Le Conseil de Bank Al-Maghrib a tenu le mardi 19 mars sa premieÌre reÌunion de lâanneÌe 2024. Il a dĂ©cidĂ© de maintenir le taux directeur inchangĂ©.
Lors de cette session, il a analyseÌ lâeÌvolution de la conjoncture nationale et internationale ainsi que les projections macroeÌconomiques aÌ moyen terme de la Banque.Â
Il a, en particulier, releveÌ la reÌsilience globale de lâeÌconomie mondiale en 2023, malgreÌ le resserrement moneÌtaire et les tensions geÌopolitiques, ainsi que lâatteÌnuation des pressions inflationnistes aÌ un rythme plus rapide que preÌvu.
Au niveau national, apreÌs la deÌceÌleÌration quâelle aurait connue en 2023, la croissance non agricole devrait sâameÌliorer graduellement, soutenue notamment par les investissements publics, alors que la production agricole continue de paÌtir de la reÌcurrence des seÌcheresses et de lâaccentuation du stress hydrique.
Pour ce qui est de lâinflation domestique, apreÌs le pic de 10,1% atteint en feÌvrier 2023, elle sâest inscrite en baisse, revenant aÌ 3,4% en deÌcembre et terminant ainsi lâanneÌe 2023 avec une moyenne de 6,1% apreÌs 6,6% en 2022. Elle poursuivrait son ralentissement pour sâeÌtablir aÌ 2,2% cette anneÌe et aÌ 2,4% en 2025. Sa composante sous-jacente a suivi une trajectoire similaire, passant de 6,6% en 2022 aÌ 5,6% en 2023, et devrait osciller autour de 2,3% cette anneÌe et en 2025.
Le Conseil a eÌgalement pris note quâapreÌs deux trimestres successifs de baisse, les anticipations dâinflation aÌ moyen terme, telles quâelles ressortent de lâenqueÌte trimestrielle de BAM aupreÌs des experts du secteur financier, ont connu une quasi-stabiliteÌ au premier trimestre de 2024. Sur le plan de la transmission de la politique moneÌtaire, les taux deÌbiteurs se sont stabiliseÌs au dernier trimestre de 2023, lâaccroissement total depuis le deÌbut du resserrement moneÌtaire se maintenant ainsi aÌ 112 points de base contre 150 points pour le taux directeur. La hausse des taux a concerneÌ davantage les entreprises que les particuliers et a eÌteÌ moins importante pour les TPME que pour les grandes entreprises.
Le Conseil a aussi releveÌ les fortes incertitudes qui entourent les perspectives eÌconomiques et lâeÌvolution de lâinflation en lien, au niveau international, avec les tensions geÌopolitiques et la tenue dâeÌlections dans de nombreux pays et, au plan national, avec les conditions climatiques et le stress hydrique.
Au regard de lâensemble de ces donneÌes, il a jugeÌ que le niveau actuel de 3% du taux directeur reste approprieÌ pour renforcer lâancrage des anticipations dâinflation et soutenir son retour aÌ des niveaux en ligne avec lâobjectif de stabiliteÌ des prix. En conseÌquence, il a deÌcideÌ de le maintenir inchangeÌ tout en continuant de suivre de preÌs lâeÌvolution de la conjoncture eÌconomique et de lâinflation.
Sur les marcheÌs internationaux des matieÌres premieÌres, lâeÌvolution des cours de lâeÌnergie reste entoureÌe de fortes incertitudes, alimenteÌes par les tensions geÌopolitiques et les perturbations du transport maritime en Mer Rouge. Le prix du Brent passerait de 82,2 dollars le baril en 2023 aÌ 81,2 dollars en moyenne cette anneÌe, en raison du ralentissement de la demande mondiale et de lâaccroissement de lâoffre dans les pays non-membres de lâOPEP, avant dâaugmenter aÌ 84,5 dollars en 2025. Pour les prix des denreÌes alimentaires, apreÌs la baisse sensible enregistreÌe en 2023, lâindice FAO marquerait un nouveau repli de 3,7% en 2024, avant de croitre de 4,4% en 2025. Concernant le phosphate et ses deÌriveÌs dâorigine marocaine, le prix du DAP reculerait de 589 dollars la tonne en 2023 aÌ 543 dollars en 2024, avant de marquer une hausse aÌ 575 dollars en 2025. Celui du phosphate brut devrait revenir de 271 dollars la tonne aÌ 197 dollars puis aÌ 162 dollars respectivement.
