Ecrit par Lamiae Boumahrou |
Les activités de gardiennage et de nettoyage, travaillant dans le cadre des marchés publics, broient du noir en raison de l’augmentation du Smig. Et pour cause, l’Etat refuse de revoir les contrats-cadre et de prendre en charge cette nouvelle hausse.
Le 1er septembre 2022, le gouvernement actait, lors du conseil de gouvernement, la hausse de 5% du salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) dans les secteurs de l’industrie, du commerce et des professions libérales (SMIG) et de 10% du salaire minimum agricole garanti (SMAG).
Ainsi le SMIG passe de 14,81 DH/heure à 15,55 DH/heure et le SMAG de 76,70 DH/jour à 84,37 DH/jour à partir de septembre 2022. Quant au secteur public, le salaire minimum passera de 3.300 DH/mois à 3.500 DH/mois. Avec l’application de cette mesure, le gouvernement honore l’un de ses engagements pris dans le cadre de l’accord social tripartite signé le 30 avril.
Le 5 septembre 2022, le ministre de l’Emploi et des Compétences, Younes Sekkouri, adressait une circulaire aux directeurs de son département pour veiller à l’application de ladite augmentation.
Certes il s’agit d’une bonne nouvelle (bien qu’insuffisante) pour des milliers de Marocains notamment dans un contexte marqué par une forte pression sur le pouvoir d’achat des ménages. Toutefois, cette décision renferme son lot de mauvaises surprises. C’est le cas des entreprises ayant remporté des marchés publics et dont les contrats ont été négociés avant l’entrée en vigueur de cette augmentation.
En effet, bien que les contrats aient été négociés sur la base de l’ancien Smig, les entreprises doivent appliquer la nouvelle décision gouvernementale.
Malheureusement, l’Etat refuse de revoir les contrats-cadre notamment pour les entreprises de gardiennage et de nettoyage. Il réfute même de prendre en considération l’augmentation du Smig dans le paiement des entreprises de services.
« Et ça ne date pas d’aujourd’hui. L’Etat a déjà refusé de revoir les contrats pour raison d’augmentation du Smig ce qui a poussé les entreprises touchées à recourir aux tribunaux », nous confie une source proche du dossier.
Ces entreprises, qui souffrent de plusieurs dysfonctionnements, se retrouvent entre le marteau et l’enclume.
Pourquoi donc l’Etat ne donne-t-il pas l’exemple ?
L’augmentation du Smig va s’appliquer à toutes les entreprises à partir du 1er septembre 2022. Une décision qui concerne tout le monde y compris les entreprises ayant négocié des contrats sur la base de l’ancien Smig. Le cas des sociétés de gardiennage et de nettoyage est particulier puisque l’octroi du marché repose sur un critère celui du moins-disant. La marge de bénéfice desdites entreprises repose uniquement sur le salaire des employés. Alors que les salaires sont déjà dérisoires, cette augmentation du Smig risque d’empirer la situation.
En effet, aujourd’hui les entreprises ayant remporté des contrats-cadre ( 3 ans) se retrouvent face à un donneur d’ordre (en l’occurrence l’Etat) qui refuse de revoir les contrats et les prix appliqués avant l’instauration de cette augmentation. En d’autres termes, elles doivent augmenter les salaires des employés avec les mêmes termes du contrat.
Ne s’agit-il pas d’une façon d’encourager à la fraude, à inciter au non-respect de la réglementation en vigueur et à participer au bafouement des droits des travailleurs ?
Et pourtant en 2019, le Chef du gouvernement, Saaddine El Otmani, avait émis une circulaire mettant en garde les différents départements ministériels sur les pratiques non règlementaires de ces 2 secteurs. Des pratiques qui sont encouragées par l’Etat même qui ne veille pas au respect de la réglementation en vigueur.
Parmi les dysfonctionnements relevés par ladite circulaire, le non-respect du SMIG, le non-respect de la réglementation du travail notamment en ce qui concerne le temps de travail, les congés…
L’ancien Chef du gouvernement avait appelé les administrations a donné l’exemple mais aussi à revoir les critères de choix des prestataires.
Ceci étant, nous sommes tentés de dire que l’Etat est en grande partie responsable des conditions de travail des travailleurs dans le domaine du gardiennage et du nettoyage notamment dans le cadre des marchés publics.