La cession de 8% de Maroc Telecom continue à faire couler beaucoup d’encre. Il faut dire que l’annonce faite par l’opérateur le 31 mai a surpris plus d’un et toute la sphère économique s’est posée pratiquement la même question : Pourquoi le choix a-t-il été porté sur Maroc Telecom sachant que la liste contient d’autres privatisables ? La réponse est pourtant si évidente, le Maroc traverse une période difficile et est dans l’urgence de renflouer ses caisses pour faire face à ses besoins. Les derniers chiffres publiés par la TGR montrent que le déficit du Trésor n’a pas cessé de se creuser durant les six premiers mois de 2019 s’établissant à 21,6 Mds de DH à fin mai.
Pour répondre aux besoins de plus en plus pressants qui ont pour toile de fond l’inclusion sociale telle que recommandée par le Souverain dans son discours du 20 août 2018 et avec une marge de manœuvre aussi réduite, les pouvoirs publics ne pouvaient ouvrir le bal des privatisations qu’avec une valeur sûre, des plus liquides de la place.
Toutefois, si la communication sur les 2% de l’Offre publique de vente (OPV) a été bien orchestrée et les médias ont eu droit à des éléments de réponse sur les enjeux de l’opération pour la Bourse de Casablanca, la fixation du prix de vente…, le bouclage de la cession des 6% du capital de Maroc Telecom à 11 institutionnels de la place est passé sous silence.
Les médias n’ont d’ailleurs pas caché leur appréhension le jour de la conférence organisée dans les locaux de la Bourse de Casablanca, le 19 juin dernier, où tout le monde s’attendait à la présence du ministre de l’Economie et des Finances, Mohamed Benchaâboun, pour avoir plus de détails sur cette opération de cession qui ramène la participation de l’Etat dans Maroc Telecom de 30% à 22%. Les médias étaient même avides d’informations sur le choix des 6% et 2%.
Dans ce sillage et pour ne pas perdre la main en matière de gestion et de gouvernance, l’opération s’est faite à hauteur de 6% du capital en faveur d’institutionnels marocains liés à l’Etat comme la Caisse marocaine des retraites (CMR) et le Régime collectif d’allocation de retraite (RCAR), à hauteur de 2 Mds de DH chacun.
Après le RCAR dont le Directeur du Pôle prévoyance de CDG, Ali Bensouda s’est livré au micro de EcoActu sur les tenants d’une décision qu’il a qualifié d’autonome et réfléchie, nous avons jugé opportun de se pencher sur la participation de la Caisse Marocaine des Retraites à l’opération de cession de Maroc Telecom et son enjeu pour la Caisse.
De prime abord, il est utile de rappeler que la CMR est un investisseur institutionnel de référence sur les marchés financiers marocains, avec un actif net de la cession sous gestion qui se monte, à fin 2018, à près de 91 Mds de DH en valeur marché. « Elle est autorisée à investir sur le marché boursier jusqu’à 30% de l’encours du portefeuille global contre une exposition à fin mai 2019, de près de 18% », explique le management de la CMR. Il s’agit d’un potentiel intéressant à saisir en vue d’optimiser davantage le rendement du portefeuille tout en respectant les marges de risques accordées par le Conseil d’Administration de la Caisse.
Interrogé sur les raisons ayant poussé la CMR à souscrire à l’offre de vente des titres Maroc Telecom, le management répond : « En effet le titre Maroc Telecom est :
- la première capitalisation de la place boursière de Casablanca, soit un titre qui pondère, forcément, dans tous les portefeuilles actions. Techniquement parlant, c’est une opportunité pour aligner l’exposition de notre portefeuille « Actions » sur celle de notre benchmark « MASI Rentabilité » ;
- une valeur des plus liquides de la place vu le volume des échanges passés sur la valeur ;
- un titre qui offre l’un des meilleurs rendements du marché. Au cours de 127 DH, on est sur un rendement de dividendes de près de 5,5% contre un rendement moyen de 3,9% pour tout le marché ;
- le prix de l’opération (127DH) est jugé fort probant par rapport au prix marché mais aussi par rapport aux valorisations estimées par les analystes et brookers de la place qui valorisent le titre Maroc Télécoms dans une fourchette allant de 139 à 169 DH, soit un Upside entre 10% et 33% ».
D’un point de vue économique, il est important de signaler que l’opérateur historique est entré depuis 2016, dans un cycle de rentabilité plus vertueux. Mieux encore, il présente des taux de marges opérationnelles des plus élevées d’Afrique.
Par ailleurs sur l’autonomie de prise de décision, il est signalé que cet engagement est porté par une décision réfléchie et basée sur une analyse réalisée dans le cadre d’un processus formalisé, documenté et certifié.
Enfin sur le plan réglementaire, l’opération cadre parfaitement avec le cadre légal et réglementaire de la CMR qui délimite avec précision, l’univers d’investissement et les supports de placement, le niveau de diversification souhaité ainsi que les règles de dispersion des risques à observer. Autrement dit l’adéquation entre les engagements et les placements obéit à la réglementation à laquelle est assujettie la Caisse.
Voir également : [WEBTV] « LA PARTICIPATION DU RCAR À L’ACQUISITION DE IAM A ÉTÉ ACTÉE DE MANIÈRE INDÉPENDANTE » SELON A. BENSOUDA