Dans ce contexte, lâinflation continuerait de ralentir dans les principales eÌconomies avanceÌes.
Aux Etats-Unis, elle passerait de 4,1% en 2023 aÌ 2,9% en 2024 puis aÌ 2,6% en 2025, refleÌtant la diminution de sa composante sous-jacente et des prix de lâeÌnergie. Dans la zone euro, elle devrait deÌceÌleÌrer de 5,4% en 2023 aÌ 2,3% en 2024 puis aÌ 1,9% en 2025, favoriseÌe par la persistance de lâeffet du resserrement moneÌtaire.
Pour ce qui est des deÌcisions des banques centrales des principales eÌconomies avanceÌes, la BCE a gardeÌ le 7 mars ses taux inchangeÌs pour la quatrieÌme fois conseÌcutive et preÌvoit de mettre un terme aux reÌinvestissements dans le cadre de son programme PEPP fin 2024. De meÌme, aÌ lâissue de sa reÌunion des 30 et 31 janvier, la FED a maintenu pour la quatrieÌme fois de suite la fourchette cible du taux des fonds feÌdeÌraux inchangeÌe aÌ [5,25%-5,50%] et a indiqueÌ quâelle continuera aÌ reÌduire les avoirs en titres du TreÌsor et ceux adosseÌs aÌ des creÌances hypotheÌcaires.
Sâagissant des perspectives de lâeÌconomie mondiale, elles demeurent entoureÌes de fortes incertitudes. Aux Etats-Unis, la croissance eÌconomique devrait revenir de 2,5% en 2023 aÌ 1,8% en 2024 et aÌ 1,3% en 2025, et dans la zone euro, elle resterait faible aÌ 0,9% en 2024, avant de sâacceÌleÌrer aÌ 1,9% en 2025. Dans les principaux pays eÌmergents, le rythme de lâactiviteÌ en Chine devrait ralentir de 5,2% en 2023 aÌ 4,5% cette anneÌe et sâeÌtablir aÌ 4,7% en 2025, paÌtissant de la persistance des difficulteÌs du secteur immobilier, de la deÌgradation de la confiance des consommateurs et de la faiblesse de la demande eÌtrangeÌre. En Inde, la croissance demeurerait robuste aÌ 6,2% en 2024 et en 2025 apreÌs 7,2% en 2023, soutenue principalement par la vigueur des investissements publics.
Au niveau national, le deÌmarrage de la campagne agricole a eÌteÌ marqueÌ par des conditions climatiques deÌfavorables, avec des preÌcipitations faibles et ineÌgalement reÌparties sur les plans territorial et temporel, qui ont affecteÌ la superficie emblaveÌe des ceÌreÌales. Celle-ci se serait situeÌe autour de 2,5 millions dâhectares contre preÌs de 3,7 millions une anneÌe auparavant. Ainsi, selon les projections de Bank Al-Maghrib, la production ceÌreÌalieÌre avoisinerait 25 millions de quintaux contre 55,1 millions une anneÌe auparavant.
Dans ce contexte, la valeur ajouteÌe agricole se contracterait de 6,4% en 2024 avant de rebondir de 12,8% en 2025, sous lâhypotheÌse dâun retour aÌ une reÌcolte ceÌreÌalieÌre moyenne de 55 millions de quintaux. Quant aux activiteÌs non agricoles, leur rythme de progression sâameÌliorerait de 2,6% en 2023 aÌ 3% en 2024 puis aÌ 3,5% en 2025, refleÌtant en particulier la dynamique attendue de lâinvestissement en lien avec les diffeÌrents chantiers engageÌs et preÌvus. Au total, la croissance eÌconomique aurait eÌteÌ proche de 3% en 2023 et devrait se limiter aÌ 2,1% en 2024 avant de sâacceÌleÌrer aÌ 4,3% en 2025.
