La fiscalité des associations reconnues d’utilité publique n’obéit pas à l’objectivité souhaitée en matière de neutralité concurrentielle et d’équité.
En cause lesdites associations bénéficient des avantages fiscaux contrairement aux agences d’événementiel privées.
Pour ceux qui prétendent qu’un festival comme Mawazine ne pèse pas sur le Budget de l’Etat, la réalité est tout autre.
Le mouvement du boycott qui a frappé de plein fouet, il y a quelques mois, des marques historiques de produits n’a pas exclu le festival Mawazine, organisé chaque année par l’association Maroc culture. Une association reconnue d’utilité publique.
En cause, dans un contexte marqué par la cherté et la hausse du coût de la vie, les citoyens marocains n’ont pas le cœur pour les festivités. Ils dénoncent à ce titre le fait que ces festivals se traduisent par des dépenses exorbitantes dont une économie telle que la nôtre, qui n’arrive pas à s’inscrire dans un sentier de croissance inclusive, n’en a vraiment pas besoin. Les appréhensions fusent de partout et beaucoup d’encre a coulé des semaines durant sur les dépenses engagées, les cachets que perçoivent les chanteurs aussi bien marocains qu’étrangers.
Face à de tels propos, l’association Maroc Culture, organisatrice de l’évènement répond : « Mawazine est parmi les rares festivals qui ne dépend pas des ressources financières publiques. C’est un festival indépendant dont le modèle économique se base sur des revenus des ventes de tickets et le sponsoring d’entreprises privées ».
Des propos qui certes ne laissent pas de place au doute. Toutefois, cela n’empêche pas de dire que les fonds privés accordés dans le cadre du sponsoring constituent un manque à gagner pour le budget de l’Etat. Comment ? Dans le code général des impôts, les dons en argent ou en nature octroyés aux associations reconnues d’utilité publique, qui œuvrent dans un but charitable, scientifique, culturel, artistique sont des charges déductibles. Autrement dit, ces charges sont retranchées des résultats enregistrés par la société donatrice. Et donc qui dit baisse des résultats, dit baisse de l’impôt sur les sociétés. Il s’agit même d’une dépense fiscale devant faire même l’objet d’appréciation, dans le cadre du rapport annuel sur les dépenses fiscales faisant corps avec la Loi de Finances.
Contrairement à ce que prétend l’association Maroc Culture, l’organisation du festival Mawazine dépend indirectement de l’avantage fiscal accordé aux donateurs et, par ricochet, des ressources financières publiques qui pèsent lourdement sur le Budget de l’Etat.
Deux poids, deux mesures
Aussi, force est de signaler que contrairement aux fondations ou associations telles que l’association Maroc culture, les agences de l’événementiel ne bénéficient pas d’une telle faveur dans la mesure où lorsqu’elles perçoivent des fonds privés, ces derniers ne sont pas déductibles. C’est dire qu’il s’agit d’un autre cas de figure où la neutralité fiscale est biaisée.
La fiscalité est ainsi devenue un moyen de distorsion entre deux opérateurs économiques réalisant les mêmes prestations.
Autre élément caractérisant cette distorsion, réside dans le non-assujettissement des recettes des associations à but non lucratif à la TVA. En effet, le CGI prévoit que sont exonérées de la taxe de la valeur ajoutée, les prestations fournies par les associations à but non lucratif reconnues d’utilité publique… Or, des agences d’événementiel se voient appliquer ladite taxe dans l’ignorance de l’équité et de la justice fiscale. Une telle distorsion mérite réparation.
Quid de la fiscalité des cachets ?
Autre élément ayant suscité les appréhensions de l’opinion publique réside dans les cachets attribués aux artistes. En effet, les montants communiqués constituent la face apparente de l’iceberg.
D’après le CGI, le montant brut des cachets octroyés à titre individuel ou constitués en troupes est soumis à la retenue à la source au taux de 30% après application d’un abattement forfaitaire de 40%. Donc les rémunérations des artistes sont nettement supérieures à celles déclarées et qui enragent l’opinion publique. A ce titre, nous sommes en mesure d’interroger ces associations sur la réalité des déclarations fiscales et sur la légitimité de l’application de l’abattement de 40% alors que l’essentiel des revenus salariaux de simples Marocains n’en bénéficient qu’à hauteur de 17%. Il s’agit donc d’une fiscalité favorable à l’art qui chouchoute bien les artistes.
Une chose est sûre : ces associations telles que Maroc culture et autres qui ont pendant des années bénéficié de plusieurs avantages fiscaux, leur permettant de constituer une solide assise financière, il est temps pour elles de payer les impôts et contribuer correctement au budget.