Les dirigeants de l’Union européenne (UE) devront indiquer jeudi à la Commission européenne s’ils souhaitent conclure rapidement un accord commercial avec les États-Unis, quitte à céder sur certains points, ou s’ils préfèrent durcir le bras de fer dans l’espoir d’obtenir de meilleures conditions.
Selon des responsables et diplomates européens, la majorité des pays membres semblent pencher pour un accord rapide, ce qui permettrait ensuite à l’UE d’envisager des mesures de rééquilibrage pour compenser les désavantages.
La Commission, qui négocie au nom des 27, interrogera les chefs d’État et de gouvernement réunis à Bruxelles sur la réponse à apporter à l’ultimatum du président américain Donald Trump, qui a fixé au 9 juillet la date limite pour un accord, soit moins de deux semaines.
Le bloc européen affirme viser un accord mutuellement bénéfique, mais alors que Washington s’apprête à maintenir des droits de douane généralisés de 10% sur la plupart des produits européens, et menace d’en relever le niveau en cas de négociations prolongées, un nombre croissant de pays de l’UE seraient désormais favorables à une résolution rapide, selon des diplomates.
« Il est dans l’intérêt de tous que le conflit commercial avec les États-Unis n’escalade pas davantage », a déclaré mardi le chancelier allemand Friedrich Merz devant le Parlement.
« Je sais que la Commission européenne négocie ce dossier avec une grande prudence, et elle a tout notre soutien. J’espère que nous parviendrons à une solution avec les États-Unis d’ici début juillet », a-t-il ajouté.
L’UE fait déjà face à des droits de douane américains de 50% sur l’acier et l’aluminium, 25% sur les voitures et pièces détachées automobiles, ainsi qu’une taxe de 10% sur la plupart des autres produits européens, que Trump menace de porter à 50% en l’absence d’accord.
Le seul accord commercial finalisé par les États-Unis concerne la Grande-Bretagne, avec une taxe de 10% toujours appliquée. Les responsables américains affirment qu’elle ne sera pas abaissée pour d’autres partenaires commerciaux.
Quelque 23 dirigeants européens arriveront directement de la réunion de l’OTAN à La Haye. Peu d’entre eux souhaitent enchaîner un accord militaire par une guerre économique.
« Un groupe de pays européens souhaite protéger ses entreprises en acceptant ce qui est devenu la norme : un taux de 10% », confie un diplomate européen.
Une question cruciale pour les dirigeants européens est de savoir s’il faut répondre à ce tarif de base par des mesures propres. « Nous sommes prêts pour cela, avec différentes options », assure Friedrich Merz.
L’Union européenne a donné son accord, sans les appliquer pour l’instant, à des droits de douane sur 21 milliards d’euros de produits américains, et débattent d’un nouveau paquet pouvant aller jusqu’à 95 milliards d’euros d’importations. Certains pays souhaitent toutefois en atténuer la portée.
« La Commission a raison de dire que certains États membres rognent trop sur ces mesures, ce qui risquerait de les affaiblir », déplore un diplomate européen.
Parmi les pistes étudiées figure une taxe sur la publicité numérique, qui viserait les géants américains tels que Google (Alphabet Inc), Meta, Apple, X ou Microsoft, et réduirait l’excédent commercial américain dans les services. L’UE, elle, affiche un excédent dans les biens vis-à-vis des États-Unis.
La Commission propose un accord UE-États-Unis visant à supprimer les droits de douane sur les produits industriels, ainsi qu’une augmentation potentielle des achats européens de gaz naturel liquéfié et de soja.
Washington semble peu réceptif, préférant pointer du doigt ce qu’il considère comme des obstacles : TVA européenne, normes environnementales, règlementation des plateformes en ligne, des sujets sur lesquels l’UE refuse de céder.
En marge du sommet, les dirigeants européens tenteront aussi de rassurer la Slovaquie et la Hongrie sur la fin de leur accès au gaz russe, prévue par le plan de l’UE visant à cesser toutes les importations de gaz russe d’ici fin 2027.
Selon des diplomates, ces garanties devraient permettre à Bratislava et Budapest de soutenir le 18e paquet de sanctions contre la Russie, qu’ils bloquent actuellement. Ce paquet pourrait être adopté par les gouvernements européens vendredi.
Mais l’UE pourrait devoir retirer de ce paquet sa proposition de baisser le plafond du prix du pétrole russe livré par voie maritime à 45 dollars le baril, contre 60 dollars actuellement, faute de soutien des États-Unis et de certains pays européens disposant d’importantes flottes pétrolières, dont la Grèce, Malte et Chypre. (Avec Zonebourse)