Écrit par Lamiae Boumahrou I
Malgré un fort potentiel et un gisement important, la valorisation des déchets au Maroc est encore à la traîne. Une réelle volonté politique et des prérequis sont nécessaires pour accélérer le rythme de la mise en place d’un écosystème vert. Un objectif pour lequel la COVAD milite depuis 2016.
Bien que le Maroc ait été précurseur dans plusieurs domaines environnementaux notamment le développement des énergies renouvelables, l’engagement pour lutter contre le changement climatique et développement durable, il accuse toutefois un retard en matière de valorisation des déchets.
En effet, sur un objectif de valorisation fixé à 25% à l’horizon 2019, le Maroc n’a valorisé qu’à peine 15%. Un taux faible alors que les enjeux environnementaux et économiques sont de taille. Ce constat s’explique clairement par le manque d’une volonté politique qui est impérative pour accélérer la locomotive de la valorisation des déchets.
Parmi les acteurs qui militent sur le terrain pour cette cause, la Coalition pour la Valorisation des Déchets (COVAD). Ayant la particularité de regrouper autour de la même table acteurs du secteur privé, de la société civile, ONG et instances gouvernementales notamment 3 ministères (Intérieur, Transition énergétique et Industrie), la COVAD joue un rôle majeur dans la promotion de l’économie circulaire au Maroc.
Think tank de concertation et de proposition, la COVAD milite, depuis sa création en 2016, pour l’émergence et la structuration des filières de valorisation et pour la promotion des pratiques d’économie circulaire à l’échelle nationale et régionale auprès de l’ensemble des secteurs.
Lors d’une rencontre avec les médias, Mounir El Bari, à la tête de la COVAD depuis juin 2021, a affirmé qu’il est désormais impératif d’accélérer le rythme de la création d’un réel écosystème vert. Et pour cause, le Maroc s’apprête à abriter la Coupe du monde en 2030, il va bien falloir être à la hauteur des attentes à tous les niveaux y compris sur le plan environnemental.
Selon une étude sur l’écosystème vert commanditée par le ministère de l’Industrie, l’État devrait se doter d’une vision globale pour promouvoir un écosystème vert performant permettant de valoriser 65% des déchets et générer 60.000 emplois à horizon 2030 dont 9.500 emplois dans la valorisation.
Cela passe par la mise en place d’un cadre attractif pour l’émergence d’un écosystème vert de valorisation de déchets dans le cadre d’une économie circulaire permettant de générer de l’emploi pérenne et d’améliorer la balance commerciale avec un impact positif sur l’environnement.
Il faut dire que le manque à gagner est énorme. En effet, l’écosystème vert pourrait générer un chiffre d’Affaires de 12,2 Mds de DH et une valeur ajoutée de 3,7 Mds de DH dans la valorisation.
Toutefois, l’État, outre la volonté politique, devrait mobiliser 8,7 Mds de DH d’investissements pour des projets de différentes tailles (TPE, PME, GE). Il va falloir également faire un effort considérable pour faire basculer le secteur informel vers le formel. Car nul n’est sans savoir que le taux d’informel dans ce domaine est très élevé.
Et pourtant, le gisement est là, le potentiel de valorisation est important et surtout les acteurs privés sont prêts à investir.
En effet, selon la même étude 36 projets de valorisations ont été priorisés notamment dans les filières plastique, papier&carton, métaux non ferreux, textile, huiles alimentaires usées, pneus usés ; déchets des équipements informatiques et de télécommunications…
Malheureusement, le lancement desdits projets est conditionné par la mise en place de prérequis sur toute la chaine de valeur. Des prérequis qui peuvent être regroupés en 7 chantiers : l’approvisionnement en amont, le foncier, la formation, la normalisation et l’appui financier des projets, ainsi que la réglementation
Quid de l’engagement de la COVAD ?