Sur le plan des comptes exteÌrieurs, le deÌficit commercial sâest atteÌnueÌ de 7,3% en 2023, reÌsultat dâun recul de 2,9% des importations et dâune quasi-stabiliteÌ des exportations. En paralleÌle, les transferts des MRE se sont accrus de 4% aÌ 115,2 milliards de dirhams et les recettes voyages de 11,7% aÌ 104,6 milliards, ramenant ainsi le deÌficit du compte courant aÌ 0,6% du PIB contre 3,5% un an auparavant. Ce dernier se creuserait aÌ 2,3% du PIB en 2024 et aÌ 2,8% en 2025, en lien principalement avec la hausse des importations qui avoisinerait 7,5% annuellement tireÌes essentiellement par les achats de produits alimentaires et des biens dâeÌquipement.
Quant aÌ la facture eÌnergeÌtique, elle sâalleÌgerait de 5% en 2024 avant de sâalourdir de 4,7% en 2025 aÌ 121,4 Mds de DH. Pour ce qui est des exportations, elles sâaccroitraient de 4,1% en 2024 et de 8,5% en 2025, porteÌes notamment par la poursuite de la bonne performance du secteur automobile, avec des augmentations de 9,6% puis de 13,3% aÌ 176,1 Mds de DH en 2025, et par la reprise des ventes des phosphate et deÌriveÌs qui atteindraient 85 milliards de dirhams en 2025. Pour ce qui est des recettes voyages, beÌneÌficiant de la dynamique preÌvue de lâactiviteÌ touristique, elles continueraient de sâameÌliorer aÌ un rythme autour de 7,5% annuellement pour atteindre 120,8 milliards de dirhams en 2025.
De meÌme, lestransferts des MRE se maintiendraient aÌ des niveaux eÌleveÌs, soit 116,5 Mds de DH en 2024 et 122,4 Mds de DH en 2025. Concernant les recettes dâIDE, apreÌs une baisse sensible en 2023 aÌ lâeÌquivalent de 2,2% du PIB, elles avoisineraient 3,1% du PIB en moyenne au cours des deux prochaines anneÌes. Au total, et tenant compte notamment des financements exteÌrieurs preÌvus du TreÌsor, les avoirs officiels de reÌserve se stabiliseraient aÌ 359,8 Mds de DH aÌ fin 2024 avant de se renforcer aÌ 373,5 Mds de DH en 2025, soit lâeÌquivalent de 5 mois et 5 jours dâimportations de biens et services.
Sâagissant des conditions moneÌtaires, le besoin de liquiditeÌ des banques, tireÌ par la hausse preÌvue de la circulation fiduciaire, devrait continuer de se creuser, passant de 111,4 Mds de DH aÌ fin 2023 aÌ 121,1 Mds de DH aÌ fin 2024 et aÌ 143,2 Mds de DH aÌ fin 2025. Pour ce qui est du creÌdit bancaire au secteur non financier, apreÌs la sensible deÌceÌleÌration en 2023, lieÌe principalement aÌ la baisse des prix des produits eÌnergeÌtiques et alimentaires ainsi quâaÌ lâamortissement des preÌts accordeÌs dans le cadre des lignes de garantie mises en place lors de la crise pandeÌmique, il augmenterait de 4,4% en 2024 et de 4,7% en 2025. Pour sa part, le taux de change effectif reÌel connaitrait une appreÌciation de 1,3% en 2024 apreÌs celle de 0,8% en 2023, le niveau dâinflation domestique infeÌrieur aÌ celui des pays partenaires et concurrents commerciaux devant atteÌnuer lâeffet de lâappreÌciation preÌvue du taux de change effectif nominal, avant de connaitre une quasi-stabiliteÌ en 2025.
Sur le volet des finances publiques, lâexeÌcution budgeÌtaire a cloÌtureÌ lâanneÌe 2023 par un net alleÌgement du deÌficit aÌ 4,4% du PIB. En deÌpit des besoins importants, en lien notamment avec la geÌneÌralisation de la protection sociale, lâaccroissement de la masse salariale et le maintien dâun niveau eÌleveÌ dâinvestissement du TreÌsor, ce deÌficit devrait, selon les projections de Bank Al-Maghrib, reculer aÌ 4% du PIB en 2025, apreÌs une quasi-stabiliteÌ en 2024. Cette eÌvolution refleÌterait notamment le renforcement des rentreÌes fiscales, la forte mobilisation des ressources provenant des meÌcanismes de financement speÌcifiques ainsi que le repli de la charge de compensation.