du bien immeuble objet de la location ;
– Le contrat de bail ayant date certaine couvrant la période des loyers à transférer et faisant ressortir le montant des loyers ;
– Les justificatifs du paiement des impôts et taxes de l’année n-1.
Quels sont les documents justificatifs prévus en matière d’échéances de prêts apparentés et avances en compte courant d’associés ?
Les documents prévus en matière de prêts apparentés et avances en compte courant d’associés sont les suivants :
– Les documents justifiant le règlement du montant du prêt ou des avances en comptes courants d’associés conformément à l’article 156 de l’IGOC-24 ;
– Le contrat du prêt ou la convention de l’avance en compte courant d’associés comportant l’échéancier de remboursement et faisant ressortir les intérêts à payer, lorsque le prêt ou l’avance en compte courant est rémunéré ;
– Les justificatifs de règlement en devises ou en dirhams convertibles des opérations d’investissement étranger prévus par l’article 13 de l’IGOC-24.
Quels sont les documents justificatifs prévus en matière de jetons de présence ?
Les documents prévus en matière de jetons de présence sont les suivants :
– La liste des administrateurs étrangers ou marocains établis à l’étranger avec indication de leur identité, adresse, montant brut et net accordé à chacun d’eux ;
– Le procès-verbal fixant le montant global des jetons de présence alloués au conseil d’administration au titre de l’exercice concerné.
Vous avez cité les formalités pré-règlements prévues par la règlementation des changes en matière d’opérations relatives aux revenus générés par les investissements étrangers réalisés au Maroc, quid des modalités de règlement de ces opérations ?
Les modalités de règlement des opérations relatives aux revenus générés par les investissements étrangers réalisés au Maroc sont définies par l’article 7 de l’IGOC-24.
Cet article définit les principes généraux régissant les modalités de règlement de toutes les opérations économiques librement réalisables en vertu de la règlementation des changes.
Ces principes, explicités lors de la dix-huitième partie de notre entretien, stipulent que les opérations économiques précitées doivent être généralement payées par virement bancaire.
Vous avez cité les modalités de règlement des opérations relatives aux revenus générés par les investissements étrangers réalisés au Maroc, quid des formalités post-règlements ?
Les démarches post-règlements désignent les formalités devant être accomplies postérieurement à la réalisation des opérations relatives aux revenus générés par les investissements étrangers réalisés au Maroc .
Ces formalités englobent deux éléments : la conservation des documents justificatifs et la transmission des informations.
La conservation des documents justificatifs est une obligation qui incombe aux banques et aux personnes ayant effectué les opérations relatives aux revenus générés par les investissements étrangers réalisés au Maroc. .
En effet, concernant les banques, l’article 18 de l’IGOC-24 dispose que « les banques sont tenues de conserver tout document en relation avec les opérations exécutées dans le cadre des dispositions de la règlementation des changes, et ce, conformément aux dispositions du code de commerce relatives à la conservation des documents ».
S’agissant des personnes ayant effectué les opérations relatives aux revenus générés par les investissements étrangers réalisés au Maroc, l’article précité stipule que l’obligation de conservation des documents précités s’applique également aux entités ayant réalisé les opérations prévues par les dispositions de la règlementation des changes.
Quant à la formalité de transmission des informations relatives aux opérations afférentes aux revenus générés par les investissements étrangers réalisés au Maroc , il s’agit d’une obligation qui incombe aux banques ,et ce, en vertu de l’article 163 de l’IGOC-24.
Cet article dispose en effet que « les déclarations bancaires au titre de ces opérations doivent être établies conformément aux modalités, procédures, délais et modèles fixés par le dispositif des déclarations bancaires ».