Ecrit par Lamaie Boumahrou |
Pour la deuxième fois au Maroc, BAM autorise la suspension des dotations aux amortissements des biens financés en crédit-bail ou location mais cette fois-ci uniquement pour les entreprises opérant dans le secteur touristique. Le report des échéances des remboursements leasing va engendrer tout de même des intérêts intercalaires.
Parmi les boulets que les entreprises ont dû supporter durant ces 8 mois de crise sanitaire et économique, celui du remboursement des échéances des crédits bancaires et leasing. Avec l’arrêt de l’activité économique et, par ricochet, l’arrêt des rentrées d’argent, les entreprises se sont retrouvées du jour au lendemain entre le marteau (salaires, charges sociales, loyers, prêts…) et l’enclume (banques, sociétés de leasing et assurances).
Les plus touchées sont celles opérant dans des secteurs en arrêt total ou partiel d’activité comme c’est le cas du tourisme. Un secteur qui n’a pas pu reprendre une activité normale après le déconfinement au mois de juillet 2020. Ce qui a d’ailleurs poussé le gouvernement à adopter un plan de relance pour sauver le secteur et aider les entreprises à surmonter cette crise.
Ledit plan prévoit, entre autres mesures, la mise en place d’un moratoire pour le remboursement des échéances des crédits bancaires et pour le remboursement des échéances du leasing jusqu’au 31 décembre 2020 pour les entreprises touristiques et leurs employés.
Il s’agit d’un deuxième moratoire après celui appliqué pour la période avril-juin 2020 dans le cadre des mesures du Comité de veille économique appliquées durant la période du confinement.
En effet, passé ce délai (en juillet), les banques et sociétés de leasing ont repris l’encaissement des échéances pour tous les secteurs y compris celui du tourisme. Sauf que face à une activité toujours en arrêt, bon nombre d’opérateurs sont dans l’incapacité d’honorer leur engagement financier. Plusieurs entreprises opérant dans le tourisme, notamment dans le transport touristique, avaient dénoncé un acharnement des sociétés de leasing qui les harcelaient voire même recouraient à la saisie des biens. La question a même été soulevée par des parlementaires lors du dernier passage de Mohammed Benchaâboun devant la commission des finances.
Conscient de la contrainte de ces opérateurs, le gouvernement a décidé d’appliquer un 2ème moratoire de juillet au 31 décembre 2020.
C’est dans sillage que Bank Al-Maghrib, précisément la direction de la supervision bancaire, a adressé une circulaire (dont nous détenons une copie) à l’Association professionnelle des sociétés de financement (APSF) l’informant de la prorogation du traitement dérogatoire consistant à suspendre les dotations aux amortissements des biens financés en crédit-bail ou location. Une mesure prise uniquement au profit des entreprises touristiques et leurs employés à titre exceptionnel et temporaire et qui sont dans une situation de difficulté.
Cette prorogation de la suspension des amortissements accordée par la banque centrale aux entreprises de crédit-bail est une première au Maroc. Une suspension des dotations aux amortissements est impérative pour les entreprises de leasing afin qu’elles puissent appliquer ledit report. Et pour cause, selon une source proche du dossier, ces entreprises tiennent deux comptabilités : une comptable/sociale en tant que loueur et l’autre financière en tant qu’établissement de crédit. Donc cette décision de BAM leur permet de corriger l’écriture comptable étant donné que la suspension des loyers inscrits dans la partie « produits » du compte produits et charges requiert la suspension également de la dotation à l’amortissement de la partie « charges ».
Du moment que les loyers ne seront pas perçus, l’entreprise ne doit pas passer l’écriture de l’amortissement pour maintenir l’équilibrer de son bilan financier. L’administration fiscale, en l’occurrence la DGI, a été informée de cette mesure afin d’en prendre compte au moment des vérifications. Sauf que l’accord des reports n’est pas automatique pour toutes les entreprises fait savoir notre source. Et d’enchaîner : « ça sera sur étude de dossier. L’entreprise ne doit en l’occurrence pas avoir des antécédents de recouvrement ».
Une autre question demeure posée : ce report des échéances va-t-il impliquer des intérêts intercalaires ?
Rappelons que la question avait suscité un tollé après une incohérence entre les décisions du CVE et leur application sur le terrain par les banques.
Le CVE avait fini par annoncer le 8 mai que les entreprises étaient tenues à payer des intérêts intercalaires générés par le report des échéances des crédits pour la période s’étalant entre mars et juin 2020.
Des intérêts qui seront également appliqués au report des remboursements des échéances leasing apprend-on de notre source. Des charges supplémentaires pour des entreprises qui n’arrivent toujours pas à voir le bout du tunnel.