Ecrit par Imane Bouhrara I
Le taux de chômage des jeunes (15-24 ans) dans la région MENA est le plus élevé au monde oscillant autour de 26% selon la Banque mondiale. Ce taux est de 33,6% au Maroc au T2 2023 selon le HCP. Cette tendance périlleuse n’a que trop duré.
Il est attendu dans les prochains jours que le HCP livre les dernières données du marché de l’emploi et le taux d’activité et de chômage au Maroc au T3 2023.
Et autant s’attendre, trois ans après les perturbations majeures du Covid mais aussi en raison du contexte actuel, à ce que le marché du travail soit toujours en rémission.
Surtout pour les catégories de populations qui notent des tendances structurelles de chômage depuis des décennies, particulièrement les jeunes de 15 à 24 ans qui représentent 16,1% de la population marocaine en 2023, selon le HCP.
Sur près de 6 millions de jeunes que compte le Maroc, près de 4,5 millions sont en dehors du marché du travail soit plus de 76% des jeunes ! Et quelque 7,6% de ces 6 millions, étaient à la recherche d’un emploi (448.000) selon les données 2022 du HCP.
le chômage des jeunes est un chômage de longue durée et de première insertion. En effet, 70,4% des jeunes chômeurs sont en chômage depuis un an ou plus, et près de trois quarts n’ont jamais travaillé (73,4%).
C’est énorme lorsqu’on évoque comme atout du Maroc sa population jeune et l’importance de cette fenêtre démographique pour le développement et l’essor du pays.
Et la situation qui devient chronique ne semble pas près d’évoluer et cela est préoccupant.
Certes, il faut remonter quelques années en amont pour comprendre comment nous avons évolué vers cette situation mais surtout entrevoir les axes prioritaires d’action pour inverser cette morbide tendance et ouvrir de nouveaux horizons pour les jeunes.
Au Maroc et pendant longtemps, le secteur public a été le plus gros pourvoyeur d’emplois et pendant que l’État fermait graduellement les vannes, le secteur privé n’a pas su ou n’a pas pu prendre le relais et créer suffisamment d’emplois encore moins de postes de qualité.
Idem pour les candidats au marché du travail, pendant longtemps et aujourd’hui encore, beaucoup croient dur comme fer à leur droit à la fonction publique.
L’une des difficultés fondamentales également est la structuration du marché, de sorte à ce que l’offre et la demande puissent se rencontrer sans oublier la fatidique incompatibilité entre l’offre et la demande…
Le taux de chômage des jeunes de 15 à 24 ans titulaires d’un diplôme de niveau supérieur s’élève à 61,2%. Il est de 30,4 % pour les jeunes détenteurs d’un diplôme de niveau moyen et de 12,9% pour ceux n’ayant aucun diplôme. Autrement dit, plus le niveau d’instruction est élevé plus la probabilité de se retrouver au chômage augmente…
Ces sont des facteurs qui existent depuis très longtemps mais qui semblent avoir été perdus de vue.
Ce qui explique en grande partie pourquoi près de 3 chômeurs sur 10 (29,7%) sont des jeunes particulièrement des citadins (75,8%).
Est-ce un vœu d’échec des politiques publiques en la matière ? Telles qu’elles sont conçues aujourd’hui, la réponse est évidemment oui, car les chiffres démontrent le peu de pertinence des politiques à ce jour, que ce soit pour l’emploi que l’auto-emploi.
Parce qu’elles tendent à créer de l’emploi tous azimuts sans réel effet de synergie et sans s’attarder sur les principaux déterminants du chômage des jeunes au Maroc.
Aujourd’hui, il s’agit de faire le bilan de toutes les initiatives, leur convergence et leur efficience en la matière et partant de là les ajuster en faveur de l’emploi des jeunes. La littérature sur les pistes à suivre sont pléthores pour ne citer que le nouveau modèle de développement.
Il ne va également de la pérennité du projet d’État social au Maroc qui prévoit des aides sociales directes mais aussi dans un second temps des indemnités perte d’emploi de sorte à ce que le renforcement de l’employabilité des jeunes allège le coût financier d’un tel programme pour l’État.
Mais surtout permettre à ces jeunes une fois actifs, d’envisager un projet de vie et trouver une place dans une société qui espère tendre à plus d’égalité.
L’ajustement du marché du travail ne doit pas également perdre de vue l’importance d’amélioration des conditions du travail pour les jeunes actifs pour en réduire la précarité sociale et économique.