La journée du 12 mars était un non événement au Maroc, pourtant entrait enfin en vigueur la loi 31-13, qui instaure le droit d’accès à l’information. Beaucoup d’entités concernées sont en retard sur la mise en conformité et le chef de gouvernement doit accélérer la création de la commission dédiée.
Un an après sa publication au Bulletin officiel n°6655 du 12 mars 2018 et conformément à son article 30, la loi 31-13 relative au droit d’accès à l’information est entrée en vigueur ce 12 mars 2019 ! Mais concrètement, qu’est ce qui a changé en une année entre sa publication et son entrée en vigueur ? L’on est presque tenté de dire « rien » « niet », « walou » ! Le public concerné semble ignorer l’importance de cette loi dans l’exercice de la citoyenneté et l’instauration de l’Etat de droit.
Et pourtant, ce chantier qui a 14 ans aux compteurs doit instaurer un droit constitutionnel (Article 27) : avoir accès à l’information détenue par les administrations publiques, les institutions élues et les commissions en charge de secteur public. D’ailleurs, du 12 mars 2018 et 12 mars 2019, la Chambre des Conseillers, celle des Représentants, les administrations publiques, les tribunaux, les collectivités territoriales et toute personne morale de droit public, toute autre institution ou organisme de droit public ou privé investi de mission de service public et les institutions et les instances prévues au titre XII de la Constitution. Non seulement le nombre des institutions et organismes visés par cet article 2 est jugé insuffisant par les experts de la question puisqu’il doit intégrer tout organisme qui profite de l’aide de l’Etat ou encore les entreprises ayant une activité qui peut impacter l’environnement ou la santé publique… de plus ces organismes disposaient d’une année pour se mettre en conformité avec la loi, comme dispose l’article 2 de ladite loi.
En réalité, sauf exception et erreur de notre part, presque aucun progrès n’a été enregistré dans ce sens, puisque contactés par nos soins certains responsables de com’ de certaines entités publiques semblent dubitatifs et tombent des nues lorsqu’on les questionne sur la mise en place d’un dispositif pour répondre aux demandes d’informations du public, qu’il s’agisse de particuliers ou de professionnels.
L’Article 12 de la loi 31-13 stipule que « Toute institution ou organisme concerné doit désigner une ou plusieurs personnes qui seront chargées de la mission de recevoir les demandes d’accéder à l’information, de les étudier et de fournir les informations demandées, ainsi que d’apporter l’assistance nécessaire, le cas échéant, au demandeur de l’information dans l’établissement de sa demande ».
Il existe dans ce sens une confusion, pas chez tous fort heureusement, entre relations presse, relations publiques et services de communication. Il existe également un gap entre certaines institutions qui semblent déjà en avance en matière de mise en ligne régulière d’informations relatives à leurs actualités, les évolutions réglementaires les concernant, leurs missions et services, la documentation…
Aussi, ces organismes sont-ils tenus à la lumière de l’article 13 de fixer par des circulaires internes les modalités d’exercice de la personne ou des personnes en charge de veiller au respect du droit d’accès à l’information ainsi que les instructions à respecter afin d’être en conformité avec la loi. La seule réponse que l’on a obtenu des rares personnes étant joignables ces temps-ci, « c’est en cours ».
De même, qu’aucune annonce n’a été faite concernant la création auprès du Chef de gouvernement de la commission du droit d’accès à l’information pour veiller à la mise en application de la loi 31-13. Son conseiller étant resté injoignable une source sure nous a révélé que c’est toujours en cours. D’autant plus que cette commission devra être présidée par le Président de la Commission nationale de contrôle et de protection des données à caractère personnel, lui-même sur un grand chantier non de moins importance, à savoir le renfoncement des mécanismes de protection des données à caractère personnel conformément aux orientations royales de novembre dernier.
La société civile et les professionnels des médias convaincus que ce droit est « un tremplin vers d’autres droits » sont déjà à demander l’amendement de la loi avant même son entrée en vigueur, puisque ses lacunes limitent l’effet attendu de cette loi. Et dans un premier temps, comme gage de bonne foi ils estiment nécessaires que cette transparence soit respectée dans la mise en place de la loi, les budgets alloués, la publication de la liste complète des institutions et établissements publics et privés concernés par la loi… et surtout vulgariser ce droit au grand public. Autrement, cette loi rejoindra la longue liste de lois poudre aux yeux.
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