Au départ, apparu en relation avec les préoccupations environnementales mondiales jugées prioritaires suite au changement climatique frappant la planète, le paradigme du développement durable est aujourd’hui la base d’édification des politiques publiques à travers le monde.
Des origines …
Tout d’abord, c’est dans un contexte sombre, dénonçant l’empreinte de l’activité humaine sur l’équilibre des écosystèmes et l’altération de la biodiversité, que le concept a commencé à se forger.
Il a ainsi été le porte-drapeau des ONG[1] environnementales dans les années 1970. Ces dernières se sont mises à dénoncer les limites de la société moderne de consommation, et de l’usage inconscient des innovations technologiques ayant débouché sur le gaspillage des ressources naturelles, la pollution et la disparition des espèces.
Effectivement, les révolutions industrielles du 18ème et 19ème siècle et leurs innovations techniques ont été l’élément déclencheur de la poursuite d’une croissance économique illimitée, se nourrissant des découvertes scientifiques pour davantage de performance économique.
A cet égard, le modèle de développement industriel a été édifié sur une idéologie productiviste recherchant l’amplification du profit, et l’accumulation de la richesse matérielle sans évaluer les conséquences de l’usage des nouvelles technologies.
Tout en n’occultant pas que les techniques d’intensification de la production agricole et industrielle ont évincé à bien des égards des pénuries et des manques de toute sorte, assurant l’amélioration des conditions de vie d’une grande partie de la population mondiale, il y a tout de même lieu de soulever les biais de ce modèle de croissance par rapport à de nombreux aspects.
Aujourd’hui, il est reconnu officiellement que l’activité humaine a provoqué le dérèglement climatique et des évènements météorologiques extrêmes. Du reste, le dernier rapport du GIEC[2] le confirme avec certitude à plus de 90%. Ce qui est à l’origine de la dégradation de l’état de la planète dans toute sa dimension, qui doit pourtant assurer la survie de l’humanité.
Une nouvelle vision du monde….
Alors, il est apparu que la panacée se trouve dans la démarche d’un nouveau modèle de développement durable, à même de limiter l’impact néfaste de l’évolution du climat sur la croissance économique à long terme.
Défini officiellement en 1987 dans le rapport Brundtland[3], le développement durable est reconnu sur le plan international, comme le développement qui permet de satisfaire les besoins des générations actuelles, sans compromettre la capacité des générations futures à satisfaire les leurs.
En effet, le développement durable serait le fondement d’une croissance verte et inclusive car il est présenté comme une démarche qui concilie la progression de la production dans un cadre de préservation de l’environnement, et un esprit de redistribution équitable des richesses selon des valeurs éthiques, à savoir la responsabilité partagée et la solidarité intergénérationnelle.
A travers ce dispositif, le déséquilibre actuel des relations entre les hommes d’une part, et entre l’homme et la nature d’autre part pourrait être contrecarré.
En effet, il est constaté que les inégalités entre pays pauvres et riches s’aggravent du fait d’une mauvaise répartition des richesses, les problèmes du chômage s’accroissent, la sécurité alimentaire et hydrique est menacée, l’état sanitaire des populations est affecté, les migrations de population s’amplifient, l’état des villes des pays en développement est défaillant en services urbains.
En somme, tous les secteurs sont impactés économiquement par les effets du changement climatique : l’agroalimentaire, les transports, la santé, la construction, le tourisme, la banque et la finance, l’investissement et l’assurance. En conséquent, un ralentissement de l’activité économique aurait donc lieu se traduisant par une croissance plus faible, une hausse du chômage et une augmentation de l’endettement privé.
En conséquent, les coûts du changement climatique apparaissent bien pesants, et leur gestion peut sembler problématique au regard des besoins en financement nécessaires pour le déploiement d’actions de limitation des émissions de gaz à effet de serre, et d’adaptation au réchauffement de la terre,
Dans ce cadre, il semble bien que la question à soulever est celle relative à l’arbitrage entre la croissance du PIB, et la lutte contre le réchauffement climatique, notamment dans les pays en voie de développement.
Quelle serait alors la meilleure voie à prendre par les politiques publiques sachant que le réchauffement climatique est inéluctable, et qu’une prise en charge publique d’une partie des dépenses d’investissements verts s’avère nécessaire ?
Jihane Bakkali
Doctorat es sciences économiques
FSJES –Agdal -Rabat
[1] Organisation Non Gouvernementale
[2] Groupe inter – gouvernemental d’experts sur le changement climatique, « Rapport 2018 »
[3] « Notre futur commun » Commission mondiale sur l’environnement et le développement, constituée par les NU en 1983.