Un modèle de développement peut être défini comme un grand puzzle constitué de quatre grandes composantes. Ces composantes sont les suivantes : celle économique, celle sociale, celle relative au système de valeurs et celle institutionnelle. Pour réformer ce puzzle, il serait bien évidemment nécessaire de réformer chacune de ses composantes précitées.
Lors des précédents entretiens, l’économiste Omar Bakkou nous a présenté les propositions de la Commission Spéciale sur le Modèle de Développement(CSMD) pour la réforme des composantes économique, sociale et celle relative au système des valeurs. Dans le présent entretien, nous allons interroger Omar Bakkou sur les propositions de la CSMD pour la réforme de la composante institutionnelle.
-Quelles sont les principales propositions de la CSMD pour réformer notre modèle institutionnel ?
En principe, tous les plans stratégiques comprennent deux volets.
Le premier volet comprend les aspects relatifs aux objectifs.
Quant au second volet, il englobe les aspects relatifs aux instruments préconisés pour la réalisation de ces objectifs.
Les instruments comprennent eux même en théorie deux composantes : une première relative aux actions nécessaires pour la concrétisation desdits objectifs et une seconde relative à l’organigramme de mise en œuvre de ces actions.
L’organigramme désigne le schéma représentatif des liens fonctionnels entre les individus d’une organisation (qui doit faire quoi).
Le rapport sur le NMD ,qui constitue un plan stratégique destiné à imprimer une forte inflexion à la trajectoire du développement du Maroc, obéit à la même logique indiquée ci-dessus.
En effet, ce rapport a défini les objectifs, les actions nécessaires pour leur réalisation et les orientations générales concernant l’organigramme de mise en œuvre de ces actions.
Ainsi, alors que les objectifs et les actions ont été bien explicités dans les précédents entretiens, reste maintenant l’organigramme.
Bien entendu à l’échelle d’un pays, le terme consacré pour qualifier le schéma représentatif des liens fonctionnels entre les individus n’est pas l’organigramme, mais plutôt « le modèle institutionnel ».
Le modèle institutionnel comprend trois principales composantes : l’Etat, le secteur privé et le secteur intermédiaire.
Pour revenir à votre question, effectivement le rapport sur le NMD a émis un ensemble de propositions pour réformer notre modèle institutionnel.
– Quelles sont alors ces propositions ?
Les propositions émises par le rapport sur le NMD pour réformer notre modèle institutionnel sont intimement liées aux objectifs et aux actions définis par ce rapport.
En effet, le rapport précité a défini pour chacune des composantes de notre modèle institutionnel le rôle qu’elle doit jouer pour la réalisation des objectifs et des actions de ce modèle.
Cela signifie que ledit rapport a défini pour les trois composantes précitées le rôle qu’elle doit jouer pour la réalisation des objectifs et des actions de notre modèle économique, social et de celui des systèmes de valeurs.
–Quel est alors le rôle assigné à l’Etat pour la réalisation des objectifs du NMD ?
Le rapport de la CSMD a confié un rôle central à l’Etat pour la réalisation des objectifs du NMD.
Ce rôle est qualifié de central en raison de ce que ce rapport considère que l’Etat est le garant de la réalisation des objectifs de ce modèle.
Pour ce faire , le rapport de la CSMD considère que l’ Etat doit être porteur d’une vision pour le pays et doit veiller à sa mise en œuvre.
A cet effet, l’Etat doit être capable d’administrer et de gérer en cohérence avec un cap défini par cette vision.
–Vous avez présenté le rôle assigné à l’Etat d’une manière générale. Or on sait que l’Etat comprend plusieurs composantes : gouvernement, administration, parlement, entreprises publiques, collectivité locales.
Oui effectivement le rapport de la CSMD a précisé le rôle que doit accomplir chacune des composantes de l’Etat pour la réalisation des objectifs du NMD.
-Quel est le rôle assigné au gouvernement ?
Selon le rapport de la CSMD, le Gouvernement est responsable de la conception des politiques publiques et de la mise en œuvre de ces politiques.
A cet effet, il doit veiller à l’alignement et la coordination horizontale de son action, entre les différents ministères et institutions sous son contrôle.
-Quid du rôle de l’administration publique ?
Selon les termes du rapport de la CSMD, le rôle de l’administration consiste dans la mise en œuvre des politiques publiques, leur suivi , leur exécution et leur régulation.
Elle doit progressivement confier les missions publiques d’exécution à des structures autonomes ou de les déléguer selon une approche contractuelle.
-Et le parlement, quel est son rôle au sein de l’appareil de l’Etat ?
Le Parlement joue deux principaux rôles : un rôle législatif ( l’élaboration des lois) et un second rôle de contrôle de l’action du gouvernement.
–Et les entreprises publiques, quel rôle leur a été fixé par le rapport sur le NMD ?
En principe, à l’instar des administrations publiques, le rôle des entreprises publiques consiste dans la mise en œuvre des politiques publiques.
Au Maroc, ce rôle peut être qualifié à la fois de central et de particulier.
Il est qualifié de central au regard des deux principales considérations suivantes :
– D’une part, les secteurs stratégiques dans lesquels les entreprises sont présentes (eau, électricité, énergie, infrastructure, transport, logistique, etc.) ;
– Et, d’autre part, le volume des investissements réalisés par lesdites entreprises (plus de la moitié des investissements publics).
Ce rôle est par ailleurs qualifié de particulier dans la mesure où les entreprises publiques sont responsables dans certains secteurs d’activité économique de la conception et de la mise en œuvre des politiques publiques.
En effet, les plans de développement de ces entreprises ont été érigés, dans ces secteurs, en stratégies sectorielles.
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