Ecrit par Lamiae Boumahrou I
L’Etat a prévu dans le cadre de l’exercice 2024, des recettes de 9 Mds de DH du programme de privatisation et de cession d’actifs. 7 mois après, l’Etat n’a réalisé que 18% des objectifs fixés dans la LF 2024 grâce à la concrétisation de l’opération de cession d’actifs de l’hôtel La Mamounia à l’OCP pour la bagatelle de 1,7 Md de DH.
Il a fallu presque 6 ans, depuis l‘inscription sur la liste des sociétés privatisables de la Société d’exploitation de l’hôtel de la Mamounia en décembre 2018 soit après de la loi 91.18 modifiant et complétant la loi 39.89 autorisant le transfert d’entreprises publiques au secteur privé, pour voir la concrétisation de l’opération de cession.
En effet, bien qu’il n’y ait pas eu de communication officielle, les médias ont fait écho de l’opération de cession des parts de l’Etat dans la Mamounia à l’OCP pour une enveloppe de 1,7 Md de DH.
L’OCP aurait remporté l’appel d’offres lancé pour cette opération de cession et devient ainsi l’actionnaire majoritaire après que l’ONCF (constructeur et détenteur de plus de la moitié des parts) ait cédé ses parts. En passant sous le giron de l’OCP, La Mamounia, joyau du patrimoine marocain et 2ème meilleur établissement hôtelier de luxe au monde, change de propriétaire mais pas d’identité.
La concrétisation de cette opération s’inscrit dans la stratégie de l’Etat de redynamiser cet outil et ainsi renflouer ses caisses.
Faut-il rappeler que le budget de l’Etat est sous pression en raison des chantiers sociaux budgétivores lancés par le gouvernement dans le cadre de l’instauration d’un état social. 25 Mds de DH pour le programme d’aide sociale directe (2024), 9,5 Mds de DH pour le programme d’aide au logement (2024), 9,5 Mds de DH pour le financement de AMO Tadamoun (2024), 10 Mds de DH pour honorer les engagements de l’Etat dans le cadre du dialogue social (2024), 120 Mds de DH (sur 5 ans) pour le programme de reconstruction et de mise à niveau générale des régions sinistrées par le séisme d’Al Haouz…, tels sont les budgets à mobiliser de la concrétisation des programmes sociaux.
Le programme de privatisation et de cession d’actifs est sans doute un moyen pour mobiliser davantage de ressources et honorer les engagements pré-cités. Malheureusement, après la relance du programme en 2018, il n’y a pas eu d’opérations de privatisation. Seulement quelques opérations de cession d’actifs. En effet, le programme de privatisation avait prévu dans la LF des finances 2022 la réalisation d’une recette globale de 8 Mds de DH au budget général de l’Etat dont 3 Mds de DH pour les cessions d’actifs et 5 Mds de DH pour les opérations de privatisation.
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Or aucune opération de privatisation ni de cession d’actifs n’ont été concrétisées en 2022 raison pour laquelle l’enveloppe a été reprogrammée dans l’exercice 2023.
Là encore, aucune opération de privatisation n’a été réalisée. Quant aux cessions d’actifs, le rapport sur les établissements et entreprises publics PLF2024 a précisé que 3 opérations seront envisagées pour un montant total de 2,88 Mds de DH.
L’exercice 2023 s’est toutefois soldé avec une seule opération de cession d’actifs sur les 3 prévues à savoir la cession de la totalité de la participation de l’Etat dans le capital de la « Société d’aménagement et de développement de Mazagan », filiale du groupe OCP, pour un montant de 1,6 Md de DH.
C’est donc la 2ème opération d’acquisition de l’OCP dans le cadre du programme de privatisation et de cession d’actifs. L’Etat aurait ainsi réalisé sur les 2,88 Mds de DH prévus pour l’exercice 2023 une enveloppe de 1,6 Md de DH soit plus de 55% des prévisions de cession d’actifs prévus dans la LF 2023.
Pour l’exercice en cours, soit 2024, l’Etat vient de concrétiser la première opération de cession d’actifs pour une enveloppe de 1,7 Md de DH sur une recette prévue de 9 Mds de DH (privatisation et cession d’actifs). A 7 mois, le gouvernement n’aurait réalisé que 18% des objectifs fixés. Il manque à l’appel environ 7,3 Mds de DH à mobiliser dans le cadre de ces opérations.
Rappelons que pour l’exercice 2024, le gouvernement avait revu à la hausse d’1 Md de DH les projections de ce programme portant le montant de 8 Mds de DH en 2022 et 2023 à 9 Mds de DH en 2024.
La question est aussi de savoir où en est la refonte du régime des privatisations prévue dans le cadre de la loi-cadre n° 50-21 promulguée en date du 26 juillet 2021 relative à la réforme des Établissements et Entreprises Publics.
Cette refonte permettra, rappelons-le, de moderniser et de mettre à niveau le dispositif existant à même d’optimiser les opérations de capital et de favoriser le désengagement de l’Etat des activités concurrentielles.
Le rapport sur le secteur des Etablissements et Entreprises Publics (EEP) le PLF 2024 a précisé que parmi les quatre textes législatifs prévus par ladite loi-cadre celui de la mise en place d’un régime des privatisations qui est en cours de finalisation par l’Agence Nationale de Gestion Stratégique des Participations de l’Etat et de suivi des performances des EEP (ANGSPE) en concertation avec les parties prenantes.