Le Réseau marocain des journalistes des migrations (RMJM) annonce la sortie de sa première étude relative au traitement médiatique des questions des migrations étrangères au Maroc, précisément de la presse écrite digitale marocaine. Pour le RMJM, cette étude n’est pas une fin en soi. C’est surtout un outil de plaidoyer et de sensibilisation des médias, de la société civile et du grand public pour une meilleure prise en compte des enjeux des migrations étrangères au Maroc. Cette première étude quantitative au Maroc sur cette thématique a été réalisée par Mohamed Karim Boukhssas, journaliste et professeur universitaire à l’Université de Moulay Ismail à Meknès.
Cette étude sur le traitement médiatique de l’immigration étrangère au Maroc a permis d’analyser le volume, l’étendu et la nature du traitement des questions de l’immigration étrangère dans la presse écrite et digitale marocaine. Le RMJM soumet cette étude au débat public, le plus large possible afin de se saisir de ces résultats pour les commenter et les approfondir. Cette étude a été réalisée en partenariat avec CCFD-Terres Solidaires.
Parmi les conclusions de l’étude :
Constat n°1 : Le traitement des questions de migration étrangère est réalisé avec une approche informative avec un ton neutre, sans recours à une démarche analytique ou de terrain.
85 % des contenus analysés appartiennent aux genres journalistiques « actualités », un chiffre qui reflète l’orientation des médias marocains vers une transmission rapide et neutre des nouvelles, mais sans approfondir le traitement journalistique.
Constat n°2 : L’étude a également relevé la présence de stéréotypes et de discours discriminatoires avec une focalisation sur la migration subsaharienne :
L’étude a noté l’usage de généralisations et l’insistance sur l’identité et l’origine de l’auteur du crime lorsqu’il s’agit de migrant.e.s. Le discours discriminatoire émerge dans les médias écrits, consistant à dramatiser la représentation des migrant.e.s en les dépeignant comme des éléments dangereux qui nécessitent une vigilance accrue.
Constat n°3 : La présence des femmes migrantes et des groupes vulnérables dans la couverture médiatique est quasiment inexistante :
L’étude révèle que la représentation des femmes migrantes est quasiment inexistante. Sur les 184 articles de l’échantillon, seuls trois les évoquent, représentant ainsi moins de 2 % de la couverture analysées.
Constat n°4 : Les sources citées dans les contenus se limitent très souvent à des sources officielles, avec une faible présence de sources diversifiées (ONG, experts)
L’étude montre que les sources officielles (responsables et documents émanant de sources officielles) constituent la majorité des intervenants dans la couverture des questions migratoires (45 %), suivi des experts (13,5%) et enfin les migrant.e.s sont invisibilisés avec 3% des citations dans les contenus.
Constat n°5 : Le traitement médiatique met davantage l’accent sur la migration irrégulière
L’étude constate la domination de contenus traitant de la migration irrégulière avec 72 % des articles consacrés à ce sujet. Les médias se concentrent sur les tentatives de migration clandestine aux frontières, que ce soit par voie terrestre ou maritime, ce qui est réducteur des migrations dans leur diversité.
Constat n°6 : La couverture médiatique accorde une attention particulière aux questions de sécurité et de contrôle des frontières.
« La sécurité et le contrôle des frontières » sont les thèmes les plus abordés dans la couverture médiatique marocaine, avec 49 % des articles analysés. Les sujets liant droits humains et migration représentent 17 % des couvertures, puis le thème de l’intégration des migrant.e.s est en troisième position avec 9 % des couvertures.