Lors du précédent entretien, nous avons interrogé Omar Bakkou au sujet des dispositions de la règlementation des changes régissant les modalités de paiement des opérations de services. En réponse O. Bakkou a présenté de manière détaillée ces dispositions. Dans le présent entretien, nous interrogerons O. Bakkou sur la pertinence desdites dispositions.
Vous avez présenté lors du précédent entretien les dispositions de la règlementation des changes régissant les modalités de paiement des services. Pourriez-vous nous donner votre avis sur la pertinence de ces dispositions ?
A mon avis, ces dispositions sont impertinentes.
Pourquoi ?
Pour des raisons à la fois de forme et de fond.
Quelles sont les raisons de forme ?
Les raisons de forme résident dans la dispersion des dispositions de la règlementation des changes régissant les modalités de paiement de services.
En effet, ces dispositions comprennent environ neuf régimes :un régime pour les paiements après la réalisation des opérations de services et huit régimes pour les paiements avant la réalisation de ces opérations.
Et en quoi, cette multitude de régimes est-elle problématique ?
Tout d’abord sur le plan des principes régissant une règlementation quelle qu’elle soit.
Ces principes résident dans l’uniformité des règles.
Cette uniformité des règles les rend compréhensibles, et partant, accessibles aux différents usagers.
A titre d’exemple, si on prend le cas du code de la route, la vitesse maximale est toujours fixée de manière uniforme, et ce, en dépit de l’extrême hétérogénéité de la population des assujettis à ce code(profil des conducteurs, nature des véhicules, etc.)
Mais les règlementations encadrent des réalités foncièrement différentes, faisant ainsi que certaines réglementations, en l’occurrence, celle relative aux opérations de change, peuvent avoir certaines spécificités qui justifieraient cette « non-uniformité » des règles !
Non à mon avis cette non-uniformité n’a aucune justification logique.
Pourriez-vous donner des exemples concrets pour étayer ce jugement de valeur ?
Les exemples sont nombreux et concernent aussi bien les paiements par acompte que ceux par anticipation.
Pourriez-vous nous donner des exemples concrets concernant les paiements par acomptes ?
Là aussi on pourra citer plusieurs exemples.
Commençons d’abord par le « droit commun » en la matière, soit la distinction entre les taux de 30% et de 50%.
En effet, les paiements par acompte peuvent être effectués dans la limite de :
-30% du prix facturé , lorsqu’il s’agit de prestations de services à caractère ponctuel ;
-50% du prix facturé , lorsqu’il s’agit des prestations de services portant sur la réparation et la révision technique à l’étranger des bateaux de pêche ou de navires marocains .
Cette différenciation n’a, de mon point de vue, aucune justification logique.
Pourquoi ?
Car par exemple, lorsqu’on passe en revue la liste des prestations de services à caractère ponctuel, on trouve que cette liste comprend les prestations relatives à la réparation de matériel à l’étranger.
Ces services sont soumis par conséquent au taux de 30% précité.
Alors que ce taux s’établit à 50% lorsqu’il s’agit de prestations relatives à la réparation à l’étranger d’une catégorie particulière de matériel, à savoir les bateaux de pêche et les navires.
Pour reprendre l’analogie avec le code de la route, cette disposition serait pareille à une disposition qui fixe la vitesse maximale à 140 Km / heure pour les véhicules d’une certaine catégorie.
Vous avez utilisé l’expression « commençons d’abord », cela suggère qu’il y ‘a d’autres exemples concrets ?
Effectivement, on pourra également citer l’exemption du secteur public du « droit commun en matière de paiements par acompte ».
Cette exemption réside dans le fait que le taux de l’acompte n’est pas limité lorsqu’il s’agit de marchés publics .
Ce privilège accordé au secteur public laisse entendre que le secteur privé est « moins sérieux » comparativement au secteur public.
Cette présomption est à mon avis inappropriée.
Avez-vous d’autres exemples concrets concernant les paiements par acomptes ?
Effectivement, on pourra également citer l’exclusion du secteur exportateur du droit commun.
En effet, le taux de l’acompte n’est pas limité lorsque le paiement est effectué par une entreprise exportatrice.
Ce privilège accordé aux entreprises exportatrices est, de mon point de vue, infondé sur le plan économique.