Comme souligné plus haut la COVAD joue un rôle important pour faire bouger les choses. Sous la présidence de Mounir El Bari, la COVAD a axé sa feuille de route sur six axes stratégiques, que sont la gouvernance, la régionalisation, le rayonnement des industries de recyclage, l’innovation et l’entrepreneuriat vert, l’inclusion sociale, et la fiscalité verte.
Pour se doter des moyens nécessaires à la mise en œuvre de sa feuille de route, Mounir El Bari a fait le choix de commencer par positionner la Coalition comme acteur de premier plan au sein des écosystèmes de l’économie circulaire. Pour cela, le bureau a renforcé la présence de la Coalition tant sur la scène nationale qu’internationale en participant activement à des événements tels que les COP, les World Circular Economy Forums, les salons spécialisés en Europe ou encore les conférences nationales.
Aujourd’hui, sans équivoque, la Coalition a su s’imposer en Top of Mind auprès de toutes les parties prenantes privées et publiques et de la société civile sur les thématiques et enjeux de la feuille de route pour l’économie circulaire au Maroc. Elle a su gagner la confiance et l’estime de ce qu’elle considère être aujourd’hui ses Ministères de Tutelle, à savoir, les Ministères de la Transition Énergétique et du Développement Durable, du Commerce et de l’Industrie, ainsi que le Ministère de l’Intérieur.
Sa forme de gouvernance unique en son genre qui prône l’intérêt général et le PPP lui a également permis de se placer en tant que partenaire de choix auprès des instances internationales tels que l’ONUDI, le PNUE, Chatham House, et d’autres fondations internationales.
Zoom sur les projets et réalisations clés
Depuis 18 mois maintenant, la COVAD œuvre sur tous les fronts : la gouvernance du secteur, la réglementation, la lutte contre la pollution mais aussi la montée en compétences des acteurs.
Ces chantiers phares sont notamment :
Sa contribution au Programme PAGE Partnership for Action on Green Economy en collaboration étroite avec le MTEDD et le MCI et des agences internationales telles que l’ONUDI et l’UNITAR. Ce programme, axé sur le renforcement des capacités et la gestion durable des déchets, met un accent particulier sur les déchets de construction et de démolition.
La COVAD mène actuellement deux études stratégiques en collaboration avec le Ministère de la Transition Écologique et du Développement Durable (MTEDD) et le Programme des Nations Unies pour l’Environnement, dans le cadre de l’initiative SwitchMed.
Ce partenariat, établi depuis le début de 2023, se concentre sur deux projets majeurs :
- L’élaboration d’une étude de préfiguration d’une filière de Responsabilité Élargie du Producteur (REP) appliquée aux emballages. Celle-ci vise à jeter les bases pour le développement d’un cadre réglementaire pour la gestion responsable des emballages, aligné avec les principes de l’économie circulaire.
- La préparation d’un projet de loi relatif à l’économie circulaire en vue d’améliorer l’efficacité dans l’utilisation des ressources, à protéger l’environnement et à promouvoir le développement durable. Ce projet de loi viendra en continuité des orientations et des objectifs stratégiques du Maroc, conformément à la Loi cadre 99-12 portant Charte Nationale de l’Environnement et du Développement Durable.
Sur le plan des politiques publiques et de la compétitivité des industries nationales, notamment celles faisant appel aux emballages plastique, la COVAD est également partenaire du programme Switch to Circular Economy Value Chains, financé par l’Union Européenne et mené en partenariat avec le Ministère des Affaires Étrangères du Gouvernement Finlandais, et mis en œuvre par l’ONUDI en partenariat avec la Banque Européenne d’Investissement le think tank anglais Chatham House.
Notons que la Coalition est également membre du Comité de Pilotage Maroc dans le cadre des négociations internationales, portée par l’Assemblée des Nations Unies pour l’environnement, pour la mise en place d’un instrument international juridiquement contraignant visant à mettre fin à la pollution plastique.