Réalisé par Soubha Es-Siari I
La situation actuelle des finances publiques est due à la succession des crises, à la mondialisation, à une évasion fiscale colossale… Ajoutons à cela l’intelligence artificielle qui est utilisée de façon positive mais également négative en facilitant l’évitement de l’impôt. Bref le modèle de gouvernance actuel que ce soit au Maroc, en France ou ailleurs n’est pas adéquat avec le monde actuel dans lequel nous vivons. Les détails avec Michel Bouvier, président de Fondafip, professeur émérite de l’Université Panthéon-Sorbonne, dans ce podcast.
La 16e édition du colloque International organisé par le Ministère de l’Economie et des Finances et FONDAFIP sous le thème « Vers une meilleure restructuration du modèle de la gouvernance financière publique au Maroc et en France » se veut un moment fort pour identifier les solutions et voix de restructuration pour permettre à l’Etat de jouer son rôle dans un contexte très contraignant.
Si il y a deux ans de cela, Michel Bouvier président de Fondafip avait annoncé que le monde est dans un brouillard en matière de gouvernance des finances publiques et ne peut continuer à bricoler, ce constat est, selon le professeur émérite, toujours d’actualité.
Ce colloque est l’étape supérieure de la réflexion sur cette question parce que depuis 1973-79, nous avons eu beaucoup de chocs, les subprimes, la crise sanitaire et aujourd’hui une crise géopolitique qui engendre des problèmes d’inflation, des coûts de l’énergie… Tout cela fait avec la transition écologique qui s’affirme de plus en plus impérative, des dépenses supplémentaires qui viennent s’ajouter à celles déjà existantes, elles aussi importantes. Or nous constatons que notre modèle de gouvernance actuel n’est pas capable d’assumer le monde tel qu’il est aujourd’hui.
La situation actuelle des finances publiques est due à la succession des crises, à la mondialisation, à une évasion fiscale colossale… Ajoutons à cela l’intelligence artificielle qui est utilisée de façon positive mais également négative en facilitant l’évasion fiscale. L’ensemble de ces éléments participent à une crise des finances publiques beaucoup plus colossale que celle des crises connues auparavant. Nous sommes face à un système des finances publiques qui s’est morcelé pour essayer de répondre aux multiples crises. D’où le constat qu’aujourd’hui, il faut coordonner entre les différents acteurs.
Pour Michel Bouvier : « La restructuration du modèle de gouvernance financière publique n’est pas toujours facile à analyser car outre le fait que les finances publiques forment un système complexe aux multiples dispositifs, ces derniers relèvent d’époques et de logiques différentes qui se côtoient ou s’imbriquent plus ou moins bien les uns dans les autres ».
Il rappelle dans la foulée : « la crise pétrolière et les difficultés économiques qu’elle provoqua eurent un effet déclencheur d’un changement total de paradigme intellectuel. Furent alors remis en cause les postulats théoriques des politiques budgétaires et financières qui jusque-là prédominaient. Le signal était donné de la réalisation de profonds changements dans le mode de gouvernance des finances publiques. De nombreux écrits évoquèrent alors ce qui était devenu une évidence : la crise de l’Etat-providence ».
Cet Etat qui fut reconstructeur puis développeur est à partir de la seconde moitié des années 1970 en grande difficulté, il subit une crise de ses finances et une crise de confiance. Il n’est plus en mesure d’être le fer de lance du développement économique et social. Autrement dit, il ne peut plus porter seul des projets d’envergure face à un environnement national et international qui s’est complexifié avec la mondialisation, la montée en puissance de l’individualisme et des corporatismes, mais aussi l’effritement du sens de l’intérêt général.