Le Qatar a menacé de suspendre ses livraisons de gaz naturel liquéfié (GNL) à l’Union européenne en réaction à la législation du bloc sur la diligence raisonnable en matière de travail forcé et de dommages environnementaux, selon une lettre adressée par le Qatar au gouvernement belge et consultée par Reuters.
Le Qatar est le troisième exportateur mondial de GNL, derrière les États-Unis et l’Australie. Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022, il a fourni entre 12 % et 14 % du GNL consommé en Europe.
Dans une lettre datée du 21 mai et adressée au gouvernement belge, le ministre qatari de l’Énergie, Saad al-Kaabi, explique que son pays réagit à la directive européenne sur la diligence raisonnable en matière de durabilité des entreprises (CSDDD). Cette directive impose aux grandes entreprises opérant dans l’UE d’identifier et de corriger les atteintes aux droits humains et à l’environnement dans leurs chaînes d’approvisionnement.
« En termes simples, si d’autres modifications ne sont pas apportées à la CSDDD, l’État du Qatar et QatarEnergy n’auront d’autre choix que d’envisager sérieusement des marchés alternatifs hors de l’UE pour notre GNL et nos autres produits, qui offrent un environnement commercial plus stable et accueillant », indique la lettre.
Un porte-parole de la représentation belge auprès de l’UE a refusé de commenter la lettre, dont l’existence a été révélée pour la première fois par le journal allemand Welt am Sonntag.
La Commission européenne a également reçu une lettre du Qatar, datée du 13 mai, a confirmé un porte-parole de la Commission à Reuters, précisant que les législateurs et les États membres de l’UE négocient actuellement des modifications de la CSDDD.
« Il leur appartient désormais de négocier et d’adopter les modifications substantielles de simplification proposées par la Commission », a déclaré le porte-parole.
Bruxelles a proposé en début d’année des changements à la CSDDD afin d’en alléger les exigences : notamment en reportant son entrée en vigueur d’un an, à la mi-2028, et en limitant la portée des contrôles imposés aux entreprises sur leurs chaînes d’approvisionnement.
Les entreprises qui ne respecteraient pas la directive pourraient se voir infliger des amendes allant jusqu’à 5 % de leur chiffre d’affaires mondial.
Le Qatar juge toutefois que ces modifications restent insuffisantes.
Dans sa lettre, Kaabi exprime la vive préoccupation de Doha concernant l’obligation, prévue par la CSDDD, pour les entreprises d’adopter un plan de transition climatique aligné sur l’objectif de limiter le réchauffement mondial à 1,5 °C, conformément à l’Accord de Paris.
« Ni l’État du Qatar, ni QatarEnergy n’ont de plans pour atteindre la neutralité carbone dans un avenir proche », précise la lettre, qui estime que la CSDDD porte atteinte au droit des pays de fixer eux-mêmes leur contribution nationale aux objectifs de l’Accord de Paris.
Dans une annexe à la lettre, également consultée par Reuters, le Qatar propose de supprimer la partie de la CSDDD imposant l’élaboration de plans de transition climatique.
Kaabi est également directeur général de QatarEnergy. Le gaz qatari est lié par des contrats d’approvisionnement à long terme avec de grands groupes européens, dont Shell, TotalEnergies et ENI.
Get real time update about this post category directly on your device, subscribe now.